Sa condamnation à 10 ans de prison ferme en première instance a choqué l'opinion publique. La cour de justice de Khenchela rendra aujourd'hui son verdict dans l'affaire de l'activiste du Hirak et militant de la cause amazighe, Yacine Mebarki. Mis en délibéré le 11 novembre passé, le procès en appel de Yacine Mebarki est intervenu dans un contexte particulier, marqué par une vague d'indignation exprimée par les défenseurs des libertés et des droits de l'homme, des universitaires et autres activistes du mouvement populaire du 22 Février dont il se revendique, particulièrement après la lourde sentence prononcée à son encontre par le tribunal de première instance. En effet, le hirakiste de Khenchela avait été condamné le 8 octobre dernier à une peine de dix années d'emprisonnement assortie d'une amende de 10 millions de dinars. Il était poursuivi pour les chefs d'inculpation d'"atteinte à l'unité nationale, d'offense à la religion musulmane, de profanation du Livre Saint (Coran) et d'incitation à l'athéisme et détention de munitions d'armes à feu". Autant d'accusations "qui ne se fondent sur aucun moyen juridique à même d'incriminer Yacine Mebarki", a soutenu, hier, son avocat Me Chekhab Ramzi, seul à avoir plaidé la cause de l'accusé après le refus opposé par le président d'audience, le 11 novembre dernier, à la demande de report pour permettre au Collectif d'avocats issus notamment d'Alger et de Tizi Ouzou, nouvellement constitué, n'ayant pas pu rejoindre la ville de Khenchela ce jour-là pour consulter le dossier. Me Chekhab qui a battu en brèche les accusations, lourdes de conséquences, de "profanation du Livre Sacré", cité dans l'article 160 du code pénal et d'"incitation à l'athéisme" porté par la loi n°20-05 du 28 avril 2020 relative à la prévention et à la lutte contre la discrimination et le discours de haine, se veut optimiste quant au verdict attendu aujourd'hui eu égard à "l'attention accordée par le juge de la cour d'appel au dossier et aux faits reprochés à Yacine Mebarki". Une affaire qui continue de susciter les plus vives réactions des citoyens et des proches de l'accusé qui clament son innocence et réclament sa libération. Dans une vidéo poignante, conçue par Radio M et largement partagée sur les réseaux sociaux, les témoignages émouvants des amis, voisins et membres de la famille de Yacine Mebarki, notamment ses trois enfants, Abdelhamid, Hamza et Jana, ont suscité davantage de solidarité avec l'accusé. Solidarité qui s'est manifestée également hier à travers une pétition lancée par des amis, universitaires et activistes politiques, estimant que "le respect de la diversité dans une société plurielle est le principal garant d'une paix civile durable". Les signataires dénoncent également ce qu'ils qualifient de "parodie de justice", exigeant "la libération immédiate et sans condition de Yacine Mebarki" et appelant les autorités "au respect des libertés fondamentales, notamment la liberté d'expression, d'opinion et de conscience". En réaction à la condamnation, l'écrivain Anouar Benmalek avait rendu publique, il y a quelquse jours, une contribution intitulée "La liberté de conscience est un droit, pas une faveur !", publiée par notre journal et dans laquelle, il relève le décalage entre l'esprit de la Constitution et l'attitude des magistrats. "On croit nager en plein cauchemar dans un pays dont la Constitution reconnaît explicitement le droit à la liberté de conviction religieuse, un procureur a pu requérir huit ans de prison pour le crime de penser et de croire librement, et un juge, estimant que cela ne suffisait pas, a ajouté deux ans et dix millions de dinars d'amende pour faire bonne mesure ! Dix ans !" avait écrit l'auteur de Chroniques de l'Algérie amère."