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Touggourt : ce qui s'est passé
Des habitants racontent les événements sanglants qui ont secoué la région
Publié dans Liberté le 13 - 12 - 2014

Les citoyens voulaient rencontrer le wali à l'occasion du passage de son cortège officiel qui devait accompagner le ministre des Ressources en eau dont la visite était programmée pour le dimanche 30 novembre dernier. Tout est parti de là, racontent-ils.
"Mon fils a été poursuivi jusque devant l'entrée de l'immeuble ; il était à quelques mètres de la cage d'escalier quand les policiers lui ont tiré dessus, à bout portant. La suite s'est passée dans la confusion totale... Je n'arrive toujours pas à réaliser comment cette scène, digne de films policiers, s'est produite devant chez moi et avec, pour victime, mon propre fils." Une semaine après les événements sanglants du vendredi 28 novembre dans la commune de Nezla, à Touggourt (à 160 km d'Ouargla), Djemouï Malki, le père du jeune Nordine, 20 ans, l'une des trois victimes des balles tirées par les policiers, a du mal à se relever du cauchemar qu'il a vécu dans sa ville jusqu'alors connue, comme le reste des villes du Grand Sud algérien, pour être des plus paisibles.
M. Malki, petit ouvrier journalier, est d'autant plus outré que son fils était totalement étranger à ce qui s'est passé ce jour-là. Le seul tort de ce dernier, raconte-t-il abattu, c'est d'avoir bravé le risque de regagner le domicile familial, après une partie de foot disputée avec des copains au stade communal, au moment où les échauffourées ont commencé entre les policiers et des manifestants pacifistes. Ayant bénéficié d'un acte de concession, le défunt Nordine n'attendait plus que la finalisation des démarches entamées pour le lancement de son projet d'agriculture. Mais c'était compter sans les balles assassines des policiers.... Aux domiciles familiaux des autres victimes, (Meftah Toumi, 24 ans, et Mohamed Bensaâdi, 30 ans, nouveau marié), du même quartier appelé Draâ El-Baroud dans la commune de Nizla, la consternation est à son comble. Leurs pères, Ahmed Bensaâdi, 74 ans, et Larbi Toumi, tous les deux journaliers sans revenu stable, sont toujours terrassés par la douleur incommensurable qui les frappe.

Des balles dans le dos
Désormais, ils n'exigent qu'une seule chose : "Que justice soit faite et que les auteurs de ces actes criminels soient fermement condamnés." La douleur de ces pères directement touchés, est particulièrement partagée par l'ensemble des citoyens du quartier Draâ El-Baroud, comptant 35 000 habitants, soit un tiers de la population de la daïra de Touggourt, estimée à 52 000 habitants. Le quartier est représenté essentiellement (plus de 70%) par les Ouled Naïl, aârch important de la ville de Touggourt, cohabitant depuis des lustres avec les aârchs Ouled Saïd et Ouled Sayeh ou encore celui des Lahchachna. (Voir galerie photos du dossier )
Outre les trois morts, les blessés se comptent par dizaines dont certains portent encore des balles réelles dans leurs corps. C'est le cas, notamment, d'une jeune femme travaillant au tribunal d'Ouargla, qui, de passage le jour des émeutes à Touggourt, a reçu une balle ; et d'un jeune du quartier de Draâ El-Bour, Malki Amer, 17 ans. La jeune femme a été transférée à hôpital de Batna et le jeune à l'hôpital d'Oued Souf. Ce dernier a succombé à ses blessures mardi dernier, (Lire encadré). Mohamed Derradji, 27 ans, lui, a encore une balle dans le dos. On lui a prescrit un traitement avant son extraction. Le certificat médical dont nous détenons une copie, témoigne qu'il a été atteint d'une balle à quelque "2 km du commissariat".
Messaoud Mehaha, 19 ans, est, quant à lui, atteint par une balle réelle plus bas que le thorax, et une autre en caoutchouc à la jambe gauche. Il l'a échappé belle. Il venait de quitter l'hôpital Slimane-Amirat de Touggourt, après les premiers soins. Alité au domicile familial, le jeune Messaoud, en présence de son père, Tahar Mehaha, et de ses frères, raconte que son passage à l'hôpital a coïncidé avec la visite du ministre de l'Intérieur, Tayeb Belaïz, avant laquelle, se rappelle-t-il, la prise en charge médicale était à la limite de la négligence. Néanmoins, les habitants de Draâ El-Baroud regrettent le fait que, hormis cette visite éclair de M. Belaïz, aucun officiel ne s'est rendu à Touggourt, ne serait-ce que pour présenter ses condoléances aux familles des victimes.
En vue d'apporter des preuves tangibles le jour du procès, des citoyens gardent jalousement quelques pièces justificatives dont des vidéos filmées ainsi que des balles ramassées le jour des affrontements. En attendant, et pour exprimer leur solidarité avec les familles endeuillées, mais aussi pour maintenir la pression sur les autorités jusqu'à satisfaction de leurs revendications sociales, à l'origine de la manifestation, les habitants de Draâ El-Baroud ont dressé, depuis lundi 1er décembre, une immense tente au milieu de la placette du quartier. Recouverte de banderoles revendicatives et de drapeaux, elle est surveillée de près par des vigiles désignés par le comité du quartier.
Elle fait office, en quelque sorte, de QG des manifestants de Draâ El-Baroud. Représentant un véritable symbole de dignité pour les Naïli, la tente est réservée aux notables - ceux reconnus par la majorité des habitants, mais jamais ceux hissés à ce rang par les autorités - lesquels accueillent les nombreux hôtes, entre représentants d'associations et des médias nationaux. Mais aussi des gens qui viennent présenter leurs condoléances aux familles endeuillées. Aux abords de la tente, tout comme dans le reste des quartiers de la ville de Touggourt, la présence des forces de sécurité ne se fait guère sentir depuis les événements sanglants de ce maudit vendredi 28 novembre.

Le wali au banc des accusés
Les membres du comité du quartier accusent, en premier lieu, le wali d'Ouargla, Ali Bouguerra, lequel, selon eux, aurait "personnellement donné l'ordre" aux forces de sécurité d'utiliser "les méthodes extrêmes" aux fins de "mater" les manifestants "pacifistes".
Contrairement à ce qu'il a déclaré, lors de sa conférence de presse tenue le lendemain des événements, nous avons eu l'information que c'était lui, "en personne", qui avait ordonné à la police d'utiliser "tous les moyens pour disperser la foule", insiste, convaincu, un membre du comité du quartier qui, par peur de représailles, a requis l'anonymat. Cette thèse, estime-t-il, est d'autant plus plausible que le chef de daïra de Touggourt est en congé de maladie depuis plus de deux mois et préparerait même son départ définitif de son poste. L'accusation est aussi portée contre le maire et les membres de l'APC, lesquels, selon des citoyens, seraient à l'origine de la situation de pourrissement à Nezla depuis quelques années déjà, "en raison de leur mauvaise gestion de notre commune". "Tous les problèmes que nous vivons aujourd'hui sont le résultat de la mauvaise gestion de notre commune", dénoncent, à l'unanimité, les habitants de Draâ El-Baroud, non sans accuser certains responsables de "corrompus".
Selon le témoignage des habitants de Draâ El-Baroud, toujours sous le choc, tout a commencé lorsque les mécontents ont décidé, le lundi 24 novembre, de dresser une tente au bord de la RN03 pour faire part, "pacifiquement", de leurs revendications sociales. L'objectif des manifestants était de rencontrer le wali à l'occasion du passage de son cortège officiel qui devait accompagner le ministre des Ressources en eau dont la visite était programmée pour le dimanche 30 novembre dernier. "Notre but était d'interpeller le wali et lui exposer nos doléances devant ce membre du gouvernement, et lui rappeler ses promesses non tenues concernant, entre autres, la question des logements sociaux et des lots de terrains qu'attendent les citoyens depuis des années. Nous avons même prévu une petite collation pour accueillir dans le respect et le wali et le ministre des Ressources en eau. Mais le wali ne l'entendait pas de cette oreille. Il voulait, coûte que coûte, nous éviter sur son passage. Il sait pertinemment qu'il n'a pas tenu ses promesses", raconte Lakhdar Guesmi, représentant des jeunes de Draâ El-Baroud.
"Dans sa tentative de désarçonner la situation, il nous a envoyé des émissaires pour nous convier à une réunion pour le samedi 29 novembre, soit la veille de sa visite annoncée. Initiative à laquelle nous n'étions pas opposés, bien au contraire. Mais, dans la nuit de vendredi à samedi, des policiers se sont présentés brusquement et nous ont déchiré avec des couteaux la tente avant de la prendre carrément avec eux. Dans le même temps, ils ont procédé à l'arrestation d'une vingtaine de jeunes", ajoute-t-il, précisant que "el-beït" (la tente), étant le symbole de la dignité pour les Naïli.
Voilà qui, selon lui, avait attisé davantage la colère des habitants lesquels ont attendu le petit matin pour aller se rassembler devant le commissariat de la ville pour revendiquer "pacifiquement" la libération des jeunes arrêtés. Il dément, au passage, les "contrevérités" des officiels qui voulaient faire croire que les manifestants auraient usé de violence devant le commissariat.
F. A.


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