L'attraction qu'exerce l'Occident et les difficultés de s'épanouir dans son propre pays agissent négativement sur les intellectuels de l'Afrique, a relevé lundi à Alger un chercheur africain. "La captation de l'Occident et les difficultés de s'épanouir dans son propre pays à cause de certains carcans sont les deux facteurs qui agissent négativement sur les intellectuels de l'Afrique", a indiqué Bernard Founou-Tchigoua, directeur de recherche au Forum de l'Afrique (Cameroun) au colloque international intitulé "L'Afrique aujourd'hui et Fanon" qui se tient du 1er au 3 juin à Alger. "Les intellectuels, par peur, ne peuvent pas accomplir leur mission pour apporter leur contribution de bien commun à la société s'il n'y a pas de liberté réelle et pratique dans leur pays" a-t-il constaté. La pensée de Frantz Fanon consacre que "chaque génération doit connaître sa mission" et "la lutte n'a de sens que si elle fait surgir un homme libre qui prend des initiatives pour lui-même et ses semblables", a rappelé Bernard Founou-Tchigoua. Il a signalé, dans ce sens, que "le système politique doit aller de pair avec la stabilité économique et l'équité sociale, sinon personne ne croira aux discours théoriques". Pour ce chercheur camerounais, "le pouvoir politique en Afrique ne repose pas sur l'élite contrairement en Occident où 90% des intellectuels ont des liens organiques avec les forces qui dirigent". Cependant, a-t-il souligné que "si l'aspiration à émigrer devient massive au niveau de la jeunesse et si l'élite veut émigrer parce qu'elle n'a pas la culture de vouloir rester au pays, alors les peuples seront sans berger". Hartmut Enselhans, professeur émérite à l'université de Leipzeig (Allemagne) et qui est associé depuis des années au CREAD, a avancé, pour sa part, que "les tensions sociales sont intimement liées à la mauvaise politique économique" et du coup, "les appels moraux sont insuffisants" vis-à-vis des populations à la recherche d'amélioration de leurs conditions socio-économiques. Pour Daho Djerbal, professeur au département histoire de l'université d'Alger et directeur de la revue Naqd, "la violence demeure récurrente, permanente et périodique" dans les pays pourtant décolonisés depuis des années comme l'avait établi Fanon. L'universitaire algérien a noté, dans ce cadre, que "l'idéologie de la terreur et du terrorisme est utilisée par les puissances étrangères contre les Etats ou les nations qui résistent aux stratégies de domination". "La majorité des violences et des attaques terroristes dans le monde se passe dans les pays musulmans", a constaté Unaiza Niaz, consultante psychiatriste et psychothérapiste au Pakistan, citant un rapport de l'OMS où il est établi, selon elle, que "85% des conflits se déroulent dans les pays pauvres".