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Abdallah Zekri
Un religieux iconoclaste
Publié dans Liberté le 03 - 04 - 2012

L'affaire Merah a porté une nouvelle fois sur le front médiatique un vieux militant de la cause des Algériens et plus généralement des musulmans en France.
Il court les plateaux de télévision et les studios des radios comme un artiste vedette ou un grand homme politique. Pour les médias, c'est un client parfait qui ne connaît pas la langue de bois et qui manie l'humour comme un guerrier le glaive sur un champ de bataille découvert. C'est un combattant qui préfère le face-à-face aux embuscades. Il n'avance jamais masqué. Ce qui étonne lorsqu'on rencontre Abdallah Zekri, c'est l'énergie de ce septuagénaire aux yeux bleus étincelants.
Il parcourt la France dans tous ses recoins, là où l'appelle la cause des Algériens et plus généralement des musulmans. Homme pieux, accomplissant assidûment ses prières, hadj ayant effectué le pèlerinage de la Mecque, il glisse aisément sous le burnous et la araquia, égrainant le chapelet et récitant le Coran. Pourtant, c'est en costume et cravate qu'on le voit le plus souvent.
Et pour côtoyer quotidiennement les hommes de la foi, il en connaît parfaitement les faiblesses et les hypocrisies. Quand il le veut, il ne se prive pas de déclencher leur hilarité à coups de provocations et de plaisanteries grivoises. En la matière, ce mozabite de Annaba où s'est installé son grand-père à la fin du XIXe siècle, est un répertoire sans fin.
Un maître capable de rivaliser avec n'importe quel comique, capable de faire tordre de rire une assistance prétendument prude, fusse en présence de femmes. Il cultive grâce à un subtil syncrétisme la piété des gens du Sud et la joie de vivre des Méditerranéens.
Revenu sur le front médiatique avec l'affaire Merah, ce combattant autoproclamé de la foi qui a semé la mort avant de voir sa trajectoire brisée par les hommes du Raid, Abdallah Zekri laboure depuis des décennies le terrain de la lutte contre le racisme en France. C'est ce qui valu à ce conseiller de Dalil Bou-bakeur, le recteur de la Grande mosquée de Paris, d'être nommé l'été dernier président de l'Observatoire des actes islamophobes créé par le Conseil français du culte musulman (CFCM). Dans le désarroi où la famille Merah s'est retrouvée plongée après la mort de son “jihadiste”, c'est en M. Zekri qu'elle a placé sa confiance pour la représenter auprès des autorités et parler en son nom aux médias. Lorsque le maire de Toulouse a voulu empêcher l'inhumation sur le territoire de sa commune après le refus de l'Algérie, c'est Abdallah Zekri qui l'a rappelé à la loi menaçant de poursuite devant le tribunal administratif. “L'Algérie ne botte pas en touche”, a-t-il asséné soulignant que Mohamed Merah est un Français né à Toulouse, la ville où il a vécu jusqu'à sa mort à retentissement planétaire. C'est donc ici et nulle autre part ailleurs qu'il a droit à une sépulture. L'édile a fini par s'exécuter mais M. Zekri ne s'est pas privé aussi de renvoyer le père Merah à ses devoirs, le jugeant coupable d'abandon de famille. “Qu'il ferme sa gueule”, a-t-il brocardé. Au milieu d'une campagne électorale indigente, l'islam et l'immigration se sont révélés les boucs émissaires d'une crise qu'ils n'ont pourtant pas suscitée. L'extrême droite a entraîné le président sortant sur ce terrain glissant au point que le halal devienne un sujet d'intérêt national, promu à ce rang par des hommes politiques qui ne connaissent rien aux religions, sinon leur leçon de catéchisme apprise sur le banc de l'école pour certains d'entre eux. Cette ignorance a conduit le Premier ministre François Fillon à dénoncer des “pratiques traditionnelles” qui sont aussi celles de la communauté juive.
Sans se rendre compte, il a déclenché une indignation dont Abdallah Zekri apparaîtra comme le porte-parole dans les médias. Le CFCM n'a pas moufté. Et la Grande mosquée de Paris a mis en place une commission théologique pour examiner la conformité des pratiques dénoncées par Fillon avec les temps modernes, lui donnant ainsi raison alors que les juifs n'ont rien exprimé de tel.
Sur le plateau de La Chaîne parlementaire, M. Zekri relèvera la diligence avec laquelle les dirigeants français se sont empressés de recevoir les responsables de la communauté israélite quand les musulmans l'ont été presque par inadvertance… Lorsqu'au printemps de l'année dernière, l'UMP avait lancé un débat sur l'islam sous le couvert de la laïcité, c'est encore M. Zekri qui a exprimé de la manière la plus spectaculaire l'indignation de ses coreligionnaires.
Sous les coupoles de la mosquée balayée par l'œil des caméras, il avait déchiré sa carte d'adhérent au parti de Nicolas Sarkozy dont venait de s'emparer l'ambitieux Jean-François Copé qui a eu quand même l'élégance de ne jamais dénoncer ce geste.
Il recevra même M. Zekri pour lui demander de réintégrer sa famille politique. “Après le débat sur l'identité nationale, la polygamie, la burqa, le retrait de la nationalité française, la prière dans la rue, la proposition d'une députée UMP ( Chantal Brunel, le 8 mars 2011 ndlr) de remettre dans des bateaux ‘peut-être sans fond de cale' les immigrés qui viendraient de la Méditerranée, voilà que l'UMP a fait le choix de réfléchir et de débattre sur l'Islam en France ou sur l'islam de France. Pour nous, ces discours stigmatisants sont inacceptables. Tout le monde sait que ce débat n'avait pas lieu d'être. Il intervient dans une période où le Front national est au zénith. Doit-on pour cela se servir des musulmans comme des boucs-émissaires au risque de mettre en danger le vivre ensemble ?” C'était son argumentaire.
Résidant à Nîmes, dans le sud de la France où les idées de l'extrême droite ont prospéré plus qu'ailleurs, M. Zekri n'a pas pas hésité à monter au “front”. Il a d'ailleurs remporté la plus belle victoire juridique pour les musulmans de France. En décembre 2011, il avait poursuivi un sous-officier, fraîchement retraité, qui avait profané une tombe musulmane à Castres. Sans avocat, il a plaidé personnellement obtenant du tribunal qu'il condamne celui qui se réclamait du Front national à une peine de prison avec sursis et à une amende d'un euro symbolique.
À la défense qui demandait des travaux d'intérêt public, M. Zekri proposait, toujours provocateur, qu'on l'envoie “nettoyer les chiottes des mosquées”. Castres , toujours. Dans cette ville qui abrite une caserne de parachutistes, un Algérien avait été poignardé par des militaires qui n'ont pas réussi à l'intimider dans une discothèque où il se trouvait avec des amies maghrébines. La vengeance fut sauvage et M. Zekri, en tant que représentant de l'Amicale des Algériens en Europe, fut en première ligne pour obtenir réparation de ce crime raciste. Le militaire qui avait porté les coups de couteau fut condamné en février 1990 à dix ans de prison ferme et ses complices à vingt et dix-huit mois. Ce fut une première !
Ce combat contre le racisme, M. Zekri l'avait accompli au péril de sa vie dans les années 70. Les autorités françaises en étaient arrivées à exprimer officiellement leur incapacité à assurer sa sécurité. Lors d'une réunion publique, M. Zekri avait en effet dénoncé la “complicité” des services de police avec les meurtriers des Algériens. En réaction, les associations de pieds-noirs exigèrent son expulsion et appelèrent à une mobilisation contre lui. M. Zekri ne se laissa pas démonter. La lutte pour la dignité a un prix qu'il était disposé à le payer. Quel qu'il pût être. Ce combat pour la dignité et pour la liberté n'a pas de couleur de peau. Ni de couleur politique. Lorsque deux journalistes français ont été kidnappés en Irak en 2004, M. Zekri, se fit un devoir de militer pour leur libération. Avec d'autres membres du CFCM, il constitua une délégation qui se rendit à Bagdad pour tenter de négocier leur libération avec les dignitaires religieux sunnites. Son indignation n'est pas sélective : lorsque d'autres communautés sont agressées en France, il ne manque jamais à son devoir de solidarité.
La communauté algérienne du Languedoc-Roussillon lui doit l'ouverture d'un consulat à Montpellier. Ce fut en 1996 lorsque le pouvoir de l'époque avait entrepris de réunir les assises de la communauté nationale à l'étranger. Reçu alors par le président Liamine Zéroual, il lui fit cette suggestion en présence du ministre Tedjini Salaouandji. Le parcours politique de M. Zekri est marqué d'un important jalon : aux législatives de décembre 1991, la liste qu'il dirigeait au nom du FLN avait battu celle du FIS au terme d'une bataille qui restera imprimée dans l'esprit des habitants de Ghardaïa.
Peu découragé par les intimidations de son rival qui menait une campagne de caniveau, il l'avait humilié en dévoilant ses frasques cachées sous les épaisses barbes des militants islamistes. En plus de ses fonctions au sein de l'Amicale des Algériens en Europe, organisation sous contrôle du parti unique, M. Zekri avait été nommé en 1978 responsable fédéral du FLN d'Alger centre. Puis membre permanent au Département organique, chargé des relations avec les structures du parti (le 29/04/1980) et membre permanent à la Commission des organisations générales du FLN. Membre de l'organisation civile du FLN pendant la guerre, il a été cadre au ministère du Commerce après avoir servi au sein de la Gendarmerie nationale. D'abord à Constantine comme responsable du service recrutement, puis à Sidi Bel-Abbès comme responsable du service administratif des écoles de gendarmerie.
C'est en exerçant comme jeune gendarme sous l'administration coloniale qu'il servit le FLN comme en attestent les documents délivrés dès l'indépendance par le bureau des Moudjahidine.
Avant, il fut fonctionnaire des PTT affecté au village Draa SAS ainsi appelé par qu'il abritait la section de triste mémoire. Vulgairement, un consul étonné par sa raideur a cru malin de jouer sur cette confusion pour tenter de le faire passer pour un ancien collabo.
Il a fait circuler une pétition anonyme signé la “famille révolutionnaire”. La blague a peu fait rire. M. Zekri est connu pour s'affranchir même de la discipline de groupe lorsqu'elle est de mauvais présage. En juin dernier, il n'a pas hésité à désavouer ses supérieurs qui avaient appelé à boycotter les élections du CFCM. Il ne se priva pas d'appeler à son devoir de réserve un consul qui, à ses yeux, passait plus de temps à s'occuper du culte musulman dans sa circonscription que des administrés auxquels il doit ses privilèges.
Y. S.


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