"La situation est pourrie. La contrefaçon, l'utilisation de faux poinçons, la prolifération d'ateliers clandestins, la corruption, l'informel, l'absence des services de garantie... C'est l'anarchie !" Face aux différents problèmes rencontrés par la corporation des bijoutiers, le nouveau président de la Fédération des bijoutiers de l'Ugcaa d'Oran, Dalaa Zine Abidine, expert judiciaire en métal or et pierres précieuses, et bijoutier de père en fils, a animé une conférence de presse pour rassurer les artisans et les consommateurs, en brossant un diagnostic exhaustif sur l'état des lieux depuis son installation, il y a 6 mois. Optimiste, il a dressé une série de propositions pour sortir de la crise actuelle : "D'abord la formation de jeunes artisans dans des centres de formation professionnelle et l'association avec l'Ecole des beaux-arts pour assurer la relève, car le créneau qui compte 4 corporations (artisan, vendeur, importateur et fabricant) est porteur et générateur d'impôts pour la collectivité. Puis la réduction de la fiscalité, puisque nous payons 12% du chiffre d'affaires qui est très élevé, vu le prix de la matière, plus les 17% de la TVA. Enfin, lutter contre l'informel", propose l'orateur avant d'ajouter : "Il faut aussi désigner une banque pour accompagner les bijoutiers pour investir ou renouveler leurs outils de travail, comme c'est le cas pour les agriculteurs avec la Badr." Il faut préciser que le prix de l'or connaît une baisse sensible en ce mois de juin : "En effet, de 6400 DA/g en janvier, l'or est passé à 5190 DA/g. Ce sont les prix officiels d'Agenor, le fournisseur en or 24 carats", fait savoir le président de la fédération. Cependant, un autre son de cloche chez le millier de bijoutiers recensés qui activent légalement à Oran. Certains présents à la conférence de presse l'ont fait savoir avec énergie et colère : "La situation est pourrie. La contrefaçon, l'utilisation de faux poinçons, la prolifération d'ateliers clandestins, la corruption, l'informel, l'absence des services de garantie... C'est l'anarchie ! Combien de bijoutiers poinçonnent-ils leurs bijoux et les certifient chez les services de la garantie de l'Etat aujourd'hui ?", s'interroge un ancien bijoutier qui a déjà mis la clé sous le paillasson. Selon plusieurs artisans, des réseaux maffieux se partagent le marché de l'or en toute impunité. "Plus de 500 tables de l'informel ont été recensées en 2012. Les services contrôlent les bijoutiers légaux mais jamais ceux de l'informel. C'est incompréhensible", confie le porte-parole de l'Ugcaa de la wilaya d'Oran, Abed Mouad. "Le consommateur est aussi responsable quand il se dirige vers l'informel au lieu d'une bijouterie légale en exigeant une facture", se défend un vendeur de bijoux. Au cours de notre discussion avec les professionnels, nous avons appris que l'or iranien, marocain, français et tunisien se vendent légalement à Oran. "Bien sûr ! Il y a des importateurs de bijoux d'Iran, du Maroc, de Syrie, du Moyen-Orient et d'Europe", affirme un syndicaliste avant d'ajouter : "Nos bijoux, c'est notre culture. Ils sont de très bonne qualité (18 carats) avec un design propre à nos traditions." Quant à la consommation nationale, plus de 2000 kg d'or, soit 60%, sont fournis par Agenor et 40% proviennent du cassé (or récupéré), soit 1300 kg. Il ne faut pas oublier que des boutiques de "bonnes occasions" revendent les bijoux achetés chez des particuliers avec souvent des prix abordables. Le bijou et son propriétaire sont identifiés et enregistrés pour la traçabilité de la marchandise en cas de vol ou de fraude. Dans un autre registre, les bijoutiers ne comprennent toujours pas pourquoi l'Etat offre des exonérations d'impôts pour les jeunes bijoutiers, mais ne l'accorde pas aux anciens qui en ont vraiment besoin. N B Nom Adresse email