Ce sont 112 entreprises chinoises et 105 turques qui ont pris part à la Foire d'Alger. La Chine et la Turquie tiennent à arracher leur part du marché algérien. Malgré une augmentation somme toute relative du nombre des exposants étrangers à l'édition 2012 de la Foire internationale d'Alger, encouragés, sans doute, par la hausse des importations de l'Algérie qui ont atteint 46,45 milliards de dollars US en 2011, contre 40,47 mds USD en 2010, et l'important volume des financements (286 mds USD) dégagés au titre du Programme d'investissements publics sur la période 2010-2014, la participation étrangère, appréciée dans la durée, poursuit son reflux. Cette tendance structurelle à la baisse de la participation des entreprises étrangères à la Foire internationale d'Alger dure déjà depuis plusieurs années. Mais c'est surtout à partir de 2008 que cette baisse est devenue flagrante, puisque la participation étrangère est descendue, pour la première fois dans la longue histoire du premier Salon économique d'Algérie, au dessous du seuil des 1000 entreprises. En effet, cette année-là, la 41e édition de la Foire internationale d'Alger avait accueilli 811 entreprises étrangères, contre 1066 entreprises une année auparavant. La Chine et la Turquie en force En plus, d'une baisse notable de l'attractivité, le classement par pays connaît de grands chamboulements sous la poussée participationniste de certaines économies émergeantes. C'est le cas notamment de la Chine, 3e fournisseur de l'Algérie en 2011 avec 4,58 mds USD et 9,86% de part de marché, qui dispose du pavillon national, de loin le plus important (112 exposants), et qui conforte par la même occasion sa position de leadership acquise depuis 4 ans. Il est suivi des Turcs (105 entreprises) très actifs et fortement intéressés par le marché algérien, en témoigne leur dixième participation d'affilée. La France, pourtant 1er fournisseur de l'Algérie en 2011 avec 7,03 mds USD et 15,12% de part de marché, et longtemps classée première avant de céder sa position aux Chinois en 2009, arrive loin derrière (51 entreprises). Les autres partenaires commerciaux traditionnellement présents à la Foire internationale d'Alger ne font pas mieux, puisque l'Allemagne ne compte que 26 exposants, les états-Unis (15), l'Italie (12), alors que l'Espagne, 4e fournisseur de l'Algérie (3,32 mds et 7,15%), brille toujours par son absence qui dure depuis 4 années. Autres absences qui ne sont pas passées inaperçues, celles du Canada, de la Russie et du Japon, des pays très actifs par le passé. Une mention spéciale toutefois pour le Portugal qui, malgré la crise qui secoue l'Europe en ce moment, a réussi quand même à mobiliser une quinzaine d'entreprises, et le Sénégal toujours fidèle au rendez-vous d'Alger. Pour le reste de la participation, on trouve les habituels pays, à l'instar de la Pologne et de la Hongrie pour l'Europe, de l'Inde et du Vietnam pour l'Asie, de l'Argentine, du Brésil et de Cuba pour l'Amérique du Sud, de l'égypte (invité d'honneur), de la Jordanie et de la Syrie pour le monde arabe, sans oublier la participation symbolique de la Palestine. La région du Maghreb est représentée par la Tunisie et la Libye, la Mauritanie et le Maroc, pourtant présent en force l'année dernière, n'ont pas délégué d'entreprises. Au total, 28 pays prennent officiellement part à la 45e édition de la Foire internationale d'Alger, on trouve le même nombre en 2011, 40 en 2010, 37 en 2009, 34 en 2008 et enfin 41 lors de la 40e édition organisée en 2007. Là également, le recul est visible. Pourquoi la participation étrangère reflue La baisse tendancielle, remarquée ces dernières années, du nombre des exposants à la FIA s'explique, de l'avis même de nos partenaires, par plusieurs facteurs. Selon Gilles Dabezies, le directeur des actions et de la coopération internationale à la Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP), organisatrice du pavillon française, le reflux de la participation étrangère, comme c'est le cas des entreprises françaises, s'explique par la multiplication des salons spécialisés : “Avant il y avait essentiellement la Foire internationale d'Alger, maintenant il y a plein de salons spécialisés. Par conséquent, il y a plus d'entreprises françaises qui participent aujourd'hui au Salon international de l'agroalimentaire (Djazagro) ou au Salon international du bâtiment et des matériaux de construction (Batimatec), que d'entreprises françaises qui participent à la Foire internationale d'Alger. Celles qui choisissent la Foire internationale d'Alger sont soit nouvellement arrivantes et elles trouvent que la Foire internationale d'Alger constitue un bon moyen de découvrir l'Algérie, soit elles sont sur des produits grand public, et comme la Foire internationale d'Alger est une foire grand public, elles trouvent leur compte et leur public, ou alors ce sont des entreprises qui ont un nom à défendre et que personne ne comprendrait qu'elles ne soient pas présentes. Mais autrement, c'est vrai que de plus en plus d'entreprises choisissent d'aller plutôt aux salons spécialisés où elles ont affaire à des visiteurs professionnels.” Autre avis sur la question, celui du US-Algeria Business Council (le Conseil d'affaires algéro-américain), organisateur de la participation américaine à la FIA 2012. Son président Ismael Chikhoune, qui espérait convaincre plus d'entreprises américaines de venir à Alger, avance deux raisons essentielles à la modeste participation américaine (15 exposants) : “La première raison est relative à la crise économique mondiale qui fait que les entreprises font maintenant très attention à leurs dépenses. Vous savez, venir des états-Unis jusqu'en Algérie pour juste tenter le marché, ça reste quand même assez coûteux.” “Maintenant, il y a celles qui peuvent se le permettre mais qui ne sont pas là, celles-là c'est surtout en raison des lois d'investissement qui ne sont pas attractives”, regrette-t-il. Pour M. Chikhoune, il n'y a pas de problème à ce que l'Algérie applique la règle du 51/49 au secteur des hydrocarbures, c'est une règle que tout le monde accepte car elle est appliquée par tous les autres pays, par contre il trouve que cette règle n'a pas raison d'être en dehors du secteur des hydrocarbures, elle n'est pas justifiable. “L'Algérie n'a pas besoin d'IDE pour ramener de l'argent, elle a suffisamment d'argent pour elle-même et pour financer des projets porteurs, mais l'argent ne suffit pas, parce qu'il va falloir ramener de la technologie sur laquelle il y a une compétition féroce dans le monde. Une compagnie technologique qui a le choix entre aller à Singapour, Dublin, en Afrique du Sud ou en Algérie, elle va choisir forcément d'aller dans le pays qui offre plus de facilités à l'investissement, dans le pays où elle a moins de restrictions en termes de lois et de finances”, affirme M. Chikhoune, qui espère que les décideurs à Alger vont finir par lever ces contraintes qui ne sont pas dans l'intérêt du développement de l'Algérie. Lyes Redaoui