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« Un monde de cinq cents ans est en train de s'écrouler »
Romain Migus se confie à LNR :
Publié dans La Nouvelle République le 08 - 12 - 2025

Il a vaincu les incursions de mercenaires, ce qui ne signifie pas que ça ne peut pas recommencer, et la pègre a été éliminée au sens premier du terme. Certains membres du crime organisé ont fui le pays, d'autres sont six pieds sous terre au Venezuela. Cela signifie que pour celui qui veut prendre les armes au Venezuela en ce moment, c'est assez difficile. Qu'il y ait eu des déserteurs par le passé est indéniable mais, à chaque fois, si l'on fait les comptes, ils représentaient moins de 1 %. En tout cas, ceux qui voulaient quitter l'armée et prendre les armes contre le gouvernement légitime du Venezuela ont essayé dans les années passées.
Mais on peut constater un fait intéressant, c'est que des déserteurs de l'armée du Venezuela, notamment en 2019 lors de l'opération Guaido, se sont retrouvés dans des camps de migrants aux Etats-Unis avec des menaces d'expulsion, traités comme des chiens, ou ont dû être embrigadés dans des groupes mercenaires ou dans des groupes de narcotrafiquants en Colombie, parce qu'ils ne pouvaient faire que ça. Cela donne évidemment un très mauvais exemple, car une fois que vous avez été utilisé, que vous avez eu votre quart d'heure de gloire et qu'on vous oublie complètement, que vous finissez dans la débauche ou en prison, cela porte les militaires loyaux à regarder tout cela avec dédain.
Aujourd'hui, le peuple vénézuélien est organisé, chacun connaît sa tâche dans la chaîne de défense du territoire et pas forcément en premières lignes, car il y a plusieurs tâches. Par contre, si le peuple est effectivement préparé à défendre le territoire, le Gouvernement, et en premier lieu le Président Maduro, appelle au calme et à la fête, appelle à fêter Noël, à continuer la vie de tous les jours et à la tranquillité. Et donc, si vous allez au Venezuela aujourd'hui, vous pourrez voir que les Vénézuéliens sont très tranquilles, ils sont dans leur quotidienneté, et on ne croirait pas qu'un pays qui est menacé par la flotte des Etats-Unis puisse être aussi
« relax ».
On voit que les Etats-Unis mènent plusieurs conflits dans le monde, ne risque-t-on pas de les voir se transformer en un conflit mondial ? Avec un Occident dirigé par des forcenés bellicistes, le monde n'est-il pas en danger ? N'est-il pas temps d'aller vers un monde multipolaire ?
Je ne le pense pas car les Etats-Unis n'ont plus la force de mener une guerre mondiale. Nous sommes dans un changement de paradigme total au bout de cinq cents ans. Nous voyons à la fois l'Occident tout entier qui est en train de perdre son hégémonie et, au sein de l'Occident, les Etats-Unis qui avaient l'hégémonie sur le camp occidental, sont en train de connaître de sérieuses difficultés. Donc, et Trump l'avait dit ainsi que Marco Rubio, le monde unipolaire comme on l'a vécu jusqu'ici n'a plus lieu d'être, et les Etats-Unis avec Trump essaient de garder la mainmise sur ce qu'ils considèrent comme leurs laquais et leurs plus fidèles valets, c'est-à-dire le monde occidental, à savoir l'Europe, l'Amérique latine, et quelques pays d'Asie comme le Japon, la Corée du Sud, et l'Australie, la Nouvelle Zélande. En fait, les Etats-Unis ne leur proposent absolument rien en contrepartie. On est réellement dans une relation de colonies, les Etats-Unis étant la métropole et les autres les colonies, et la survie des Etats-Unis ne dépend que de l'obéissance ou de la sujétion des Etats qui y consentent.
Et donc, les Etats européens présentent quelque discordance, je pense à la Hongrie, par exemple, mais aussi à l'Amérique latine, qui avait été considérée comme l'extrême-Occident, et qui a une ambivalence que n'a pas l'Afrique ni l'Asie et qui fait que les élites se considèrent comme faisant partie du monde occidental et comme étant des Occidentaux. Les peuples latino-américains qui veulent se libérer de l'oppression et mener une vie autonome et souveraine sont plus attirés par le monde multipolaire. L'Amérique latine est ambivalente et on le voit aujourd'hui avec des pays complètement annexés par les Etats-Unis comme les pays d'Amérique centrale, à la grande exception bien entendu du Nicaragua et du Honduras. Et puis quelques pays d'Amérique du Sud qui font de la résistance aussi en ce moment – mais ça change au gré des élections – comme le Brésil, la Colombie, le Venezuela. La Bolivie qui, pendant vingt ans a été un foyer de résistance par rapport aux Etats-Unis, vient de changer de camp, et bien que membre des BRICS, elle se rapproche aujourd'hui de Washington. L'Argentine qui avait été pendant un temps la fidèle alliée de la Russie et de la Chine retourne sa veste avec Milei. Tout cela nous montre que l'Amérique latine est ambivalente et elle va le payer très cher. Je pense que dans les prochaines années, l'Afrique et évidemment l'Asie, mais pour l'Asie c'est déjà fait, vont être des pôles d'attraction bien plus importants que les pays latino-américains qui vont payer très cher leur ambivalence à l'égard de l'empire étatsunien. Nous sommes dans un tournant historique où cinq cents ans d'Histoire sont en train d'être changés. Et le pivot de l'Histoire pendant les siècles prochains sera l'Asie, ce qui est déjà une réalité. Il suffit d'aller en Chine pour s'en rendre compte. Ce pivot mondial s'organisera certainement autour de la Chine mais avec de grandes puissances comme l'Inde,
l'Indonésie, et des puissances moyennes comme le Vietnam ou l'Iran, ce dernier pays étant un pivot entre l'Asie et le Moyen-Orient. Quant à l'Occident, à commencer par l'Europe, il va être complètement déclassé dans les prochaines années. Ce changement se fera-t-il dans la facilité ? Non, bien évidemment, ce n'est pas parce que le serpent est coupé en deux que la tête ne mord plus et qu'il n'y a plus de venin, comme disent les éthologues, et effectivement les Etats-Unis continuent de mordre, ils ont besoin de s'approprier des territoires pour assurer leur survie. Ce qui va se jouer au Venezuela dans les prochaines années, c'est le destin de l'humanité. C'est une guerre qui concerne absolument tout le monde parce que c'est la façon dont va s'écrire le monde de demain. Sera-ce encore une fois un monde bâti autour d'empires conquérants et vassalisants ou alors entre puissances libres qui veulent commercer et faire des échanges gagnant-gagnant sans se plier à une puissance hégémonique qui contrôle tout ?
A travers cette agression impérialiste qui se prépare, n'assiste-t-on pas au retour de la doctrine Monroe ?
Complètement. Les Etats-Unis essaient de remettre la main symboliquement et formellement sur l'Amérique latine – et ils le disent d'ailleurs. Symboliquement, puisque cela faisait un siècle qu'aucun Secrétaire d'Etat n'avait fait un voyage en Amérique centrale pendant son mandat, et c'est chose faite. Un siècle, rendez-vous compte. Marco Rubio a fait un voyage en Amérique centrale pour remettre au pas tous les laquais de la région : Guatemala, Costa Rica, Salvador, Panama. Le Panama a d'ailleurs été le point d'orgue de ce voyage. C'est amusant parce que le Président du Panama, Mulino, est un admirateur de Trump, il a une vision forte anti-migrants, indépendantiste : « Le Panama d'abord ! », etc. et Marco Rubio est venu dire : « Vous êtes dans l'initiative des Routes de la Soie et il va falloir en sortir tout de suite, sinon on mettra la main sur le canal ». Le Président Mulino est sorti des Routes de la Soie dans l'heure qui a suivi, donc on voit bien que ce n'est pas vraiment un pays mais qu'il fait partie de ces territoires étant administrés in fine par le Département d'Etat, sans aucune souveraineté et aucune volonté de la défendre. Le Panama n'a pas toujours été ainsi, et on se rappelle le glorieux général Omar Torrijos qui avait récupéré le canal de Panama et qui était un grand dirigeant nationaliste dans les années 1970-1980. Et qui d'ailleurs a été tué. Et donc, le Venezuela est un gros os à ronger. Le Brésil aussi. C'est très intéressant ce qu'il se passe avec le Brésil puisque Trump – et c'est hallucinant – a imposé des droits de douane de 50 % en fonction d'un ordre judiciaire condamnant Bolsonaro. Dans ces droits de douane, il y avait quelques exceptions, notamment le pétrole qui part aux Etats-Unis et qui revient au Brésil sous forme d'essence, et les Etats-Unis ne pouvaient pas pénaliser leurs propres raffineries. Néanmoins, il y a eu beaucoup de produits agricoles qui ont été frappés par les droits de douane, notamment le café brésilien et, dans l'heure qui a suivi la mise en place de ces droits de douane par Trump, la Chine a déclaré qu'elle achèterait le café moyennant une petite remise. Encore une fois, c'est le peuple étatsunien qui aurait souffert de cette politique. Le Président Lula s'est réuni en octobre avec Donald Trump et ils sont arrivés à un accord pour lever ces droits de douanes et décider de mesures acceptées par les deux parties. Donc, le Brésil ne s'est pas laissé faire, la Colombie non plus, puisque le Président Petro a été lui aussi menacé. Les menaces militaires ne visent pas que le Venezuela mais tous les pays de la Caraïbe, puisque Trump a menacé aussi la Colombie. Certains pays vassaux, des satellites des Etats-Unis dans la région, et que les Etats-Unis occupent militairement comme c'est le cas du Pérou et de l'Equateur, ou bien dans lesquels ils ont une présence politique et militaire conséquente comme en Argentine et au Chili, tous ces pays dépendent économiquement de la Chine, et les Etats-Unis ne proposent aucune alternative à part désignifier leur économie. Je pense que dans les mois qui vont suivre, ces pays vont subir des pressions de la part de Washington pour enrayer leurs échanges commerciaux avec la Chine. Et ce sera intéressant de voir comment va réagir le patronat local qui fait des affaires avec la Chine. Et donc oui, il y a une tentative de doctrine Monroe qui était mal dite « L'Amérique aux Américains », en réalité « L'Amérique aux Etatsuniens » qui est une doctrine coloniale non seulement pour l'Amérique latine, mais pour le monde. La doctrine Monroe ne s'est pas arrêtée à l'Amérique latine qui a été une source d'expérimentation avant de s'exporter par la suite vers l'Asie et ensuite après 1945 sur le continent européen.
Le Président Maduro ne paie-t-il pas sa position en faveur de la Palestine, entre autres ?
Oui, bien sûr, le Venezuela a rompu les relations diplomatiques avec Israël en 2006, après la guerre au Liban. Chavez a toujours émis de grandes critiques par rapport à Israël, et c'est la tradition du Venezuela qui est à la pointe de la défense du peuple palestinien à Ghaza et aussi en Cisjordanie. Il y a quelques jours, on a vu le ministre des Affaires étrangères israélien dire que le Venezuela est un point d'ancrage pour ses liens avec le Hamas, le Hezbollah et les Houtis ! Donc, la drogue, les Houtis, le Hamas, etc. bref, ils ne savent plus quoi inventer. Et évidemment, Israël, non seulement déteste le régime chaviste, mais apprécie Maria Corina Machado, la récente lauréate du Prix Nobel de la Paix, qui a signé en 2018 des accords politiques avec le Likoud de Benyamin Netanyahou, et qui avait demandé en 2019 au Président argentin Mauricio Macri et au Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou « d'intervenir au Venezuela » et puis qui, en tant que Prix Nobel de la Paix, a félicité Netanyahou « pour ses actions lors de la guerre contre Ghaza ».
Donc, nous avons une opposition vénézuélienne complètement inféodée au sionisme et complètement opposée à la ligne humaniste du gouvernement bolivarien.
Gramsci disait « Le vieux monde se meurt, le nouveau est lent à apparaître, et c'est dans ce clair-obscur que surgissent les monstres ». Ces Trump, al-Joulani, Macron, Netanyahou, von der Leyen, Zelensky, Milei, etc. ne sont-ils pas les monstres d'aujourd'hui ?
Oui, nous sommes dans un changement de paradigme avec un monde de cinq cents ans qui est en train de s'écrouler et nous ne sommes qu'au début, dans le clair-obscur de Gramsci. Effectivement, des monstres, il y en a à la pelle aujourd'hui. Mais j'aimerais aller plus loin. Qu'est-ce qui a fait la domination de l'Occident pendant plusieurs siècles ? C'est son esprit rationaliste et sa domination de la science qui lui ont permis de faire des avancées technologiques dans le monde de l'industrie et puis, bien sûr, dans le monde militaire, et qui ont permis des conquêtes à travers le monde. Ce qui est intéressant, c'est que dans cette décadence de l'Occident qui est entamée, on revoit surgir des options complètement anti-scientistes et antirationalistes. On ne va pas refaire l'histoire de la science de Descartes à Auguste Comte mais c'est ce qui avait permis cette domination de l'Occident. Et aujourd'hui, c'est l'Occident lui-même qui est en train de démolir ce qui a été pendant longtemps le pilier de sa domination, et on est sur des discours complètement anti-scientistes, peu fondés, contrairement à des pays qui ont récupéré ce que j'appellerai « la science avec conscience » et, comme disait Rabelais, qui ne sont pas dans « la ruine de l'âme » et qui appliquent les pensées scientifiques à leur développement sans pour autant en faire un moyen de domination et d'expansion coloniale.
La Chine est l'exemple type, évidemment, mais il y a aussi l'Inde. Et ce n'est pas une question de religion, car on a l'exemple de l'Iran qui est un pays islamique et qui est à la pointe de la science dans beaucoup de domaines, et d'ailleurs avec des femmes qui sont aux premiers rangs de la science iranienne. Et donc, on voit comment la science avec conscience a été reprise à leur avantage par les pays du Sud Global pendant que l'Occident est en train de se tirer des balles dans le pied, et notamment dans ce qui a été le piler de sa domination. C'est un signe des temps, et oui, nous sommes dans le clair-obscur. Totalement. On voit aussi les fanatiques qui reviennent. Que ce soit les évangélistes aux Etats-Unis, les suprémacistes juifs en Israël, ou les fêlés moyenâgeux de Daech au Proche-Orient, on voit que tout le camp occidental s'engouffre pour un long voyage dans des abîmes spirituelles destructrices au détriment de la science libératrice.
Cet Occident qui donne des leçons de démocratie, de liberté d'expression et de droits de l'Homme à la planète entière, n'est-il pas dirigé par une oligarchie ?
Oui, mais ça ne marche plus. Effectivement, pendant des années, l'Occident s'est gargarisé à travers ses dirigeants et ses ONG en donnant des leçons de démocratie, de liberté d'expression et de droits de l'Homme à tout le monde. Sauf qu'en matière de liberté d'expression, quand vous avez un Occident qui interdit des médias tels que RT, Sputnik, al-Manar, un Occident qui ferme les yeux ou applaudit quand un de ses membres assassine impunément trois cents journalistes à Ghaza, le monde entier voit bien que l'Occident n'en a rien à faire de la liberté d'expression. Lorsque cet Occident se gargarise des droits de l'Homme et ferme les yeux sur un génocide à Ghaza, les gens du monde entier voient bien ce qu'il se passe, surtout les trois quarts de l'humanité qui échappent à l'hypocrisie occidentale. Et même au sein de l'Occident – cette hypocrisie ne concernant que les élites et les
béats -, la grande majorité ne croit plus à cette doctrine des droits de l'Homme, de la liberté d'expression, et évidemment de la démocratie. On s'en moque aujourd'hui dans les pays européens et d'ailleurs toutes les élites européistes se rangent derrière les propos de l'ancien président de la Commission européenne, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, qui disait qu'il n'y a rien au-dessus des Traités européens et qu'on ne peut pas les remettre en cause.
On a bien vu que le vote et la démocratie libérale sont un mythe qui est en train de voler en éclats.
En France, par exemple, on a vu la révolte des Gilets jaunes et comment ils ont été massacrés, on a bien vu comment l'avis des Français qui avaient voté contre le Traité constitutionnel européen lors du référendum en 2005 avec les Néerlandais et avec les Irlandais avait été jeté à la poubelle pour rentrer dans le Traité de Lisbonne. Je pense que les gens comprennent, même dans le monde occidental. Bien sûr, il reste encore des Eurobéats, des gens qui ne comprennent pas, des gens un peu lents, qui écoutent les canaux de propagande de ces régimes occidentaux. Il y en a encore beaucoup quand on compare les réactions par rapport à la guerre en Ukraine dans le camp occidental et hors du monde occidental, et on voit que les organes de propagande contrôlent les esprits. Mais malgré tout, on constate qu'il y a pas mal de digues qui ont cédé et qui vont continuer à céder. J'ai été frappé il y a quelque temps par une polémique en France qui m'a interpellé, moi qui vis dans le Sud Global depuis maintenant vingt ans. Des journalistes ont essayé de chercher noise à une députée de la France insoumise, Madame Chikirou, parce qu'elle avait écrit un rapport favorable sur la Chine, l'accusant de nier le fait que la Chine soit une dictature, etc. Qu'est-ce que ça change qu'un misérable pays comme la France d'aujourd'hui dise que la Chine est une dictature ? Ça ne changera strictement rien. Madame Chikirou avait très bien répondu mais, en plus de ça, j'aimerais savoir ce que suggèrent les gens qui disent que la Chine est une dictature. Couper les relations avec la Chine ? Mais la France ne s'en relèverait probablement pas ! Il faut accepter le fait que la Chine est une force du monde multipolaire et que le pivot du monde, c'est désormais en Asie qu'il se joue. En fait, le clair-obscur va encore durer quelques dizaines d'années, je ne sais pas combien de temps, avant que chacun accepte son nouveau rôle. Evidemment, en Occident, il n'est pas encore accepté même parmi les pays en déchéance comme les pays de la vieille Europe, du vieux monde impérialiste, qui croient encore que leur misérable point de vue va changer quelque chose pour les nouveaux gagnants du monde multipolaire. Non, c'est fini.
Le monde est en train de s'organiser d'une manière différente. Est-ce que ce sera pour quelque chose de mieux ? Je ne sais pas mais je pense que oui. Ça ne veut pas dire que ce sera le paradis, il ne faut pas non plus faire peser sur les épaules des locomotives du monde multipolaire ce que vous n'arrivez pas à faire dans vos pays, mais je pense qu'un monde basé sur des relations harmonieuses de type gagnant-gagnant sans cette vision proprement occidentale de la domination et de la colonisation pour pouvoir se développer, apportera un changement
historique dans les relations entre Etats et entre peuples.
Nous voyons que le droit international est mis au placard. Le monde actuel ne s'est-il pas transformé en une jungle où règne la loi du plus fort ? Comment sortir de l'hégémonie US qui nous a conduits au désastre ?
On est en train de sortir de l'hégémonie US. Est-ce que ça se fera avec ou sans guerre, je ne sais pas. J'espère sans. Ce qui est sûr, c'est que sans guerre, ça mettra plus longtemps, mais nous sommes en train d'en sortir. Par exemple, en Amérique latine, le poids de la Chine qui est devenue le premier partenaire commercial de la plupart des pays du continent est en train de chambouler les relations entre les pays du sous-continent. Ce que les pays du sous-continent n'ont pas réussi à faire parce qu'ils étaient en permanence parasités par des intérêts étrangers, notamment étatsuniens, la Chine lui a donné une nouvelle impulsion, comme par exemple l'intégration latino-américaine qui n'avait jamais réussi à se matérialiser.
Prenez par exemple le port de Chancay au Pérou qui a été inauguré l'année dernière et qui est le port autour duquel vont s'organiser la plupart des échanges entre l'Amérique du Sud et l'Asie.
Avant, pour exporter ou pour importer sur toute la côte pacifique latino-américaine, il fallait monter au port de Manzanillo au Mexique ou au port de Long Beach aux Etats-Unis, donc tout en haut en Amérique du Nord. Aujourd'hui, le port de Chancay permet des relations qui vont favoriser les échanges directs de l'Amérique du Sud avec l'Asie et pas seulement la Chine, je pense à l'Indonésie, au Vietnam, à l'Inde, à la Corée.
Il y a des projets qui se mettent en route, et qui prendront aussi plusieurs années pour qu'ils deviennent une réalité mais ce sont des projets de voies de communication, notamment de chemins de fer et de routes à travers les pays de l'Amérique latine et qui n'ont jamais été construits en deux cents ans de vie républicaine.
On le voit, le monde multipolaire va complètement modifier la photographie de la région et c'est évidemment ce que les Etats-Unis essaient de freiner. On aura encore l'hégémonie des Etats-Unis pour quelque temps, mais de toute façon, je pense que leur lutte est vaine, même si l'Amérique latine est l'une des régions sur laquelle ils garderont le contrôle le plus longtemps.
Comment les anti-impérialistes dans le monde peuvent-ils être solidaires efficacement avec nos camarades du Venezuela ?
En faisant connaître la réalité du Venezuela et en ne tolérant plus ni les fake news ni les mensonges qui circulent chaque jour sur ce pays, ni les opérations de propagande en essayant de ramener des partis qui se disent anti-impérialistes mais dont l'anti-impérialisme s'arrête aux véritables défenseurs de l'anti-impérialisme lorsqu'ils sont menacés, faire connaître la vraie situation de la démocratie participative du Venezuela, et faire connaître le poids du Venezuela dans les relations géopolitiques.
Le Venezuela a été un pivot pendant des années, même si aujourd'hui il s'est un peu rétracté pour se concentrer sur ses problèmes internes dus au blocus, mais il reste un pays central dans la construction du monde multipolaire au niveau politique. D'ailleurs, le Brésil a refusé que le Venezuela entre dans les BRICS, notamment, je pense, parce que le Venezuela aurait été l'un des piliers politiques des BRICS, et le Brésil ne voulait pas de concurrent ou de rivalité sur la façon de gérer les BRICS.
Le Venezuela a une vision très politique du monde multipolaire et pas seulement axée sur l'économique comme le Brésil ou l'Inde, par exemple.
Mon pays l'Algérie a une grande histoire de fraternité avec le Venezuela, Cuba, etc. L'axe anti-impérialiste dans le monde n'est-il pas devant un nouveau défi avec cette intervention américaine au Venezuela ? N'y a-t-il pas une nécessité d'avoir un front anti-impérialiste US au niveau mondial ?
Oui, bien sûr. Effectivement, l'Algérie a une grande histoire de fraternité avec Cuba et le Venezuela. Ce sont des pays qui s'entendent très bien. L'axe anti-impérialiste, il faut le mener, le renforcer, et le Venezuela a été un pilier du monde multipolaire et du monde anti-impérialiste.
Je me rappelle d'une conférence qu'on avait organisée à Paris il y a quelque temps et dans laquelle je disais que les Français commençaient à découvrir le monde multipolaire avec la guerre en Ukraine et qu'il existe un Sud Global. En France, on parle de monde multipolaire et de Sud Global depuis 2022-2023, mais en Amérique latine, on en parle depuis plus de dix ans, voire quinze et même plus, et on est en train de le construire patiemment, sans faire trop de bruit.
Je rappelais que nous en sommes déjà au troisième sommet Afrique-Amérique du Sud, soit les forums ASA qui réunissent tous les président de l'Amérique du Sud et de l'Afrique. Le premier avait eu lieu au Nigeria en 2006, le deuxième à l'île Margarita au Venezuela en 2009. Je me rappelle le discours fondamental de Mouammar Kadhafi en 2009 qui disait : « Il est temps pour nous de créer l'OTAN du sud, l'OTAS, puisque tous les réseaux de communication entre l'Afrique et l'Amérique du Sud passent par le Nord, et il nous faut des réseaux de communication du Sud ».
Il y a eu aussi de très belles phrases de Chavez et de Lula qui étaient les promoteurs de ce monde-là, et le Venezuela a joué un grand rôle, non seulement dans la création du monde multipolaire, mais aussi dans la résistance à l'empire et ses prétentions d'hégémonie. Le Venezuela est dans le front anti-impérialiste depuis longtemps et l'est toujours aujourd'hui. Alors oui, solidarité et défense du Venezuela. Absolument.
Mon pays l'Algérie est ciblé en permanence par des tentatives de déstabilisation fomentées par des cercles occultes néocolonialistes, impérialistes et sionistes, visant notre Armée et nos institutions. Comment expliquez-vous l'ingérence occidentale continue dans les affaires internes des pays tiers ?
C'est proprement l'expression de l'esprit de domination occidental contre les pays qui sont connus pour résister à cette domination et pour avoir cherché une troisième voie, que cela soit au sein du camp socialiste à une époque, voire au sein du mouvement des non-alignés, voire aujourd'hui dans la défense des BRICS et du monde multipolaire, et ces pays sont constamment attaqués et constamment déstabilisés. Mais je dirais que la lumière se voit au bout du tunnel, parce que résister dans les années 1960 et 1970 se faisait sans grandes perspectives futures, puisque les pays se décolonisaient et qu'ils n'avaient pas la force économique de pouvoir lutter contre l'hégémon étatsunien et/ou occidental.
Or, aujourd'hui, ils ont cette force économique. Et l'organisation des pays du Sud Global contre un empire occidentalo-étatsunien vacillant fait naître des espoirs quant à un monde et à un futur meilleurs, de respect de la souveraineté des nations, et de lutte globale contre l'impérialisme. Personnellement, je vois le changement depuis quelques années, car j'ai un site internet qui s'appelle ''Les 2 rives'' et je constate que les réseaux sociaux ont changé. Il y a cinq ans, les pays dans lesquels j'avais le plus d'impact étaient la France, la Belgique, la Suisse, le Canada, à peu près dans cet ordre-là. Et aujourd'hui, ce n'est plus du tout ça.
Les pays qui paraissent dans mes statistiques sont la France, Haïti, l'Algérie, le Congo, et si vous prenez les statistiques par ville, avant, en premier, je voyais Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Lille, et aujourd'hui, je vois Paris, Port-au-Prince, Alger... C'est-à-dire que le monde multipolaire écoute la voix du monde multipolaire.
(Suite et fin)
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