NEW YORK - Le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) a émis lundi de sérieuses inquiétudes quant à l'impact des conditions climatiques sur la sécurité alimentaire et la stabilité dans la région du Sahel et en Afrique de l'Ouest. Dans son rapport intitulé "Sécurité des moyens d'existence : changements climatiques, migrations et conflits au Sahel", cette organisation de l'ONU a identifié 19 zones de cette région où les changements climatiques ont été les plus sévères. Un grand nombre de ces points chauds sont situés dans la partie centrale du Sahel, au Niger, au Burkina Faso, dans le nord et sur la côte du Ghana, ainsi que dans le nord du Togo, au Bénin et au Nigeria, indique le document dont le Comité permanent Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel (CILSS) est également co-auteur. "Cette analyse souligne que la compétition entre les communautés pour les ressources rares, particulièrement les terres arables, l'eau et les forêts est déjà une réalité en Afrique de l'Ouest et que la coopération régionale sera cruciale pour dissiper les tensions, gérer les risques et limiter les possibilités de conflits et de migrations environnementales", a déclaré le Directeur exécutif du PNUE, Achim Steiner, lors de la présentation de son rapport à la Conférence des Nations unies sur les Changements Climatiques (CNUCC) qui se déroule actuellement à Durban (Afrique du Sud). L'analyse détecte des changements significatifs des conditions climatiques régionales tels qu'une augmentation globale des températures saisonnières moyennes d'environ 1°C de 1970 à 2006. Ce réchauffement est allé jusqu'à 1,5°C à 2°C en Mauritanie, dans l'Est du Tchad et au nord du Mali. L'étude montre aussi que la fréquence des inondations ainsi que la zone que celles-ci couvrent ont augmenté dans certaines parties de la région au cours des 24 dernières années. De larges surfaces au sud du Burkina Faso, à l'ouest du Niger et au nord du Nigeria ont été sujettes à jusqu'à 10 inondations durant cette période. Selon le PNUE, ces modifications des conditions ont affecté les moyens d'existences de millions de personnes dépendant des ressources naturelles. L'étude a découvert que les impacts sur la disponibilité des ressources naturelles de tels changements des conditions climatiques, combinés avec des facteurs tels que la croissance de la population et une gouvernance faible, ont mené à une compétition accrue pour s'approprier les ressources rares et à des modifications des couloirs de migrations dans la région. Par exemple, les éleveurs de bétail sont principalement affectés par des modifications des précipitations qui ont lieu dans les régions arides et semi-arides du Sahel et qui influencent la disponibilité en arbustes, en herbe et en points d'eau pour leur bétail. Leurs couloirs de migrations traditionnels sont de plus en plus fréquemment remplacés par une relocalisation permanente dans le Sud. La compétition pour l'eau douce, les ressources côtières et les terres arables entre les pêcheurs, les agriculteurs, les éleveurs et les nouveaux migrants augmente, et mène dans certains cas à un durcissement des tensions et à des conflits. Un tel phénomène a eu lieu lors de la sécheresse et de l'invasion de criquets qui a affecté le Niger en 2005, qui a mené à un déficit de rendement des cultures de 4,6 millions de tonnes forçant les éleveurs à migrer vers les pâturages de saisons sèches nigérians plus tôt que prévu, et a également entraîné une hausse des prix laissant les ménages plus pauvres incapables d'acheter des produits alimentaires. Pour le responsable du PNUE, cette étude met en lumière le besoin urgent d'une intensification des investissements en matière de mesures de soutien telles que le programme de Réduction des émissions de CO² provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts (REDD) ainsi que de l'importance d'atteindre le financement climatique de 100 milliards de dollars par an d'ici 2020.