Des milliers de citoyens, plus de 300 000, selon certaines estimations, sont sortis, hier, dans les rues de Bouira pour revendiquer le départ du système dans sa globalité.Pour le VIe acte de la révolte du peuple contre le régime en place, la proposition du vice-ministre de la Défense et chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, d'appliquer l'article 102 de la Constitution, était au cœur des slogans scandés par les manifestants : "Le 102 n'est plus en service, veuillez contacter le 7", "Le 102 est périmé depuis 6 ans, appliquez l'article 7", "102+7 = sang neuf", ou encore le très ingénieux, "Nous voulons l'application de l'article sans eux". En somme, un rejet massif de la suggestion du chef d'état-major. Certains manifestants ont indiqué que l'armée et son chef se sont "trompés de cible" dans la mesure où l'éviction de Bouteflika seulement assurerait, selon eux, la pérennité du système. "Je ne doute pas de la bonne foi de Gaïd Salah de veiller à faire respecter la volonté du peuple, néanmoins, il faudrait qu'il sache que le peuple exige le départ de tous les symboles de ce système corrompu et non pas uniquement Bouteflika", dira Ahmed Bouchrit, un retraité de l'ANP. Pour d'autres, à l'image de Meziane Chaâbane, élu RCD à Bouira, cette démonstration populaire est la preuve ultime que le système en place est "en phase terminale". "L'autisme du pouvoir est déconcertant, et si le peuple a jusqu'à présent gardé son calme, l'entêtement et le mépris du système à se régénérer coûte que coûte n'augurent rien de bon", a-t-il estimé. Même si les marches d'hier avaient pris une tournure plus politique, il n'en demeure pas moins que le côté festif et bon enfant était omniprésent. Preuve en est, Kamel et Hanane, un jeune couple drapé dans l'emblème national, lançait tout sourire "Nous vivons l'amour au temps de la révolution (…) Que demander de plus ?" "Les scènes que je vis depuis le 22 février me font rappeler la liesse de l'indépendance et j'espère bien que le pays va recouvrer son indépendance à condition qu'ils partent tous", dira Dda Mouloud, un ancien moudjahid de la région de Bechloul. Ainsi, et tout comme les marches du 22 février au 22 mars, c'est vers 13h30 que des milliers de jeunes, venus des quatre coins de la wilaya, se sont donné rendez-vous à leurs points de ralliement, le quartier de l'Ecotec et la place des Martyrs, avant d'entamer leur procession dans les rues de la ville. Enfin, il y a lieu de noter que certains fidèles de la mosquée du quartier de l'Ecotec ont boycotté la prière du vendredi à cause des prêches "pro-pouvoir" de l'imam. Ils ont d'ailleurs demandé son départ.