Pour avancer dans ce projet de mobilisation, crucial et novateur pour le devenir de la nation algérienne, essayons de comprendre l'inéluctabilité du changement et le processus par lequel préparer, réaliser et réussir le changement. Au départ du processus de réformes dans la deuxième moitié de la décennie 1980, le débat portait sur le rythme de mise en œuvre des transitions : thérapie de choc ou gradualisme ? En fait, il s'agissait du choix de la mise en œuvre des réformes d'un seul bloc dans un espace de temps très court (thérapie de choc) ou bien de les mettre en œuvre de façon progressive, étape par étape (gradualisme). L'option retenue par le pouvoir politique a été d'adopter la thérapie de choc forte dans la transition politique et le gradualisme très lent dans la transition économique. Autrement dit, on a voulu aller vite et très loin dans la transition politique vers la démocratie : naissance d'une soixantaine de partis appelés associations à caractère politique, liberté de la presse, ouverture du champ médiatique par l'organisation de débats contradictoires dans la radio et la télévision publiques, occupation non organisée de la rue et des lieux du culte..., c'était l'euphorie. Mais la nouvelle Constitution, adoptée en 1989, n'a pas été jusqu'à l'octroi du droit de créer des partis politiques. Elle s'est limitée à l'autorisation de créer des “associations à caractère politique”. Voici le contenu de l'article 40 de la Constitution de 1989 : “Le droit de créer des associations à caractère politique est reconnu. Ce droit ne peut toutefois être invoqué pour attenter aux libertés fondamentales, à l'unité nationale, à l'intégrité territoriale, à l'indépendance du pays et à la souveraineté du peuple.” Etait-on naïf au point de croire que le gradualisme allait de pair avec la distinction faite entre association à caractère politique et parti politique ? Cette ambiguïté a été levée dans la Constitution de 1996 qui consacre le droit de création de partis politiques dans son article 42 : “Le droit de créer des partis politiques est reconnu. Ce droit ne peut toutefois être invoqué pour attenter aux libertés fondamentales, aux valeurs et composantes fondamentales de l'identité nationale, à l'unité nationale, à la sécurité et à l'intégrité du territoire national, à l'indépendance du pays et à la souveraineté du peuple ainsi qu'au caractère démocratique et républicain de l'Etat. Dans le respect des dispositions de la présente Constitution, les partis politiques ne peuvent être fondés sur une base religieuse, linguistique, raciale, corporatiste ou régionale. Les partis politiques ne peuvent recourir à la propagande partisane portant sur des éléments mentionnés à l'alinéa précédent. Toute obédience des partis politiques, sous quelle que forme que ce soit, à des intérêts ou parties étrangers, est proscrite. Aucun parti politique ne peut recourir à la violence ou à la contrainte, quelles que soient la nature ou les formes de celles-ci. D'autres obligations et devoirs sont prescrits par la loi”. (fin de citation). Ainsi, nous voyons apparaître dans cette nouvelle version de la Constitution : les valeurs et composantes fondamentales de l'identité nationale, la sécurité, le caractère démocratique et républicain de l'Etat. Cette thérapie de choc démocratique, née de la Constitution de 1989, a permis à un seul parti de canaliser le mécontentement et se présenter comme seul capable d'enlever la légitimité de l'ancien système. Ce fut l'arrêt du processus électoral avant le deuxième tour du scrutin. À l'opposé, il y a eu beaucoup d'hésitations dans la mise en œuvre des réformes économiques, c'était la frilosité, en particulier en ce qui concerne le règlement du problème de l'endettement extérieur et la restructuration du secteur productif public. À la suite de la chute brutale des recettes d'exportation d'hydrocarbures survenue en 1986, un processus important de réformes économiques a été mis en œuvre. Au plan institutionnel, les réformes ont notamment touché l'autonomie des entreprises publiques, l'organisation du commerce extérieur et l'abolition des monopoles de juré, la privatisation de l'agriculture, l'assouplissement des relations de travail, la libéralisation des conditions de l'investissement privé, la mise en place de nouveaux mécanismes de protection sociale. Au plan macroéconomique, elles ont englobé la politique du crédit, la structure et le niveau des taux d'intérêt, le taux de change, la politique fiscale, la libération des prix. Au plan fiscal, il y a eu la mise en place de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la simplification de l'impôt sur le revenu. À jeudi prochain pour la suite de notre analyse. Entre-temps débattons sur les meilleurs moyens d'avancer vers un avenir de progrès et de prospérité pour tous les Algériens. À la tentation du pessimisme, opposons la nécessité de l'optimisme ! A. B.