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On achève bien les élites
Publié dans La Nouvelle République le 03 - 11 - 2012

Au cours d'une émission de télévision diffusée sur une chaîne publique française et en partie dédiée à l'itinéraire d'un ancien Premier ministre et l'une des rares personnalités françaises à ne pas avoir postuler à la magistrature suprême, un célèbre journalise, Bernard Guetta pour ne pas le citer, énonça, à propos du choc des ambitions et du tragique destin des meilleurs, que «ces derniers, les meilleurs en l'occurrence, ne sont sollicités que lorsqu'il y a une situation exceptionnelle, le feu à la maison par exemple, et que l'on ne peut faire autrement. Mais, dans la majorité des cas, tout est toujours arrangements entre les médiocres». Ces propos qui peuvent être validés dans tous les contextes, par tous les cas de figure et sous toutes les latitudes sont d'autant plus pertinents qu'ils expliquent aussi et pourquoi les meilleurs s'en vont, préférant le plus souvent l'exil volontaire où forcé et que d'autres restent, dépérissant dans l'isolement et la décrépitude.
Dans de nombreux lieux de par le monde, les destins de ceux qui constituent l'élite se brisent souvent sur les remparts de l'incompréhension et de l'autoritarisme et les itinéraires des plus brillants sont souvent anéantis dans les marécages nauséabonds de l'arbitraire et du non-droit. Et il faut le plus souvent fuir où accepter de ne plus exister. Parfois, dans ces contrées-là, porter une arme à la ceinture ou un fusil en bandoulière est plus gratifiant que brandir l'étendard pacifique de sa propre réussite, fut-il celui du Nobel de médecine ! L'Algérie n'a pu, hélas elle non plus, échapper à ce cruel et redoutable syndrome : perdre ses élites et éprouver les plus grandes difficultés à les reconstituer. Combien de nos meilleurs pédagogues, scientifiques, diplomates, hommes politiques, hommes de théâtre, poètes, écrivains, artistes, théologiens, hommes de religion, militaires, avocats, médecins et autres professionnels ont dû subir, le plus souvent seuls, les pires humiliations et payé, rubis sur l'ongle, leur innocent délit, celui d'être sans doute plus intelligents et plus compétents que d'autres. Sans défense et sans recours, ils acceptèrent, parfois sous la contrainte mais aussi sous la menace, que d'autres abrègent leur carrière et brisent leurs légitimes ambitions. Et ces départs massifs de nos meilleures compétences ont inéluctablement engendré la dramatique régression, celle qui ne pourra jamais être féconde, que nous observons aujourd'hui au niveau de tous nos secteurs d'activités et dont le symptôme le plus bénin est la déliquescence de tous nos services publics, y compris les temples du savoir et de la connaissance que sont censées représenter nos écoles et nos universités. Les situations métastasiques, elles autrement plus graves et représentatives du manque cruel de compétences avérées qui s'annonce, se manifesteront certainement à court terme ! Mais le gâchis et la déperdition ont déjà commencé tout au début des premières années d'une jeune nation en devenir. Auteur prolifique d'une célèbre trilogie algérienne, complétée plus tard d'une non moins illustre trilogie nordique, qui mieux que Mohammed Dib dont l'œuvre illuminera encore longtemps la littérature universelle contemporaine incarne le mieux, à coté d'autres exilés algériens de renom, cette intelligence arrachée à cette terre bénie du ciel qui continue de porter le deuil de ses meilleurs enfants. Il écrivit, à l'automne de sa vie et dans son dernier livre publié, ses souvenirs d'enfance. Il était, comme le décrivit si bien Tahar Ben Jelloun, «un grand poète et un homme ancré dans l'humilité que l'histoire et ses épreuves lui ont appris». Expulsé d'Algérie en 1959 par la police coloniale, il mourut en France le 2 mai 2003. Le silence de celui qui ne fut ni bavard ni agitateur, qui eut la voix paisible et baignée de poésie et qui assourdit encore de son génie, incarne sans aucun doute le mieux ces premières élites qui auraient pu porter ce grand destin contrarié et inachevé de notre pays. Contrarié par l'ironie du sort et inachevé à cause de la cruauté des hommes. Mais on ne peut, comme on dit, échapper à ce qui est déjà écrit. Alors les élites furent achevées et réduites au silence. Ferhat Abbas et Abane Ramdane payèrent aussi les statuts de redoutable tribune et de grand stratège que pouvait leur conférer une intelligence hors du commun. D'autres encore, comme Malek Bennabi ou Mouloud Mammeri, furent souvent condamnés au silence par ceux qui étaient tout simplement jaloux de leur génie. Les élites, c'est-à-dire les meilleurs, celles et ceux qui peuvent aussi porter les destins des grandes nations et concrétiser les plus grandes ambitions, incarnent toujours le renouveau et le changement mais suscitent également les plus grandes rancœurs et subissent desseins les plus sournois. Les données sont d'une extrême gravité et donnent froid dans le dos. Nos meilleures compétences ne sont plus en Algérie. La déperdition se chiffre en centaines de milliers, voire en millions. Et le syndrome continue. Les investissements consentis pour former cette élite, que nous ne pourrons plus reconstituer, sont colossaux et notre développement économique et social est déjà hypothéqué par ce reflux de l'intelligence et de l'excellence et cet afflux de la méconnaissance et de l'ignorance. Faut-il incriminer ceux qui sont partis ? Certainement pas ! Beaucoup l'ont fait non sans avoir essayé de changer les choses et sans s'être battus. Beaucoup ont finalement renoncé. Certains sont devenus fous et d'autres se sont même donné la mort. Nous entendons aussi, ici et là, des propos très critiques relatifs à cette «supposée inconsistance idéologique, intellectuelle et culturelle» de nos nouveaux députés, qui nous laissent perplexes et dubitatifs. Faut-il se contenter de pérorer sur les qualités de ces jeunes élus lorsque certains parmi les plus âgés, ceux à qui incombait notamment la lourde tâche de les former et de les préparer à cette fonction, ont failli à leur mission ? Souvent âgés, insatiables, ces derniers continuent d'être en situation de responsabilité, faisant fi du sacro-saint principe de solidarité entre les générations et le plus souvent sans jamais avoir pu être les bons coachs qu'ils auraient dû être ! Mais ici, on raffole souvent, sur l'autel de l'égo et de la mégalomanie, du sacrifice de générations toutes entières et on achève bien les élites. Alors, de grâce, laissons au moins aux plus jeunes le droit de se construire eux-mêmes et d'acquérir expériences et autres qualités d'éloquence, d'analyse et de synthèse requises. L'heure est grave mais nous nous complaisons toujours dans ce que nous considérons, à tort, comme les signes précurseurs de notre émergence : un étalage d'une richesse suspecte, une consommation effrénée de produits que nous ne fabriquons pas et l'illusion de l'accès et de la maîtrise des nouvelles technologies. En réalité, ces éléments constituent les véritables symptômes de notre sous-développement chronique car nous restons encore et toujours à la traîne d'un monde qui se transforme sans nous. Nous consommons goulûment ce qui constitue, pour trois ou quatre décennies encore, notre seule et unique ressource : une énergie fossile qui tôt ou tard disparaîtra. Le sursaut est donc plus que nécessaire. Il est incontournable car indispensable à notre propre survie. La complainte de nos substantielles réserves de change et de nos fastidieuses réalisations ne pourra plus, longtemps encore, voiler notre échec et porter notre obstination à ne plus voir une cruelle réalité : nous ne sommes plus créatifs et nous n'avançons plus. L'Algérie n'offre plus de perspectives à son peuple. Et nous sommes enfermés dans le cruel dilemme d'un pays riche et d'un peuple pauvre ! Sans la liberté et la justice, l'argent et l'autoritarisme n'ont jamais fait bon ménage et ont très souvent été générateurs de corruption, de rapine et de péculats. Et ils ont souvent constitué le pire des attelages qui ne pourra que nous conduire à notre perte et provoquer notre implacable chute. L'avenir serait-il donc peut-être moins reluisant que ce que l'on semble vouloir nous faire croire ? Espérons que non et que Dieu nous préserve de cette grande illusion, celle qui consiste de continuer de croire que tout peut se gérer par la force et se gagner par l'argent. Seuls l'intelligence et le savoir pourront porter l'espérance. Une politique volontariste de développement des compétences et de reconstitution des élites, voulue et soutenue par les pouvoirs publics et soumise au crible du débat libre et démocratique, est indispensable pour espérer une hypothétique renaissance. Tout n'est pas encore entièrement perdu. Et le mensonge, l'incompétence et l'imposture, qui n'auront que trop durer depuis cinquante ans, finiront par se découvrir nus au pied du mur impitoyable de la mondialisation et de sa perversité qui elles ne craignent et ne redoutent que les meilleurs !

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