L'Algérie a appelé à la conclusion d'un traité effectif porteur des valeurs de solidarité et des exigences des droits humains à même d'être mis en œuvre par les pays membres l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), réunis depuis mardi en conférence diplomatique à Marrakech (sud du Maroc) pour conclure un traité visant à faciliter l'accès des déficients visuels et des personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées. "L'Algérie lance un appel pour œuvrer ensemble à la conclusion d'un traité porteur des valeurs de solidarité et des exigences liées aux droits humains. Un traité qui soit à la fois, effectif et à même d'être mis en œuvre par nos pays. Un Traité qui préservera la dimension du développement" a déclaré Ahmed Benyamina, ambassadeur d'Algérie à Rabat, chef de la délégation algérienne qui comprend notamment Sami Bencheikh, directeur-général de l'Office national des droits d'auteur et des droits voisins (ONDA). Il a souligné que ce traité "permettra en même temps à l'OMPI d'apporter sa contribution à la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) au moment ou les Nations Unies sont en train de poser les jalons de l'Agenda post 2015", estimant que "c'est là un objectif à la fois réaliste et réalisable". A cette occasion, M. Benyamina a rappelé que l'Algérie "s'est engagée, depuis le début du processus de négociation de cet instrument, tant en sa qualité de membre de l'OMPI et de coordonnateur du Groupe africain que par son appartenance aux différents cadres régionaux, à œuvrer à l'émergence d'un consensus devant éliminer les barrières sociales et juridiques qui s'opposent à l'accès au savoir de cette frange aussi importante de la population mondiale, estimée à 314 millions de personnes selon l'OMS". Il a affirmé que la conclusion de ce traité "confortera l'obligation légale de traiter les personnes aveugles, les déficients visuels et les personnes avec des difficultés de lecture de textes imprimés non seulement comme des victimes ou membres d'une minorité, mais comme des sujets de droit, aux droits clairement définis". Il a estimé qu'"il ne s'agira pas seulement d'aider à leur épanouissement individuel" mais aussi "de les aider à contribuer au développement de l'environnement et de la société auxquels ils ont le droit de se sentir pleinement intégrés". Il a ajouté que la conférence devrait marquer l'aboutissement de plusieurs années de délibérations en vue d'élaborer un traité qui faciliterait "l'accès" à ces personnes dont 90% vivent dans les pays en développement, "à la connaissance et au savoir dans un format accessible et à un prix abordable". Ce traité est la concrétisation effective de la "Convention des Nations-Unies relatives aux droits des personnes handicapées", adoptée en adoptée en 2006 et qui dispose (à l'article 30) que les lois protégeant les droits de propriété intellectuelle ne doivent pas constituer un obstacle déraisonnable ou discriminatoire à l'accès des personnes handicapées aux produits culturels, a-t-il fait remarquer. En sa qualité de membre actif de l'OMPI, l'Algérie, a-t-il affirmé, reconnaît et soutient l'idée d'un système international des droits d'auteur qui soit à la fois crédible et respecté "sans lequel les droits de nos artistes, de nos auteurs, de nos créateurs ne seraient pas garantis et protégés à travers lemonde". Il a, par ailleurs, fait observer que l'adhésion de l'Algérie à la Convention de Berne sur la protection des œuvres littéraires et artistiques, ainsi que la ratification en 2013 des Traités sur le droit d'auteur (WCT) et sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), témoignent de son "adhésion indéfectible" et de "son action concrète en faveur de la protection des droits d'auteur et droit connexes" à laquelle elle reste "fermement attachée". L'Algérie demeure "convaincu que des exceptions aux droits d'auteurs en faveur des malvoyants sont le seul gage pour assurer leur intégration effective à la société, leur accès à l'information et ainsi contribuer au développement économique, social et culturel", a-t-il déclaré. Selon lui, "ces exceptions permettront aux producteurs de documents en version modifiée à partager leurs ressources, et à réduire l'écart exorbitant entre la quantité de documents disponible pour les voyants et celle dont disposent les aveugles", en notant que "sur le million d'ouvrages publiés chaque année dans le monde, moins de 5% le sont dans des formats accessibles aux déficients visuels". Enfin M. Benyamina a déclaré qu'"il est crucial" d'aboutir à un traité qui réponde réellement aux besoins spécifiques de ces personnes "si nous ne voulons pas considérer cette frange de la population comme laissée pour compte". D'autre part, lors du débat général, M. Benyamina, a, au nom du Groupe africain dont l'Algérie assure la coordination au sein de l'OMPI, prononcé une allocution, en mettant l'accent sur l'importance de ce traité qui devrait établir un lien direct entre le système international de la propriété intellectuelle et les efforts de la communauté internationale en faveur des droits de l'Homme par la mise en place des exceptions aux droits d'auteur en faveur des malvoyants dont le nombre dépasse les 27 millions en Afrique. Environ 600 délégués représentant 186 Etats membres de l'OMPI, six organisations intergouvernementales (OIG) et 46 Organisations non-gouvernementales (ONG) participent aux travaux de cette conférence qui s'étalera jusqu'au 28 juin. Les travaux de cette conférence auxquels prend part le directeur-général de l'OMPI, Francis Curry, ont débuté par l'élection de son président, sur proposition de l'Algérie, en la personne de Mustapha El-Khalfi, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement marocain.