L'organisation Human Rights Watch a appelé les autorités marocaines à répondre aux revendications des participants aux manifestations qui se poursuivent depuis fin septembre dernier, notamment en ce qui concerne la réforme du secteur de la santé, appelant Rabat à mener une enquête sur l'assassinat de trois manifestants. «Les autorités devraient (…) écouter les appels des manifestants et respecter les droits aux soins de santé et à l'éducation, ainsi que le droit de manifester pacifiquement», indique l'organisation dans un communiqué rendu public mercredi. Les autorités marocaines «devraient également enquêter sur le recours par la Gendarmerie royale à la force létale et sur les autres allégations d'abus généralisés commis par les forces de sécurité publique à l'encontre des manifestants», ajoute la même source. «La jeunesse marocaine exprime ses revendications concernant l'état des soins de santé et de l'éducation dans le pays», a déclaré Hanan Salah, directrice adjointe de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch, citée dans le communiqué. «Le gouvernement devrait tenir compte des appels des manifestants et remplacer ses tactiques répressives par un engagement public et des réformes de grande envergure», soutient-elle. «Les carences du système de santé marocain, amplifiées par la mort récente de plusieurs femmes enceintes au sein d'un hôpital public d'Agadir, ont contribué à attiser la colère et à susciter des manifestations. Pendant ce temps, le Maroc se prépare à accueillir la Coupe d'Afrique des Nations en décembre 2025 et à co-organiser la Coupe du monde de la FIFA de 2030, ce qui engendrerait cinq milliards de dollars de dépenses destinées à la construction de stades, de complexes sportifs, de transports publics et de logements», déplore l'organisation. «En 2022, les dépenses publiques de soins de santé du Maroc ne représentaient que 2,3 % de son PIB, soit moins de la moitié du pourcentage de référence international, qui s'établit à 5 % au moins, selon les données de l'Organisation mondiale de la Santé. Dans le cadre de la Déclaration d'Abuja de 2001, le Maroc a également pris des engagements clairs à consacrer au moins 15% de son budget national à la promotion de la santé, mais moins de la moitié de cette somme a été dépensée en 2022», signale l'organisation. «La loi-cadre sur le système de protection sociale de 2021 du Maroc visait à combler les lacunes en matière de protection sociale, mais près de la moitié des 38 millions d'habitants du pays ne bénéficient pas d'une couverture de soins de santé», révèle-t-elle, en outre. «Les jeunes Marocains réclament clairement de meilleurs soins de santé, une meilleure éducation et la fin de la corruption», note Hanan Salah. «Si le gouvernement peut financer des stades de football ultramodernes, il peut aussi financer son système de santé, et les personnes qui réclament une chance équitable pour leur avenir ne devraient pas être confrontées à la force létale et à la répression», assène-t-elle. «Les autorités marocaines ont violemment réprimé des manifestations organisées par un collectif de jeunes appelant à de vastes réformes des services publics, ce qui a entraîné des décès et des arrestations massives», a déploré Human Rights Watch. «Les autorités marocaines devraient mener de toute urgence une enquête transparente sur les événements de Lqliâa et sur l'assassinat présumé de trois hommes, et demander des comptes à tout membre de la gendarmerie jugé responsable d'actes répréhensibles», affirme-t-elle. «Des manifestations largement pacifiques ont débuté le 27 septembre dans au moins 11 villes, notamment à Rabat, Casablanca, Tanger, Salé, Agadir, Marrakech, Sidi Taïbi et Inezgane», rappelle le communiqué. «La police et la Gendarmerie royale ont réagi en interdisant les manifestations et en dispersant les manifestants par la force, y compris par la force létale. rois personnes ont été tuées et douze blessées», ajoute-t-il. «Près de 1 000 personnes ont été arrêtées et au moins 270 manifestants, dont 39 mineurs, ont été traduits en justice et sont toujours en détention. Certains tribunaux ont condamné les manifestants à des peines de prison et à des amendes», souligne l'organisation. «En vertu de la législation sur les droits humains, les gouvernements et les institutions financières internationales qui les soutiennent sont tenus d'apporter une réponse aux crises économiques en mettant tout en œuvre pour protéger et faire progresser les droits. Ils devraient veiller à ce que les réformes proposées, notamment en matière de politique fiscale et de dépenses publiques, respectent au mieux les droits économiques, sociaux et culturels des citoyens», rappelle encore Human Rights Watch. n