Les producteurs de pomme de terre qui viennent d'entamer leurs récoltes sont pessimistes, non pas à cause du prix de vente de leurs produits, mais au vu de la faible superficie exploitée proportionnellement aux saisons écoulées. Cette faible quantité plantée s'explique, selon eux, par le fait que le gouvernement et les dispositifs tels que le Syrpalac n'ont pas assuré la sécurité des professionnels de cette filière. Une filière qui, ces dernières années, a connu des soubresauts et d'énormes difficultés financières, ce qui a amené à l'asphyxie des dizaines de producteurs de pomme de terre qui, en pleine faillite, ont préféré jeter l'éponge. Pour les plus téméraires d'entre eux, ils ont continué l'exploitation, sur une faible superficie, pour éviter des pertes sèches. De ce fait, ils dénoncent la politique du gouvernement les ayant mis sur la paille. Pour Boudehane Messaoud, exploitant agricole et président de l'Association des maraîchers de la wilaya de Bouira, la piteuse récolte qui s'annonce, entraînera systématiquement la cherté de la pomme de terre : "D'ici à fin août, début septembre, il est fort probable que la pomme de terre atteigne des sommets jamais égalés, notre production sera consommée vers la fin du mois de Ramadhan au maximum et les prix du tubercule atteindront allégrement les 100 DA étant donné la faible production." Sur son exploitation agricole d'El-Esnam, une quarantaine d'ouvriers saisonniers s'attellent à arracher les tubercules, quelques camions attendent patiemment sur la RN5 leur tour pour charger leur cargaison. Une cargaison qui servira à alimenter les marchés de gros du centre du pays alors que la production de l'arrière-saison est toujours stockée au niveau de chambres froides disséminées aux quatre coins du pays : "Il faut savoir que pour la saison écoulée, notre récolte de pomme de terre est toujours emmagasinée dans des hangars ou pour les plus chanceux, dans des chambres froides à Berkouka et dans d'autres wilayas du pays. Cette année, pour éviter une surproduction que le gouvernement, via les dispositifs Syrpalac, SGP Proda, MacSoum, ne prendra pas en charge, nous avons été contraints de minimiser les dégâts étant donné que la plupart des patatiers sont asphyxiés par des dettes accumulées au cours des trois dernières années." Selon notre interlocuteur, pour cette saison, il a dû réduire sa superficie d'exploitation de près de 30 à 50 hectares, comme l'ont fait bon nombre de producteurs de pomme de terre : "Cette saison, la wilaya de Bouira qui a connu par le passé une mévente de sa production de pomme de terre, sera à peine capable de couvrir les besoins des wilayas du Centre. Habituellement, la superficie destinée à l'exploitation des pommes de terre variait entre 3 400 et 3 600 hectares, cette saison entre 1 800 et 2 000 hectares sont exploités." Pour M. Boudehane, l'exploitation d'un hectare de pommes de terre coûte très cher et avec les dettes des années précédentes, impossible de continuer à exploiter de grandes surfaces : "Pour l'exploitation d'un hectare, nous déboursons 730 000 DA entre les frais de location, l'achat des semences, la manutention et le gasoil. Rien que pour le mazout et l'huile du moteur avec lequel nous pompons l'eau pour l'irrigation, les dépenses sont de l'ordre de 120 millions de centimes." Les ouvriers saisonniers, eux, sont rémunérés au filet entre 80 et 100 DA ou au cageot entre 60 et 70 DA. Autant de frais auxquels ne peuvent plus subvenir les producteurs de pomme de terre se disant à l'agonie à cause d'une politique agricole cahoteuse et sans aucun avenir. H. B. Nom Adresse email
