Des ressources budgétaires étroitement tributaires d'une fiscalité pétrolière aléatoire, un appareil productif chétif et non compétitif, telle est l'impasse dans laquelle se trouve le pays. Tournant majeur dans l'histoire de l'Algérie indépendante, la nationalisation des hydrocarbures en 1971 devait à la fois répondre au besoin de recouvrer la dépendance du pays sur ses richesses naturelles, mais aussi d'ouvrir la voie à l'édification d'une économie prospère, diversifiée et moins tributaire de l'étranger. Près d'un demi-siècle après, le bilan et les perspectives économiques à adosser à cette longue séquence historique ne renvoient qu'aux ratages de développement, à la gabegie et à la corruption, mais aussi et surtout, au spectre d'un scénario à la vénézuélienne, où faute de dépendance à la rente du pétrole et du gaz, le pays risque de se voir à nouveau otage de créanciers extérieurs et d'institutions financières internationales. Le retour à l'endettement externe dès cette année, après plus d'une décennie de pétrole cher, est, en effet, déjà acté à travers la loi de finances en vigueur, alors que le pays demeure plus que jamais mono-exportateur et continue à vouer le peu d'épargne en devises dont il dispose encore à la couverture de ses immenses besoins à l'importation. Au bout d'à peine cinq années de mauvaise conjoncture pétrolière, le matelas de devises accumulé par l'Algérie durant plus d'une décennie, gage de sa solvabilité extérieure et de son pouvoir d'achat à l'international, s'est amoindri de plus de 130 milliards de dollars sans avoir induit le moindre progrès perceptible en termes de diversification économique et de réel bien-être social. De 62 milliards de dollars actuellement, contre 194 milliards en 2014, l'encours des réserves de changes officielles de l'Algérie devra continuer à fondre pour ne représenter, d'ici à 2022, que l'équivalent de quelques mois d'importation, ce qui ouvrira dès lors la voie aux scenarii de cessation de paiement et d'ajustement structurel semblables à ceux des années 1990. Le risque d'un tel retour aux conditionnalités et aux cures sévères d'institutions internationales comme le FMI est aujourd'hui d'autant plus réel que l'Algérie continue à importer l'essentiel de ses besoins de l'étranger pour une facture globale, difficilement compressible, de plus de 40 milliards de dollars en moyenne annuelle. Et alors qu'elle tire près de 95% de ses revenus de ses seules exportations de pétrole et de gaz, l'instabilité durable des cours pétroliers mondiaux, conjuguée à un endettement interne rendu effrayant par le financement non conventionnel, risque de provoquer, encore plus vite que prévu, une "crise de trésorerie" similaire à celle de 2017, où l'Etat se disait même incapable d'assurer les salaires de ses fonctionnaires, décidant dès lors d'actionner "la planche à billets". Des ressources budgétaires étroitement tributaires d'une fiscalité pétrolière aléatoire, un appareil productif chétif et non compétitif, dont les besoins d'équipement et d'intrants dépendent de l'importation, elle-même dépendante de la rente du pétrole ; telle est en définitive l'impasse dans laquelle se trouvent sempiternellement le pays et son économie, malgré plusieurs années d'aisance financière passée et après près d'un demi-siècle de souveraineté recouvrée et exercée pleinement sur les richesses de son sol et de son sous-sol. Telle est, également, l'infortune fatale d'une dépendance entretenue à la rente des hydrocrabures et, surtout, la conséquence funeste de plusieurs décennies de mauvaise gouvernance politique.