L'exposition, qui se poursuit jusqu'au 18 février, réunit les trois artistes Mohamed Chafa Ouzzani, Mourad Abdellaoui et Djamel Talbi autour du "Rêve". Pour l'inauguration du cycle d'expositions d'art au titre de l'an XX, la fondation culturelle Asselah-Ahmed et Rabah a opté pour l'univers fascinant du "rêve", où s'allie l'œil de "trois regards" pour l'interprétation du songe qui se stylise dans le trait mystérieux de l'abstrait. Sachant que l'"instant de vie" qu'est le rêve se nourrit du "conte nocturne" et a aussi pour rôle d'excréter le nuage de la dissension qu'il y a en nous, il est donc requis de baliser son itinéraire du spectre de l'inconnu et de l'angoisse qu'accumule l'âme durant "l'aube incrédule". D'où l'exigence de s'exercer à la compréhension du langage du rêve afin de se guider dans "l'escalade" de l'univers irréel de la songerie. Alors quoi de mieux que d'asseoir une farandole autour de laquelle brasille le songe creux de la terre et sur laquelle s'arcboute également l'armature de nos repères que nos aïeux ont forgé au feu du glaive de la liberté. D'où l'ossature qu'a façonnée l'artiste peintre Mohamed Chafa Ouzzani à l'aide de son "T" d'architecte pour fédérer ses confrères Mourad Abdellaoui et Djamel Talbi autour du "rêve", qu'il est possible d'extraire de l'abstrait tout en faisant abstraction de leurs divergences. À ce titre et selon Langage et Signification de la peinture en figuration et en abstraction du critique d'art belge Léon Degand, alias de Frédéric-Léon Noël (1907-1958), "l'art abstrait est l'élocution d'écriture qui s'évertue à contredire l'évident et d'en révéler les déchirures au lieu d'identifier à l'identique les apparences visibles du monde extérieur". À ce propos, l'auteur néerlandais d'Autoportrait au chapeau de feutre (1887), en l'occurrence Vincent Willem van Gogh (1853-1890), ne disait-il pas : "Je rêve ma peinture et je peins mon rêve" ? Alors, et pour s'unir autour de l'art qu'il a en partage, ce trio d'artistes est aussi riche de l'œil intuitif d'où chacun d'eux crée une vision éloignée l'une de l'autre, mais qui se rejoignent dans l'envie de créer le beau dans l'intérieur de "maisons indolentes", a-t-on su de l'auteur des Couleurs en prose… Subséquemment au compagnonnage dans l'art, le trio s'entend dans l'idéale harmonie de la Saison bleue qu'a esquissée Mohamed Chafa Ouzzani pour la circonstance. Toutefois, le tour de l'exposition révèle également ces illusions qui se désenchaînent peu à peu de nos convictions et qui s'anéantissent tels l'impérieux goût de la liberté et la fugue vers le large de la grande bleue qu'il est aisé d'humer dans Le Monde bleu et gris de Mourad Abdellaoui. Notamment "la plaie" de la précarité et "l'illusion" d'un mieux-être que la corporation d'artistes plasticiens n'a pas. De ce fait, il s'exhale de l'œuvre de Mourad Abdellaoui l'égalité avec ses confrères, car chaque portion de couleur représente une tribune de revendications. "L'art n'est rien s'il n'est pas remorqué par la locomotive de la volonté politique qui permettra à l'artiste de vivre enfin de son art", a déclaré Mourad Abdellaoui. S'agissant de Djamel Talbi, cet élève de l'Ecole régionale des beaux-arts de Mostaganem éveille en ses toiles d'immémoriales fragrances qu'il exhume du terroir et qu'il cueille de son enfance qu'il a vécue à Sidi Idir (Bordj Bou-Arréridj), si proche du Djurdjura. Autant d'érudites dissertations picturales qui révèlent notre histoire et qu'il vous est loisible de visiter jusqu'au 18 février prochain à la galerie d'art Ahmed et Rabah-Asselah.