Où se trouve aujourd'hui le FLN ? On ne sait pas. On ne le voit pas dans les villages, comme autrefois, ni dans les villes ni dans les Dechera ni dans les montagnes. Sauf que depuis vendredi, on peut le voir à Alger ou à l'ENTV si on n'habite pas Alger. Une nouveauté ? A peine. Le seul détail à retenir est que Bouteflika a écrit à Belkhadem pour lui demander d'ouvrir le parti aux jeunes. Techniquement, c'est un Algérien vieux qui demande à un vieil Algérien de faire quelque chose contre eux deux. Dans un monde parallèle où Belkhadem serait un homme perpendiculaire et pas horizontal, la réponse de Belkhadem aurait été claire : il faut commencer au moins par rajeunir la présidence, les ministères de souveraineté, le Sénat et l'APN et le ministère de la Défense avant de demander ça au FLN. Cela n'a pas été le cas et ne le sera jamais. D'abord, parce que la mission de Belkhadem n'est pas d'être lui-même mais d'être Belkhadem tel qu'il a toujours été. Ensuite, parce qu'il y a contradiction dans les faits et les thèses. Dès qu'un jeune met le pied dans ce parti, il prend de l'âge, car l'âge n'est pas le Temps, mais une idée du Temps. Pour se sentir FLN, un jeune est obligé de remonter le temps et pas de le descendre. Du coup, obligé de naître avant sa propre naissance, il prend un coup de vieux pour convaincre les vieux. Explication : le FLN est le seul parti dont la définition peut être lue dans les deux sens. De gauche à droite ou de droite à gauche. On dit « le vieux parti » et on peut dire le « parti des vieux ». Ça ne change rien depuis le départ de la France. L'autre explication est que le FLN n'a pas de définition sauf celle de l'âge et n'a plus de mission sauf celle de la « solidarité ». On a déjà dit qu'il ne sert à rien, qu'il doit être dissous, que c'est un appareil digestif, un reliquat de l'histoire nationale, que le néo-nationalisme n'est pas un humanisme et que l'avenir est au multipartisme, on a oublié une dernière analyse. Celle de la « solidarité ». Dans le cadre des stratégies de démocratie contrôlée, certains régimes néo-socialistes policiers, comme le nôtre, ont besoin de ce genre de parti pour assurer la cohésion civile comme le ferait une armée pour la cohésion des hommes armés. Certains peuples sont gouvernables par la nostalgie à défaut de rêve futur, et chez nous, on le sait trop bien. Et comme remarqué brillamment par Med Bahloul, en Algérie, seule l'ANP assumait la fonction d'institution productrice de leaders depuis toujours. Depuis plus d'une décennie, ce n'est pas le cas et donc, la place est vacante pour un autre appareil de sélection des genres et d'habillage idéologique de la rente et le baril. Assis uniquement sur un Baril, un régime ne peut pas revendiquer élégamment le « Pouvoir ». Il faut que ce Baril parle au Peuple et raconte sa vie à l'époque où il était un fusil : c'est la fonction du multipartisme du parti unique : RND, FLN et MSP. A la fin, avec le FLN on est au moins assuré d'une chose même si on est né longtemps après l'Indépendance : un, de faire la guerre contre la France un jour ou l'autre, en tirant la langue, deux, il y a toujours un butin et un bien-vacant là où il y a ce parti. C'est l'effet d'appel de ce parti sur les concurrences aux Pouvoirs locaux et de proximité. Pour l'autre pouvoir, ce parti n'a jamais décidé. Il se contentera toujours de faire le burnous depuis qu'il a déposé les armes. Quand on n'a qu'un seul produit à vendre pour vivre, le pétrole, on ne peut avoir qu'un seul parti unique. C'est une règle économique de base. C'est ce qui explique l'absurdité de ce parti et sa profonde logique interne.