L'affaire de l'assassinat de Khashoggi n'a pas encore livré tous ses secrets et l'Arabie Saoudite continue de dissimuler la vérité sur un crime d'Etat, commandité vraisemblablement par le prince héritier, Mohammed Ben Salmane. Le corps du journaliste saoudien Jamal Khashoggi a été dissous dans l'acide, puis jeté dans les canalisations de la résidence du consul saoudien à Istanbul, a révélé, hier, le quotidien turc Sabah Daily, citant une source proche de l'enquête sous le couvert de l'anonymat, alors que le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a affirmé, hier, avoir fait écouter des enregistrements liés à ce crime à Riyad et à ses alliés occidentaux. Ainsi, et selon le quotidien proche du pouvoir, les examens des prélèvements effectués dans les canalisations du consul ont permis de trouver des traces d'acide. Les enquêteurs estiment que le corps de la victime a été dissous dans de l'acide et qu'une fois une consistance assez liquide obtenue, les auteurs du crime l'ont déversée dans les canalisations, poursuit Sabah. Sur Twitter, la fiancée de Khashoggi, Hatice Cengiz, se dit "incapable d'exprimer (son) chagrin d'apprendre que (le corps de Khashoggi) a été dissous. Ils t'ont tué et ont découpé ton corps, nous privant, moi et ta famille, de conduire une prière mortuaire et de t'enterrer à Médine comme souhaité", a-t-elle ajouté, dans un message publié, jeudi, en arabe, en turc et en anglais. Après avoir tenté de gagner du temps, en empêchant les enquêteurs turcs de fouiller dans le siège du consulat et la résidence du consul, Riyad devrait répondre de ces nouveaux éléments d'information qui l'enfonce et enfonce le prince héritier Mohammed Ben Salmane que ses alliés tentent vainement de disculper depuis l'éclatement de cette affaire début octobre dernier. Un haut responsable turc a affirmé, lundi dernier, sous le couvert de l'anonymat, que des "nettoyeurs" saoudiens, dont un chimiste et un expert en toxicologie, ont été envoyés à Istanbul pour effacer les preuves du meurtre du journaliste. Mais cela ne semble pas avoir donné des résultats. Pour rappel, un conseiller du président Erdogan, Yasin Aktay, avait affirmé que "la raison pour laquelle ils ont découpé le corps était pour le dissoudre plus facilement". Au moment où l'Arabie Saoudite livrait plusieurs versions sur cet assassinat, la presse turque avait fourni des détails chocs sur la liquidation physique de Jamal Khashoggi, en s'appuyant sur des supports audio récupérés chez des responsables d'Ankara. Hier, le président Erdogan a d'ailleurs affirmé avoir fait écouter ces enregistrements aux Américains, mais aussi aux responsables saoudiens, français, allemand et britanniques. "Nous avons donné les enregistrements, nous les avons donnés à l'Arabie Saoudite, nous les avons donnés à Washington, aux Allemands, aux Français, aux Anglais", a déclaré le chef de l'Etat lors d'une conférence de presse télévisée. La présidence a ensuite précisé que les enregistrements ont été écoutés, mais qu'aucun document écrit n'a été partagé. "Ils ont écouté les conversations qui ont eu lieu ici, ils savent", a-t-il poursuivi. Jamal Khashoggi a été tué le 2 octobre au consulat saoudien d'Istanbul, où il s'était rendu pour des démarches administratives, par un commando saoudien.