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Juridiquement, Saal Bouzid n'est pas considéré comme martyr
Publié dans Sétif Info le 08 - 05 - 2015

Ci-après un article intéressant publié par notre ami et écrivain El yazid Dib dans lequel il discute à propos le cas des révolutionnaires algériens morts pour la liberté du pays dont figure Saal Bouzid et qui ne sont pas juridiquement qualifiés de martyrs.
« Le chahid est le symbole et la fierté de la nation. La société lui doit glorification et reconnaissance » *
L'article 10 de la Loi n° 99-07 du 5 avril 1999 relative au moudjahid et au chahid n'octroie le statut de chahid qu'au « moudjahid tombé au champ d'honneur ou décédé durant la révolution de la libération nationale suites à des blessures ou des maladies, porté disparu ou décédé en prison ou dans des lieux de détention ou après sa libération par suite de tortures subies ». L'article 5 de la même loi définissant le moudjahid stipule « est considérée comme moudjahid toute personne qui a participé à la révolution de la libération nationale de manière effective, permanente et sans interruption dans les structures et/ou sous la bannière du Front de libération nationale durant la période allant du 01 novembre 1954 au 19 mars 1962 ».
L'Emir Abdelkader, Lalla Fatma Ns'oumer, Cheikh Bouamama, Cheikh El Mokrani, Cheikh El Haddad, les enfumés du Dahra, les déportés, les mutilés et les nombreuses victimes des successives insurrections qui ont émaillé la chronologie nationale et des milliers d'autres, morts pourtant pour l'Algérie ne sont pas juridiquement des martyrs. Pourtant, il y avait bien dès 1830 des soulèvements, des révolutions, de la résistance et des insurrections contre la force coloniale. La résistance de Moulay El Echekfa en 1871, celles de Béni Chougrane en 1914 et des Aurès en 1916 étant sans discontinuité réprimées à fond par la violence ont bien précédé ou succédé à d'autres, laissant ainsi des milliers de morts. Le refus de domination a été toujours un dénominateur commun pour lutter contre la répression d'un agresseur sans foi ni loi. Dans chaque bourg, dans chaque hameau, là où l'injustice, le mépris et l'humiliation sans face étaient pratiqués, des Algériennes et Algériens avaient connu au fil du temps les pires sévices, les pires atrocités et les exécrables exécutions sommaires. Il n'y avait pas cependant le Front de libération nationale. Le détenteur potentiel de toute la légitimité historique de toute la profonde histoire de la nation algérienne ! La lutte ne s'était jamais arrêtée. Le FLN, en novembre 1954 venait de constater qu'« après des décades de lutte, le mouvement national a atteint sa phase de réalisation ». C'est ce « mouvement national » avec ses différentes composantes qui allait permettre au Front d'offrir « la possibilité à tous les patriotes algériens de toutes les couches sociales, de tous les partis et mouvements purement algériens, de s'intégrer dans la lutte de libération sans aucune autre considération ». Les « événements » sanglants et trop nombreux, entre autres ceux du 08 mai 1945 font partie du processus de la lutte populaire. Des populations entières ont été décimées par une France impérialiste, par un pouvoir militaro-politique conquérant et occupant. Les morts sont morts, l'indépendance est acquise et les comptes de tout solde ne sont pas totalement réglés.
C'est un peu inouï de vouloir faire reconnaître aux autres un crime quand nous mêmes refusons de reconnaître comme martyrs les victimes issues de ce crime. Cette phase qui doit se faire chez nous est préliminaire à toute autre. Il y a de cela une année que le ministre des Moudjahidine, M. Tayeb Zitouni, en marge des cérémonies officielles commémorant le 69ème anniversaire du 8-Mai à Bouira a annoncé que « le dossier relatif à l'intégration des victimes de ces massacres dans la loi du chahid sera étudié ». Les observateurs les plus avertis attendent toujours la « réparation de cet oubli ».
70 années après, un crime est toujours impuni. Ses victimes toujours sans reconnaissance. Le 8-Mai 1945 est plus qu'un lot de sacrifice, ce fut un engagement essentiel d'un peuple qui n'aspirait qu'à la liberté et la dignité. Il était déjà le premier novembre qui allait en finalité consacrer la victoire de la marche. Ce mouvement qui n'a cessé de faire sa progression depuis 1830 porte toujours en son sein le sens du devoir de se libérer de toute emprise et de tout envahisseur. Le sang a coulé, des cadavres jonchaient le sol, le soleil les scrutait, la nuit les embaumait. Les pleurs des femmes, des mômes de tous les rescapés résonnent encore dans ces sites béants à Kherrata, Sétif, Guelma et ailleurs. Les sinistres exactions perpétrées à grande échelle, les tueries en masse, les viols et tortures systématiques, les destructions de villages et de douars par les bombardements, les pilonnages et les incendies que de nombreuses villes ont connus. En ce printemps noir de 1945, ce ne sont pas le fruit de l'imaginaire populaire mais des faits réels, extrêmement pénibles, vécus par les Algériens sous domination française. S'en souvenir c'est maintenir l'interaction et la complémentarité entre les générations. L'Algérie indépendante dispose de suffisamment de preuves, de témoignages et de constats pour pouvoir établir expressément que des actes inhumains causant intentionnellement de grandes souffrances et des atteintes graves à l'intégrité physique de toute une population de surcroît sans défense ont été commis.
Ailleurs, une certaine France républicaine tente de faire assumer ces crimes exécutés au nom d'un régime colonialiste sans repères, aveugle et barbare. Le 27 février 2005, Hubert Colin de Verdière ambassadeur de France à Alger en visite dans la ville martyre de Sétif a déclaré à propos de ces massacres qu'il s'agissait « d'une tragédie inexcusable ». Son successeur, Bernard Bajolet, en visite à Guelma trois ans plus tard, soulignait « la très lourde responsabilité des autorités françaises de l'époque dans ce déchaînement de folie meurtrière » qui avait fait « des milliers de victimes innocentes, presque toutes algériennes », poursuivant que ces massacres sont une « insulte aux principes fondateurs de la République française ». Il y a quelques jours seulement, le Conseil de Paris avait adopté un vœu sollicitant l'Etat français de reconnaître les massacres du 8 mai 1945. Le 19 avril 2015, Jean-Marc Todeschini, le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants et à la Mémoire, venant prématurément à la célébration du 70ème anniversaire s'est contenté du dépôt d'une gerbe devant le mausolée de Saal Bouzid le premier « martyr » des massacres. Dire que le combat de mémoire continue. « N'est-il pas temps pour que la France officielle, si prompte à juger les crimes des autres et tellement prolixe quand il y va de son droit et de son intérêt, de regarder son histoire en face et de ne plus faire dans l'excessive parcimonie quand il s'agit de dire et de reconnaître la vérité sur les crimes qui ont jalonné son occupation coloniale ? », estime Monsieur Abdelhamid Salakdji, président de la Fondation du 08-Mai 1945.
Chez nous, l'oubli est à l'affût d'une certaine mentalité. L'amnésie. C'est pourquoi l'acte de revivifier en permanence la mémoire, la conserver n'est qu'une foi citoyenne et nationaliste. Un droit universel. Tout ensemble social dévêtu de son histoire devient vite un recueil de jours sans effets et sans soubassement. Toute nation démunie de conscience historique reste vulnérable aux altérations des faussaires et des contrefacteurs de son histoire.
La mémoire est toujours cette conscience qui plonge ses racines dans les épopées, des légendes et des faits d'armes. C'est cet assortiment de circonstances chronologiques qui s'enfante continuellement à l'instant de son vécu et qu'un jour on aura à l'appeler : Histoire. C'est un fait qui passe mais ne s'efface pas. Sans ce rappel, sans cette rétrospection l'espèce humaine, ses péripéties, ses découvertes, ses joies et ses peines ne seraient en finalité qu'un vain passage. Dénudé de tout ressourcement ou quelconque pédagogie et sujet à dépérissement.
Le 08-Mai 1945, comme toute atrocité endurée par des peuples sans défense se doit de se faire rappeler, ce génocide sans pareil, à défaut de devenir une proie pitoyable à un renoncement involontaire ou à un oubli prédateur. Ce n'est pas exclusivement à l'unique commémoration qui va secouer les léthargies collectives qu'échoit le rôle de requérir encore et encore justice et de clamer qu'un crime avait bel et bien été perpétré. Il appartient à présent à ses acteurs d'acter un passé horriblement vécu. Ceci n'est qu'une noble obligation en face du droit des générations montantes qui, en toute légitimité, se doivent aussi de le réclamer. A chaque disparition d'un acteur, l'on assiste à une disparition d'un pan de notre histoire. A chaque enterrement, l'on enterre avec une source testimoniale. Le salut de la postérité passe donc par la nécessité impérieuse d'immortaliser le témoignage, le récit et le vécu. Une telle attestation de conscience serait en plus d'une résolution volontaire de conviction, un hommage à la mémoire de ceux et de celles qui ont eu à acter le fait ou l'événement. Le témoignage devrait être mobilisé par une approche productive d'enseignement et de fierté. C'est ce à quoi aspire la Fondation du 08-Mai 1945, croit-on savoir. Gardien vigilant de la mémoire, elle tend dans cette optique de rendre accessible l'information historique, son extraction et sa mise en valeur. Elle plaide aussi pour que l'Etat ait cette mesure de déclarer les 45.000 « morts » comme des martyrs de la résistance, du refus de la colonisation. Ces morts sans sépulture n'aspirent à rien d'autre qu'un regard méritoire digne face aux atrocités subies. Ils ne revendiquent ni avantages, ni privilèges. Juste la symbolique d'un geste légal à même de leur garantir au moins une pérennité dans les textes. Les générations montantes auront certainement à interpeller la législation actuelle sur cette disparité.
Cette opportunité de célébrer le 70ème anniversaire des horribles massacres n'est qu'une énième occasion de dire que 70 ans après un crime est toujours non reconnu. Devoir donc, incombe à tous de réaffirmer la mobilisation et l'engagement à faire honorer en les éternisant les sacrifices des aïeux et sacraliser ainsi le couronnement obtenu par la glorieuse révolution de Novembre 1954. Il n'est de salut pour ces âmes disparues que de s'en rappeler l'abnégation. L'unique hommage qui peut leur être rendu c'est l'acte législatif d'une nation reconnaissante. Dans le discours, les stèles, les épitaphes, ils le sont. Dans les commémorations, ils le sont davantage. Ne reste qu'une consécration juridique. Un regard de devoir de mémoire pour ces martyrs oubliés.
* Article 12 de la loi n° 99-07 du 5 avril 1999 relative au moudjahid et au chahid (Journal officiel n° 25 du 12 avril 1999)


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