Messieurs, continuez à nous rançonner, à nous convoquer dans les commissariats et menacez-nous de prison. Nous continuerons à faire notre métier de journaliste. Il y a dans l'acharnement du pouvoir contre certains journaux et leurs directeurs une certaine méthodologie. Ne doutons jamais de la disponibilité de nos gouvernants pour la nuisance. Ils n'excellent que dans l'art de tailler ce pays en pièces. Après avoir actionné les imprimeries de l'Etat pour soutirer des rançons aux journaux ; après avoir fait dépêcher des inspecteurs du travail, voilà qu'on actionne encore une fois la police, sous le couvert de la justice, pour convoquer des journalistes dans les commissariats. Que nous reproche-t-on en vérité ? D'être de mauvais payeurs ? Foutaises ! On nous reproche d'avoir révélé des scandales et des malversations dans lesquels sont impliquées des personnalités du pouvoir. On nous reproche d'être critiques quant à la gestion des affaires du pays. On nous reproche de dénoncer par des faits des pratiques de corruption. En fait, on nous reproche d'exercer notre métier de journaliste. Nous n'avons pas vocation à être des justiciers dans un pays où la justice est soumise au diktat des puissants. Nous n'avons pas vocation à être des juges ou des procureurs. À chacun son métier. Mais, la vérité, toutes les vérités doivent êtres dites et écrites. Si cela doit nous coûter des rançons, des convocations aux commissariats et des emprisonnements, alors nous payerons les rançons, nous irons répondre aux convocations de la police, parce que nous respectons les institutions et nous irons en prison. Nous payons et nous payerons pour nos idées et pour les idéaux auxquels nous tenons plus que tout. Ce ne sont pas les rançons, les intimidations et la prison qui vont nous faire peur. Ce qui fait peur aujourd'hui aux Algériens, c'est particulièrement cette propension du clan de Bouteflika à vouloir à tout prix régenter l'Algérie. Réveillez-vous, Messieurs ! Le pays a changé de siècle et de mentalité. Les Algériens aspirent à plus de liberté, à plus de justice et à plus d'équité sociale. Et hélas, la presse libre est devenue, malgré elle, l'un des rares espaces où s'expriment ces aspirations. Alors, Messieurs, continuez à nous rançonner, à nous convoquer dans les commissariats et menacez-nous de prison. Nous continuerons à faire notre métier de journaliste. F. A.