Avec la fermeture par arrêté de wilaya des marchés à bestiaux dans la région du Hodna, depuis Ain El Melh à Amedjdel en passant par Ain LAhdjel, Ouled Madhi et Bensrour, pour prévenir la propagation du nouveau coronavirus, beaucoup de citoyens dans cette région à vocation pastorale pluriséculaire disent être dans l'expectative à quelques jours de la fête de l'aïd El Adha. La fermeture des marchés à bestiaux a plongé dans l'expectative beaucoup de citoyens qui ont affirmé à l'APS attendre une éventuelle nouvelle décision officielle sur le sacrifice du mouton, alors que certains ont exprimé leur détermination à accomplir ce rituel religieux en dépit de la pandémie, arguant qu'ils sont habitués à acquérir le mouton du sacrifice auprès d'éleveurs, amis et parents. Mohamed Missaoui, un des éleveurs les plus connus dans la région et qui possède des milliers de moutons, appuie les dires de ces citoyens mais relève que ceux qui faisaient leur commande habituellement quelques semaines avant la fête ne se sont pas encore décidés. Connaisseur des marchés des bêtes, l'éleveur ajoute : "ce qui rend plus difficile la vente des moutons cette année outre la fermeture des marchés, c'est la difficulté de se déplacer". En temps normal, le cheptel de Missaoui est aisément écoulé dans les wilayas limitrophes et atteint sans grande peine Alger, selon ses propos. Djamel Mizzi, syndicaliste du secteur de l'éducation avoue de son côté "guetter" une décision officielle fixant les mesures préventives pour la réouverture des marchés à bestiaux dans les prochains jours, et explique que beaucoup de ses collègues et connaissances, y compris les employés et les enseignants à revenu moyen, attendent que l'Aïd s'approche davantage pour prendre la décision d'acheter le sacrifice ou non. Les ouvriers journaliers et certains artisans cherchent, pour leur part, les moyens de collecter l'argent nécessaire à l'achat du mouton et examinent les possibilités qui s'offrent à eux pour son acquisition auprès d'un éleveur qui accepterait un paiement étalé sur plusieurs mois. A ce sujet, Mohamed Meliani, fonctionnaire à la chambre régionale de l'artisanat de M'sila, chargé du dossier des artisans affectés par les répercussions du confinement sanitaire partiel, a indiqué que pour beaucoup d'artisans, il est très difficile cette année, voire impossible, de payer cash le mouton du sacrifice d'autant plus qu'ils recouraient auparavant à l'achat par facilité de paiement. Djamel Mizzi et Mohamed Meliani s'interrogent également sur le manque de liquidité qui se fait sentir ces derniers jours à M'sila et lequel, de leur avis, accroît la difficulté d'acquérir un mouton pour la fête. L'absence de clients des autres wilayas aggrave la situation Depuis l'apparition de la pandémie, les éleveurs de M'sila ont cessé de recevoir leurs traditionnels clients qui viennent dans d'autres wilayas à l'instar d'Alger, Bouira, Boumerdès et Blida. Les éleveurs locaux habitués en cette période à installer des points de vente à travers les cités d'autres wilayas particulièrement Alger, ne l'ont pas fait cette année en raison de la situation sanitaire. Des sources vétérinaires à la direction des Services agricoles (DSA) relèvent que la demande sur les moutons émanant des wilayas voisines est cette année "quai-nulle" du fait du confinement imposé dans les diverses régions du pays. Le confinement partiel décrété dans cinq communes de la wilaya de M'sila, à savoir M'sila, Barhoum, Magra, Sidi Aïssa et Boussaâda, a également sensiblement réduit les échanges et circulation entre ces localités. En dépit de la mévente et de la baisse de la demande non seulement en cette période de fête, mais depuis quatre mois, du fait de la fermeture des restaurants et des réfectoires des écoles et des universités, ceux qui se sont empressés d'acheter des moutons auprès d'éleveurs et revendeurs parlent de "prix fous". Ils relèvent que le mouton cédé l'année passée à 50.000 DA, coûte actuellement pas moins de 60.000 DA. Cette situation marquée par la baisse de la demande et du renchérissement des prix au lieu de leur chute, trouve sa réponse d'abord dans la cherté des prix des fourrages et leur pénurie, comme avancent chaque année les éleveurs, ensuite dans la persistance de la période de sécheresse qui leur occasionneraient des charges supplémentaires. Le président du bureau de wilaya de l'association de protection du consommateur, Saâd Bekhti, a quant à lui, déclaré redouter une flambée des prix en cas de réouverture des marchés à bestiaux. Il motive ses appréhensions par la préoccupation des éleveurs de réduire leurs pertes conséquentes à la chute de la demande sur les viandes rouges, en augmentant les prix sans argument convaincant, "si ce n'est le coût élevé de l'élevage". Dans le Hodna, si certains affichent leur détermination à accomplir le rituel du sacrifice, d'autres craignent de ne pas en être capables financièrement. Toutefois, les deux parties s'interrogent sur le devenir de ce rituel si la situation sanitaire se complique.