Des universitaires de Constantine, ayant pris part à la marche d'hier, ont plaidé pour l'organisation et non la structuration du Hirak afin de donner à celui-ci "un élan politique réel". Les marches citoyennes du vendredi reprennent de plus belle. Quatre jours après la célébration du 2e anniversaire du Hirak, des milliers de Constantinois ont réinvesti, hier, la rue. Fidèles à leur tradition, les hirakistes ont sillonné les artères de la ville, munis de leurs drapeaux, pancartes et banderoles en entonnant les slogans phare du Hirak et en improvisant par moment des mots d'ordre plus adaptés à la situation politique du pays et où le légendaire "dawla madania machi âskaria" revenait en boucle. Depuis 13 heures, les rangs des marcheurs n'ont pas cessé de grossir pour une procession qui s'est poursuivie jusqu'à 16h30 à travers les allées de la place des Martyrs (Bab El-Oued), le boulevard Belouizdad (ex-Saint-Jean) et la rue Abane-Ramdane (ex-rue Rolles), en passant par la place du colonel Amirouche (la Pyramide) et des haltes marquées çà et là par des groupes de jeunes qui criaient à tue-tête leur désarroi et leur soif de liberté. Ce qui a fait dire à une vieille dame qui prenait part à la marche : "J'ai les larmes aux yeux quand je vois tous ces jeunes, toute cette énergie que l'on ignore alors qu'on aurait tout à gagner si on leur donnait leur chance." Sur cette reprise du Hirak à Constantine, l'universitaire Abderazak Adel, rencontré dans la marche, livre son analyse : " Le hirak resurgit dans les mêmes conditions qui l'ont vu naître. Beaucoup d'émotion et de fraternité qui démontrent que la détermination des marcheurs, quels que soient leur âge et leur profil politique, est intacte. La volonté d'en finir avec le système est on ne peut plus claire." Et à l'universitaire d'insister : "On sent que malgré une parenthèse de quasiment une année, le Hirak reste une force de frappe politique très importante et il est clair que quand les citoyens font leur marche du vendredi, c'est la société qui prend l'initiative." Pour lui, il est important que le Hirak s'installe et reprenne une dynamique de rapport de force où la conscience critique des citoyens et la volonté de se battre prennent le dessus et persévèrent dans la durée. "Il est évident qu'il n'y a pas un grand intérêt de faire un Hirak 2 qui ressemble trop au Hirak 1. (...). Il y a donc, un besoin d'organisation de plus en plus exprimé par les hirakistes", propose l'universitaire. Pour lui, l'organisation ne signifie pas la structuration du Hirak tout en plaidant pour la mise en place de comités d'activistes dans les quartiers, dans les entreprises, dans les espaces urbains et dans les universités. De son côté, l'avocat et universitaire Amor Alla, a estimé que "la reprise du Hirak était autant attendue que souhaitée après la parenthèse due à l'épidémie. Une pause qui, du moins, aura servi à faire mûrir davantage les convictions des hirakistes d'autant plus que rien n'a changé durant cette période de relâche si ce n'est de servir l'agenda du régime, dont le scrutin référendaire que l'on peut qualifier de scandaleux eu égard à la désaffection populaire qui l'a sanctionné". Amor Alla considère, lui aussi, que le temps est venu pour le Hirak de s'organiser, non pas dans des structures classiques mais en lui donnant "un élan politique réel".