Si le chef d'accusation d'atteinte à l'unité nationale pour avoir porté un emblème autre que celui national a été évacué, un des accusés a été condamné à la prison ferme pour profanation du drapeau national. Disculpé des charges relatives au port de l'emblème berbère, Semani Amazigh restera cependant en prison puisqu'il est reconnu coupable de profanation du drapeau national en vertu du deuxième chef d'inculpation qui pesait sur lui. Le tribunal de Constantine a donc rendu hier son verdict dans l'affaire de Semani Amazigh et Tanfiche Ameziane, arrêtés par des policiers le 18 septembre dernier alors qu'ils prenaient des photos au centre-ville de Constantine drapés dans l'emblème berbère. Les deux amis, venus de Béjaïa dans la Ville des Ponts il y a trois semaines, ont été inculpés par le magistrat instructeur près le tribunal de Constantine d'"atteinte à l'intégrité du territoire national pour avoir porté un emblème autre que le drapeau national" pour les deux accusés et de "mutilation et profanation du drapeau national" concernant seulement Semani Amazigh. C'est d'ailleurs ce dernier chef d'inculpation qui sera retenu contre lui par le tribunal, qui s'est basé sur l'esprit de l'article 160 du code pénal pour le condamner à une année de prison ferme en dépit de son acquittement au même titre que Tanfiche Ameziane du deuxième "délit". Le prononcé du jugement va plus loin puisqu'il mentionne la restitution de l'emblème en question comme souhaité par le collectif d'avocats qui ont plaidé la cause des deux accusés lors de leur procès, la semaine dernière. Un procès où le ministère public avait requis des peines d'emprisonnement de trois et cinq ans de prison respectivement à l'encontre de Tanfiche Ameziane et de Semani Amazigh. Lors de leurs interventions, les avocats de la défense, après des plaidoiries magistrales, ont abordé directement le contexte politique en rappelant que le port de l'emblème berbère n'était devenu "un acte délictueux" qu'après le discours du chef d'état-major de l'armée le 18 juin dernier. "Paradoxalement, aucun texte de loi ne fait référence à ce ‘délit' devenu un motif d'arrestation et d'emprisonnement de dizaines de citoyens", avaient-ils souligné. Sur le plan du respect du code des procédures pénales, les avocats ont également relevé que la fouille du contenu du téléphone de Semani Amazigh opérée par la police judiciaire s'était fait sans mandatement préalable du procureur de la République et, de ce fait, constitue une violation de la procédure et de la vie privée des personnes. Et c'est justement sur la base d'une photo extraite du contenu de ce téléphone que Semani Amazigh a été condamné à une année de prison ferme. Un verdict qui fera indéniablement l'objet d'un appel de ses avocats. Kamel Ghimouze