La nationalisation du canal de Suez et la construction du gigantesque barrage d'Assouan sont les deux œuvres de Gamal Abdel Nasser qui lui ont valu la reconnaissance durable du peuple égyptien et le prestige international dont il a joui jusqu'à sa mort. C'est ce précédent historique qui a inspiré au successeur actuel de Nasser l'idée d'engager l'Egypte dans la réalisation du chantier « pharaonique » du doublement du canal de Suez. Abdel Fattah Al Sissi était certain que l'idée serait accueillie par les Egyptiens avec enthousiasme et fierté tant tout ce qui touche à cette voie d'eau remue et enflamme leur fibre patriotique. A preuve que ces Egyptiens qu'ils soient pour ou contre leur maréchal président, ils ont unanimement applaudi que le chantier du doublement du canal ait été accompli. Al Sissi avait donc toutes les raisons d'afficher sa satisfaction lors de la grandiose cérémonie d'inauguration du nouveau bras du canal. La reconnaissance de son peuple pour cette œuvre lui est désormais acquise même si par ailleurs une partie de celui-ci continuera à contester la légitimité de son élection et à combattre l'autoritarisme brutal de son régime. La réussite qu'engrange Al Sissi avec l'élargissement du canal lui a également permis de « redorer » internationalement son prestige comme l'atteste la présence du prestigieux aréopage de chefs d'Etat et personnalités étrangers ayant assisté à l'inauguration de l'œuvre réalisée. Quoi que l'on puisse penser d'Al Sissi et de son régime, il faut leur reconnaître qu'ils ont avec le doublement du canal de Suez mené à son terme un projet dont l'Egypte recueillera des bénéfices et des gains dont le pays a grandement besoin, confronté qu'il est à l'impérieuse nécessité de suppléer au tarissement des revenus financiers que lui procurait l'industrie touristique et à celle de disposer de la ressource d'argent qu'exige une politique de redressement économique seule à même de résoudre la problématique du développement d'une Egypte dont la population se rapproche des cent millions d'âmes. Ce qui vaudra sans nul doute à Al Sissi de rester dans l'histoire de l'Egypte est qu'il n'a pas réédité la faute historique du khédive sous le régime duquel Ferdinand de Lesseps a entrepris et réalisé le percement du canal de Suez qui a consisté à le faire financer par des puissances étrangères qui en sont devenues de ce fait les propriétaires jusqu'à ce que Nasser fasse triompher le droit de l'Etat et du peuple égyptien. Certes, Al Sissi a obtenu des aides financières étrangères mais sans la contrepartie d'accorder des actions de Suez aux donateurs. Le président maréchal a au contraire réservé l'acquisition en priorité de celles-ci à ses concitoyens. Lesquels conscients de l'enjeu ont massivement répondu à l'offre et acquis une masse substantielle d'actions. Preuve s'il en est que pour les Egyptiens le canal de Suez n'est pas à leurs yeux qu'une œuvre à finalité seulement économique mais qu'en lui se cristallise leur fierté nationale et celle que l'Egypte a fait « un cadeau au monde » symbole de son entrée dans l'ère moderne tout autant qu'il est celui de son génie civilisationnel qui a survécu à toutes les vicissitudes de l'histoire.