Abderrezak Makri, le chef du Mouvement de la société pour la paix (MSP), ne sait plus sur quel pied danser. Le rejet de son initiative appelant à un consensus national par toute la classe politique semble mettre l'ex-Hamas dans une posture des plus intenables. À cette situation s'est greffé, manifestement, le flou qui entoure le prochain scrutin présidentiel et qui met le MSP, politiquement, dans l'incertitude, voire sans vision. Le parti du défunt Mahfoud Nahnah multiplie depuis quelque temps, par la voix de son président, des propositions à l'approche de l'élection présidentielle prévue en avril 2019. Sauf que les offres du MSP ne trouvent non seulement pas preneur, mais aussi elles ne sont basées sur aucun référent politique ou réglementaire soit-il, qui pourrait, le cas échéant, leur donner une assise et les légitimer. Depuis quelques jours, Makri est revenu à la charge pour proposer le prolongement du mandat présidentiel actuel pour en faire une période de transition. Cela dit, Makri plaide pour le report de la présidentielle. Cette prorogation, pense-t-il, ouvrira certainement la voie au consensus national qu'il défend depuis l'été passé. Face à ce report de la présidentielle, avec, en sus, la prolongation du règne d'Abdelaziz Bouteflika, même dénué de légitimité constitutionnelle, Makri n'y trouve pas d'inconvénient. Il souligne que la classe politique et les institutions vont se soumettre à la légitimité des faits et à celle qu'imposerait le terrain. Autrement dit, comme le dirait, par ailleurs, Ahmed Ouyahia, c'est de se soumettre à la légitimité du fait accompli, pour justifier la destitution de Saïd Bouhadja, président de l'APN. Il faut rappeler que dès le lancement de l'idée du consensus national par le MSP, aucune formation politique n'a émis le vœu de s'y inscrire. Même les partis de l'opposition ont rejeté sèchement la proposition de l'ex-Hamas, notamment le FFS qui avait lancé le projet du consensus bien avant celui du MSP. Idem pour ses ex-alliés de la CNLTD et de l'Icso, qui n'ont vu dans la proposition du MSP qu'une reformulation de leurs propositions communes. Du côté des partis du pouvoir, le rejet fut clair et direct. Makri ne semble pas retenir la leçon de "l'échec" de la CNLTD, dont les appels à une transition démocratique se sont heurtés à l'indifférence du pouvoir qui répondait par l'inexistence d'une quelconque crise, institutionnelle ou politique, dans le pays, qui imposerait une période transitoire. Et parmi ses arguments, le respect du calendrier électoral. Il revient donc à s'interroger sur les visées du chef du MSP en réitérant des propositions sur lesquelles la classe politique, y compris les partis du pouvoir, a déjà réagi. Makri cherche-t-il à se donner une place dans le puzzle que met le pouvoir sur pied pour garantir sa propre survie ? La prolongation du bail pour Abdelaziz Bouteflika ou la réélection pour un 5e mandat ne sont, en définitive, que les deux faces de la même médaille. Makri semble s'y intéresser. Mohamed Mouloudj