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Algériens «insoumis et déserteurs» de l'armée française et leurs avocats
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 24 - 05 - 2009

La logique du colonialisme veut que tout Algérien en âge d'accomplir son service militaire est recruté, en tant que citoyen français, dans les Forces armées françaises.
Pourtant, de nombreux Algériens résidents en France allèrent faire leur service militaire dans l'A.L.N., soit pour des stages de quelques semaines , à l'exemple de Mouloud Ouraghi, Abdelhafid Cheroul et Smaïl Adour, Omar Laouari, Abbelkader Baccouche et Mebrouk Benzerrouk. Ces hommes avaient effectué un stage de commando au camp militaire de l'A.L.N. , à Larache , Maroc. Des officiers de l'A.L.N. les avaient entrainés. Enrôlés en France, envoyés au Maroc avec de faux papiers, par L'Espagne, et revenus de la même façon, ils se considéraient comme des Soldats en mission spéciale. Leur mission N° 1 était l'exécution de Jacques Soustelle, Ministre de l'Information du Gouvernement De Gaule. Dans les Forces Armées Françaises, la discrimination raciale s'exerce encore une fois : on regroupe généralement les «recrues» algériennes dans des formations de»couleur» au sein de l'armée régulière, sinon dans les corps spéciaux que le colonialisme a crées depuis toujours pour le «maintien de l'ordre», dans les pays colonisés.
An Algérie, dès leur incorporation, les jeunes algériens séjournent pendant quelques semaines dans les centres qui ont tous les caractères des camps de regroupement. En France même, où ils sont ensuite transférés et où ils sont rejoints par les jeunes Algériens recrutés en France, il existe de nombreux bataillons disciplinaires, conçus pour grouper tous ceux qui ne se plient pas à la rigueur d'une discipline spécialement dure, aux brimades des cadres colonialistes, ou qui sont suspects de sympathie envers le F.L.N. L'instruction militaire y est en grande partie remplacée par l'accomplissement de travaux (Cf. El Moudjahid, n° 56, du 27 novembre 1959.)
Si les «désertions» d'individus ou de groupes, ayant une connaissance politique suffisante pour affronter une telle épreuve, provoquent un renforcement de la discipline et une recrudescence de brimades, ce durcissement, à son tour, pousse à de nouvelles tentatives de «désertions». Par ailleurs, dans une certaine mesure, l'Organisation F.L.N. est aussi présente dans ces corps. Comme pour les officiers algériens (150 officiers servaient dans les rangs de l'armée française, principalement en Allemagne, dont la plupart avaient été mis aux arrêts de rigueur pour avoir refusé d'obéir aux ordres de subalternes français, et qui parvinrent à déserter vers la Tunisie pour rejoindre plus tard les maquis algériens), elle établit des réseaux de soutien pour les soldats déserteurs ou, au contraire, utilise les recrutements pour qu'un certain nombre d'Algériens aient une instruction militaire.
Tout l'effort français se borne à tenter de compromettre gravement le sujet algérien dans des opérations de guerre ou de police. Cependant, malgré la perspective d'être jugés par les tribunaux de l'A.L.N, les goumiers s'enfuient avec leurs armes, de plus en plus nombreux, au fur et à mesure que l'autorité du F.L.N. s'étend et se renforce. D‘ailleurs, pour beaucoup de recrues algériennes et de soldats de l'A.L.N. arrêtés en opération et «ralliés par la force», la participation à des opérations de guerre est le moyen de pouvoir rejoindre le maquis en se rendant utiles dans la mesure où ils peuvent s'emparer d'armes et de munitions. C'est ainsi que les tentatives faites pour essayer de compromettre les Algériens se retournent en fin de compte contre leurs promoteurs.
Parmi les insoumis, il y avait aussi de nombreux européens d'Algérie qui refusaient de faire la guerre à d'autres algériens comme eux, et c'est le cas d'Eugène Simongiovanni, né le 7 avril 1929 à Sétif. Journaliste à Liberté, ayant échappé aux grandes opérations policières déclenchées à Oran en septembre 1956. Simongiovanni entre dans la clandestinité à Oran même. Arrêté le 5 mars 1959, il fut jugé pour désertion, puis transféré en France, à Angers. Il écrivait à M° Jacqueline Jaeger, avocate à la Cour de Paris, le 12 juin 1960 à partir de la Maison d'arrêt d'Oran.
Cher Maître,[…] Après l'interrogation d'identité, j'ai fait la déclaration suivante:
«… En tant que combattant algérien, je me révolte contre cette inculpation d'insoumission que je considère comme une insulte. Je ne reconnais pas la compétence de votre tribunal à me juger. Je ne répondrai à aucune de vos questions, car j'estime n'avoir pas de comptes à vous rendre».
La réaction du tribunal et, surtout, du commissaire du gouvernement, semble prouver qu'on ne s'attendait pas à une telle attitude. Malgré les arguments de la défense (l'ordre de convocation n'était pas parti du centre de recrutement d'Oran) la peine requise, un an d'emprisonnement, soit le maximum prévu, a été prononcé par le tribunal. A noter que le commissaire du gouvernement avait évoqué des faits se rapportant à mon séjour dans le maquis, en dépit du non-lieu à ce sujet.
D'autres procès déserteurs ont été condamnés à des peines sévères et même à la peine capitale, comme pour Harrifi Aoumeu, né à Oran le 10/11/1936, qui fut arrêté à Lyon comme insoumis au mois d'octobre 1958. Incorporé de force au GT 305 à Vienne (Isère), et après trois mois de classes dans cette caserne, il fut transféré à Montluçon dans l'Allier où il devait passer quatre mois, malgré son refus de servir en Algérie contre mes frères. Le 31 octobre 1959, on le dirigea vers Oran. Profitant d'une situation de flottement dans la garde, il désertera avec arme (M.A. S e36 et bagages à partir de Bône (Annaba) où il se trouvait détaché par son corps (71 C.R.D.) en garnison à Batna. Il rejoint la Wilaya II Méntika IV Nahia II, cette dernière l'a affecté au secteur IV où il participa le 20 janvier 1960 à un accrochage qui eut lieu à la ferme Hermann située à 3 km de Duzerville près de Bône. Durant cette opération, Harrifi fut blessé et capturé, puis condamné à la, peine capitale par le T.P.F.A. siégeant à Batna.
Ramdane Zemièche quant à lui, a été arrêté le 16 mars 1960 dans le secteur de Didjelli.
Il écrit à son avocat M° Maurice Courrégé, le 24 janvier 1961 à partir de la prison de Constantine :
«Cher Maître J'ai reçu votre lettre du 17 janvier et bien compris son texte, dont je vous remercie.
Actuellement je suis toujours détenu préventivement à la maison d'arrêt de Constantine. Aujourd'hui même j'ai prévenu Monsieur le commissaire du Gouvernement que je vous ai chargé de la défense de mes intérêts. Dès que je connaîtrai la date de ma comparution, je vous informerai par télégramme. […] Les tortionnaires du C.R.A qui m'avaient arrêté m'avaient extorqué des aveux complètement faux, me contraignant notamment à confirmer que ma désertion était due à l'instigation du nommé Amerlaïn Abderrahmane. En réalité ce monsieur n'avait aucune relation dans mon affaire.
J'avais spontanément déserté mon unité. Je vous demanderai en conséquence cher Maître d'user de votre compétence afin de me faire bénéficier du régime de prisonnier de guerre. Je n'ai aucune affaire civile quelque soit la qualification pénale. Tout simplement je suis déserteur.
Recevez cher Maître l'assurance de mes meilleurs sentiments
R. Zemieche
Baroudi Belmiloud lui, écrit de la prison de Bône (Annaba) à son avocat maître Maurice Courrégé en ces termes :
«J'ai l'honneur de vous informer sur ma situation actuelle qui m'inquiète beaucoup.
J'ai déserté le 3 janvier 1961, du Premier Escadron ; 8eme Régiment de Spahis avec trois coreligionnaires qui sont : Kacem Be Ahmed, Mezouk Mansour, et Bouneira Mohamed. C'est moi le principal accusé dans cette affaire, puisque c'est moi qui ai pris la décision de nous rendre dans une jeep immatriculée 0600855 avec arment individuel, direction la Tunisie, comme réfugiés algériens.
Nous avions pris la direction de Saquiet Sidi Youcef à partir de Battoum, près de Ganmbattea, région de Souk Ahras. Mais, avant de franchir le barrage à un km près, la jeep s'est renversée et a brûlé. Pris de panique, nous avions pris la direction de la montagne et le 5 janvier nous fûmes arrêtés avec nos armes et munitions…
Pour le moment, aucune convocation pour passer devant le tribunal ne m'a été signifiée. Je compte donc sur vous pour me défendre le jour de mon procès.
Dans l'attente d'une réponse favorable.
Je vous prie d'agréer l'assurance de ma haute considération
Baroudi Belmiloud.
Baroudi sera jugé et condamné à mort le 20 octobre 1961.
Les procès de déserteurs ; mais pas seulement, se multiplient en Algérie et en France contre tous ceux qui refusent de se soumettre aux lois coloniales, du reste discriminatoires à l'égard des Algériens du deuxième Collège. Et pourtant, malgré le droit d'être défendus, l'autorité française a toujours dénié cette possibilité à ceux qu'elle considère comme des indigènes. Pour ce faire, elle procède systématiquement à l'élimination des avocats commis pour leur défense. Les personnes les plus aptes à dénoncer alors l'aggravation de cette nouvelle forme de répression, surtout à Alger, à alerter l'opinion, sont donc les avocats qui habituellement défendent les Algériens devant les tribunaux français. C'est ainsi que des mesures spéciales vont être prises afin de les neutraliser, afin de leur interdire autant que possible, les contacts avec les victimes de la répression et avec leurs familles.
Le gouverneur général Soustelle et ses I.G.A.M.E. avaient été utilisé à ce propos l'Etat d'Urgence. En juin 1955, par exemple, le bâtonnier du barreau de Batna, M° Laïd Lamrani, qui avait défendu de nombreux habitants des Aurès depuis le 1er novembre 1954, était interdit de séjour dans le Constantinois. Il refusa alors son ordre d'expulsion, et puisqu'il ne pouvait plus défendre ses compatriotes, il les rejoignit et combattit dans un maquis de l'Aurès. Il fut tué lors d'un engagement entre l'A.L.N. et les forces françaises. Au mois d'août 1955, deux avocats parisiens se voyaient refuser le permis de communiquer avec leurs clients internés au camp de Berroughia : en décembre, un avocat de Paris venu plaider en Algérie se voyait interdire l'entrée du département de Constantine. Robert Lacoste devait poursuivre la politique de Soustelle. En juillet 1956 il faisait interner M° Rezkallah, en novembre M° Thuveny. C'est en février 1957 cependant que la neutralisation des avocats prend son aspect global. La majorité des avocats algériens et des avocats européens «libéraux» sont arrêtés, certains jugés, certains internés dans des camps, certains expulsés de France. Les deux premières arrestations sont celles de février 1957 de Mahieddine Djender, condamné le 24 juillet 1967 à 10 ans de travaux forcés pour «association de malfaiteurs» et d'Ali Boumendjel, «suicidé» par les parachutistes de Massu, après des tortures atroces. La revue ESPRIT, N° 5, mai 1957 écrit que M° Boumendjel fut laissé pour mort dans sa cellule après un interrogatoire particulièrement poussé. «Découvert, au moment de la relève, par des gardiens qu'on avait négligé de rendre complices, il est aussitôt transporté à l'hôpital Maillot». Le corps ne fut jamais rendu à la famille.
Une «note de renseignements (SECRET)», datée Alger 23 mars 1957, fut adressée au Supert-Préfet d'Alger, à la direction de la Police générale et au directeur de la Sûreté. Elle concernait «les réactions de la population musulmane» à la nouvelle du «suicide» de M° Boumendjel.
«Milieux modérés et intellectuels.
«Ces milieux affirment qu'il ne s'agit, en la circonstance, non pas d'un suicide, mais uniquement d'une «exécution». Il est impensable, ajoute-t-on, qu'Ali Boumendjel se soit volontairement donné la mort.» «Le compte rendu rocambolesque des circonstances de cette mort est édifiant» «A-t-on souvent vu faire passer un inculpé de terrasse à terrasse pour éviter de le montrer à la population» «Comment se fait-il que Boumendjel, arrêté depuis plus d'un mois, qui avait avoué toutes sortes de participations à la rébellion, se soit trouvé encore entre les mains des parachutistes ?» Que fallait-il encore qu'il avoue ?»…. L'affaire Boumendjel survenant avec les premiers échos des méthodes employées par les autorités responsables à Alger est longuement évoquée à l'Assemblée Nationale, les 26 et 27 mars 1957.
Pour répondre au malaise qui s'est emparé d'une partie de l'opinion publique française, le Gouvernement décide la création, le 5 avril 1957, d'une commission de Sauvegarde des Droits et Libertés Individuels. Cette Commission dispose cependant de peu de pouvoirs. Elle est placée AUPRES du Ministre résidant. Après l'arrestation de M° Djender et de M° Boumendjel, la repression contre les avocats ne devait pas ralentir, bien au contraire.


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