A toute chose malheur est bon», dit un proverbe populaire. L'affaire Kamel Chikhi, dit «Le boucher», par son ampleur, ses ramifications à l'intérieur et à l'international, la qualité des personnes impliquées, peut provoquer un sursaut salvateur qui peut entraîner la mort d'un système rentier et criminel. Kamel El Bouchi symbolise à lui seul un système de gestion qui, depuis 20 ans, a mis l'Algérie à genoux et gangrené la société de telle façon qu'il lui est difficile de s'en relever. Voilà un homme analphabète, qui n'a pas encore 40 ans, qui réussit à construire un empire bâti sur tout sauf sur l'honnêteté en l'espace d'une décennie. Il a démarré sa carrière par le blanchiment de l'argent du terrorisme que lui ramenait un repenti dont on n'a pas dévoilé le nom. Ce ne serait pas son homonyme Omar Chikhi, lui aussi de Lakhdaria. Ce dernier est le seul survivant avec Layada, le tôlier des 8 criminels qui ont créé le sanguinaire GIA. Arrêté, il n'a jamais été jugé ni condamné, tandis que le tôlier avait d'abord fui au Maroc. Les Marocains, croyant avoir affaire à quelqu'un d'important, ont cherché à l'utiliser mais constatant que ce n' était qu'une coquille vide, ont pratiquement supplié les Algériens de le reprendre. Dans la république de l'impunité, il défie au quotidien ses victimes, tout en s'enrichissant avec la complicité de l'administration. C'est donc grâce au butin des terroristes que Kamel va se lancer, pour aller ensuite poursuivre son ascension dans l'immobilier grâce à des protections, pour terminer surtout dans l'importation de viande de bœuf brésilien et… de cocaïne, tout cela accompagné de financement de mosquées, sans doute pour tromper Le Seigneur. Il est devenu si puissant qu'il a réussi à corrompre plusieurs dizaines de hauts responsables qui lui facilitaient son entrisme. Ne l'a-t-on pas vu à côté d'un général qui conduisait alors que lui se prélassait ? L'homme avait même décidé de se transformer en maître-chanteur. Dans son bureau, il filmait les personnes auxquelles il donnait de l'argent et enregistrait leurs propos. Mais se lancer dans la drogue n'est pas une mince affaire. Le monde entier est aux aguets face à ce trafic et ce n'est pas n'importe qui qui peut jouer au Pablo Escobar. Qui s'y frotte s'y pique. Même si l'Algérie est devenue le pays de l'impunité, elle est obligée de se plier face un environnement international qui est sans pitié pour les trafiquants. C'est ce qui explique la chute du voyou. L'affaire Chikhi dénote du degré de déliquescence atteint par l'Algérie et la grande connexion existant entre l'affairisme, le trafic en tous genres et le terrorisme. Ses complices doivent se tenir le ventre. Si l'un d'entre eux s'approche de près ou de loin de cette «drogue brésilienne», il devra s'attendre à payer un jour ou l'autre. Les Européens et les Américains surtout les pourchasseront où qu'ils se trouvent. Les Etats-Unis sont allés jusqu'à envahir le Panama pour arrêter son président Noriega qui était impliqué dans le trafic de cocaïne vers le territoire américain. Ils sont allés le pêcher jusque dans la Nonciature apostolique où il s'était caché. Son statut d'agent de la CIA ne l'a pas protégé. Les Algériens ne peuvent pas escamoter le dossier Chikhi comme ils l'ont fait avec Chakib Khelil. C'est une affaire qui est une véritable bénédiction pour le pays. Elle a mis totalement à nu le système et n'a pas encore tout révélé. L'affaire suit son cours et d'autres secrets verront incontestablement le jour. Malheur aux complices.