A travers mes diverses lectures sur le mouvement nationaliste algérien, j'ai constaté que la majorité des auteurs insistent sur l'islam comme élément essentiel de la prise de conscience du fait colonial. Loin de moi l'idée de remettre en cause ce fait, j'ai poussé plus loin mon regard sur l'histoire. Depuis l'âge des temps reculés, notre peuple n'a cessé de se battre pour sa liberté. Notre patrie, Tamazgha (L'Afrique du Nord) n'a cessé d'être une cible géostratégique pour les puissances du moment et nous n'avons jamais baissé les armes pour recouvrer notre liberté. Des Romains aux Byzantins, des Arabes aux Turcs en passant par les Français, notre peuple n'a jamais renoncé à sa liberté. Nous pouvons vous interroger sur l'origine de ce caractère… Nous sommes issus d'un peuple légendaire dont le roi est cité dans la Torah, la Bible, l'Ancien testament comme dans le Coran (sourate Isra). Chachnaq est le roi légendaire qui a vaincu le plus sanguinaire des pharaons. Nous avons régné durant plus de deux siècles sur la rive sud de la Méditerranée (-945 à -715). La survie en tant que peuple amazigh, en sauvegardant notre langue et culture, est un fait unique dans l'histoire de l'humanité. Nous n'avons jamais abdiqué devant tous les colonisateurs de tout bord, nous n'avons jamais renoncé à notre identité. Voilà d'où vient cette soif de liberté. On s'appelle Imazighen (hommes libres). Aujourd'hui, nous faisons face à une situation abracadabrante. Des Amazighs, assimilés arabo-islamistes, veulent imposer leur hégémonie sur l'ensemble du peuple algérien, berbérophones y compris. Pas uniquement en Algérie, car le Maroc, la Tunisie et la Libye sont dans la même situation. A croire que l'Afrique du Nord est toujours sous occupation. Tentons d'analyser la situation afin de comprendre comment nous en sommes arrivés là. Il semblerait que la personnalité de l'Africain du Nord est multiple. Les marqueurs de la cette personnalité sont globalement au nombre de quatre : – l'amazighité ; – l'arabité ; – l'islamité ; – et l'héritage colonial. Ces marqueurs vont plus ou moins imprégner la personnalité de l'Africain du Nord. L'amazighité étant plus ou moins innée (héréditaire), elle va imprégner de manière plus importante les amazighophones. Pour l'Algérie, depuis 1962, l'arabité et l'islamité vont marquer une avancée très importante par les diverses politiques d'arabisation et d'islamisation de la population. Des résistances importantes verront le jour dans les régions à forte densité amazighe (kabyle, chaouia et mozabite). Il faut dire que cette idée d'un monde arabe est un fait colonial. En effet, c'est Napoléon qui a rêvé d'un monde arabe sous son contrôle absolu. La France crée, en 1842, le bureau arabe en Algérie. Cette idée d'un monde arabe sera reprise par les divers mouvements de gauche arabes. Et les mouvements islamistes vont s'approprier l'idée en la colorant d'islam et en s'attaquant à tous les mouvements de gauche de ce monde dit arabe. L'héritage colonial, avec son lot de réactions négatives imprégnées dans le subconscient de la population, telles que le non-respect de tout ce qui appartient à l'Etat et croyant toujours que l'Etat est l'ennemi à titre d'exemple, le baylek turc reste un vocable toujours présent dans toutes les régions d'Algérie. Ce que le pouvoir algérien n'a jamais réussi à effacer. Mais aussi le bénéfice de l'universalité des principes tel que les droits de l'homme qui vont être intégrés par une grande majorité de la population post-indépendance. Depuis des siècles, aucun occupant n'a réussi à imposer sa langue au peuple amazigh. Ne pas comprendre cette évidence est une course vers l'inconnu. Aujourd'hui, il est clair qu'il y a une rupture entre les régions amazighophones et le reste de l'Algérie, la Kabylie en particulier. Ces marqueurs de personnalité vont engendrer trois grands courants politiques antagonistes, avec des projets de société diamétralement opposés : – les progressistes, courant éparpillé entre divers partis, concourent pour une société laïque avec séparation des pouvoirs. Les progressistes sont à l'origine de la guerre de libération en 1954. Le groupe des «9» est composé d'hommes à majorité amazighe et progressistes ; – les pseudos nationalistes, courant au pouvoir, FLN, RND et les micro-partis satellites, (les khobzistes) concourent pour le maintien de ce régime hybride, sans contre-pouvoir et dont l'objectif principal est de garder la mainmise sur la repartion de la rente pétrolière avec un colorant islamiste, le Hamas. Ce groupe est principalement composé des planqués de oujda, armée des frontières largement phagocytée par près de 14 000 harkis à la solde de la France et tous les opportunistes pseudos révolutionnaires de la dernière heure ; – Les islamistes, courant très conservateur, concourent pour la création d'un Etat islamique avec, à la clef, l'application de charia. Ce groupe n'a rejoint la guerre de Libération que très tardivement (1956) avec les ulémas qui étaient pour une assimilation pure et simple et Taayuch. La situation actuelle, illisible, sans opposition réelle, sans projet alternatif visible, avec des egos surdimentionnés des responsables des partis politiques dont l'objectif est d'exister médiatiquement et politiquement sans un apport pour une alternative lisible commune. Si on veut sauvegarder l'unité nationale, et éventuellement ouvrir des possibilités d'élargissement à nos frères des autres Etats de l'Afrique du Nord, nous devrions envisager le passage à un Etat fédéral, soit un passage vers une seconde République. Raisons : – il permet la sauvegarde de l'unité nationale ; – il permet la mise en place d'une démocratie participative dans les Etats composant la fédération ; – il permet la mise en place de politique civilisationnelle typique à chaque Etat de la fédération… – il permet le lancement d'une nouvelle approche régionale d'intégration, tout en sauvegardant les spécificités de chacun. Le départ est donné par la Mauritanie avec la Constitution de 2017 qui a permis la création de conseils régionaux, un pas vers le fédéralisme. En partant des 6 Wilayas historiques, nous pouvons construire un Etat fédéral respectant les principes d'alternance, de contre-pouvoir et de démocratie directe. La mission principale est la transition démocratique et ouvrir les champs politiques en assurant une chance égale à tous. Pour la mise en place de ce changement radical, il est indispensable d'avoir une période de transition d'au moins 3 ans, dirigée par une Assemblée constituante. Toutefois, les partis politiques doivent faire un effort considérable pour s'unir autour de programmes et non autour d'hommes. Le zaïmisme doit être banni de nos pratiques. Globalement, trois grands courants existent en Algérie, comme dans toute Tamazgha. – Les progressistes – Les pseudos nationalistes Et les islamistes. Dans chaque parti politique des tendances plus ou moins cohérentes se disputeront le leadership. Là sont véritablement les enjeux démocratiques et les jeux politiques. Toutefois, ce passage vers une nouvelle gouvernance doit s'accompagner par une mise en place d'un pouvoir judiciaire indépendant et de la libéralisation de la presse et de la parole. Cette vision est futuriste, elle concerne toute l'Afrique du Nord. Ce siècle est le siècle de l'Afrique, il sera, comme nous l'appréhenderons, en conquérants ou en esclaves. Si nous laissons les nations dominantes du moment nous dicter notre approche, nous resterons esclaves à jamais, à nous d'imaginer notre avenir en commun pour être une nation qui compte dans les enjeux si innombrables de demain. Ce changement doit s'accompagner surtout par une profonde mutation sociétale, par une mise en place d'une nouvelle approche éducationnelle basée sur l'acquisition du savoir scientifique, pour être le support des nouvelles politiques économiques à long terme. On ne peut plus se permettre de naviguer à vue, sans un projet économique à court, moyen et long termes. Restructuration de l'économie algérienne Sur le plan économique, l'Algérie accuse un retard considérable dû à une mauvaise gestion depuis plusieurs décennies. Le manque de stratégie à long terme et la course à l'enrichissement rapide des responsables politiques va engendrer une économie excentrée tournée vers l'importation. Le manque de rigueur dans la gestion budgétaire et une gabegie des finances de l'Etat vont créer un déficit chronique de tous les comptes de l'Etat. Cette situation est due, en grande partie, à la hausse des prix du pétrole durant près de quinze années consécutives. La masse d'argent engendrée par cette hausse a aiguisé l'appétit de nos responsables politiques. Au lieu d'investir dans des projets structurant l'économie, ces maffieux vont se tourner vers l'importation. 99% de ce qui se consomme en Algérie vient de l'étranger. La manière de procéder de cette maffia est très simple. Des lignes d'importation via des licences vont être réparties entre généraux et grands responsables politiques sous couvert de prête-noms (l'oligarchie). La remise en cause de ces licences est pratiquement impossible dans l'état actuel des choses. C'est la remise en cause d'intérêts protégés. C'est pour cette raison principale que le gouvernement actuel n'arrive pas à supprimer l'importation de certains produits de luxe non indispensables à la consommation de la population. Pour arriver à mettre en place une politique de restructuration de l'économie, il faut connaître avec exactitude le degré de déliquescence des comptes de l'Etat. Toutefois, il est indispensable d'annoncer la couleur. À court terme Une politique d'austérité, dont l'importance sera égale aux déficits de l'Etat. Pour que le peuple comprenne et accepte cette austérité, il faut commencer par analyser la pyramide des salaires et débuter par niveler vers le bas les salaires les plus élevés. Il ne s'agit pas de baisser le salaire de nos concitoyens, mais plutôt ceux du président, du Premier ministre, des ministres, des députés, des sénateurs… L'idéal serait même d'augmenter le SMIG. Supprimer l'ensemble des dépenses de prestige de l'Etat à tous les niveaux : présidence, ministères wilayas, daïras… Réorientation des budgets de fonctionnement. Plus de budget pour acheter la paix sociale. La grande nouveauté de ce budget est de mettre en place une politique de réappropriation des savoirs scientifiques avec des investissements à la hauteur des enjeux de demain. La création de laboratoires scientifiques (informatique, nouvelles énergies, en particulier le solaire et l'agronomie…) va accompagner notre politique agraire à long terme. Le détail de ce programme est à étudier avec précision pour être sûr que tout peut être financé. La modernisation du système bancaire est indispensable. Mettre les banques au niveau des standards internationaux et permettre la création d'un tissu bancaire privé. Lancer un appel à nos cerveaux qui vendent leur matières grise dans le monde et qui ne demandent qu'un changement des pratiques bureaucratiques qui sévissent au pays pour venir s'investir corps et âme pour leur patrie. Récupérer nos éléments de grande valeur mis à l'écart par ce régime. Cette austérité permettra de remettre l'économie algérienne sur des principes de fonctionnement justes et assurer à l'Etat de récupérer des revenus (impôts, TVA …) qui doivent suffire à son fonctionnement sans toucher aux revenus du pétrole. Une grande partie de ces revenus pétroliers vont servir, malheureusement, à l'importation de biens de consommation de masse durant quelques années encore. Ces importations seront complètement réorganisées et de grandes entités étatiques verront le jour pour mieux cibler les produits de consommation indispensables à la population. Certaines licences d'importation seront octroyées uniquement aux industriels pour leurs matières premières. La préparation des politiques agraires à long terme doit s'accompagner d'une grande sensibilisation de la jeunesse quant aux métiers de ce secteur porteur d'un avenir certain pour eux et pour la nation. À moyen terme A moyen terme, la mesure phare à mettre en place est le changement radical de la monnaie. Le dinar deviendra Assurdi. Ce changement de monnaie aura pour objectif principal la mise à mort de l'économie parallèle qui gangrène l'économie nationale. Et lancer une étude d'envergure pour le développement du réseau ferroviaire. Accentuer le projet solaire du Sahara pour devenir un fournisseur incontournable d'électricité verte pour l'Europe et le Subsaharien. À long terme Trois grands projets à mettre à l'étude très rapidement. Le monde souffre d'un grand problème de réchauffement climatique, et cela engendre des taxes carbone dont le montant est pharamineux. Nous pouvons proposer à l'ONU de créer un nouveau poumon pour la Terre par la création d'une forêt «du monde» sur les Hauts-Plateaux. Il y aura une surface de 10 000 km2. La taxe carbone financera ce projet. Dans la même lignée que cette forêt, un autre projet de plus grande envergure, à savoir quatre forêts d'arbres fruitiers de part et d'autre de la forêt. Ce projet sera conjointement financé par l'ONU et l'Europe. Pour l'Europe, nous garantissons le maintien comme ouvriers l'immigration subsaharienne. Le gros problème actuel et à venir pour l'Europe est l'immigration subsaharienne, elle n'arrive plus à faire face à ce phénomène qui prend des proportions de plus en plus inquiétantes. C'est un accord avec l'Europe sur l'octroi de travail aux migrants subsahariens contre le financement de ce projet d'arboriculture. Plusieurs projets agricoles seront à l'étude, à savoir : élevage de bovins et ovins ; céréaliculture : blé, orge, colza… A ces projets agricoles vont se greffer des projets industriels de transformation, de conservation… des projets à l'infini. Avec ces projets d'envergure, nous lançons une nouvelle étape pour montrer au monde notre génie et notre capacité à nous adapter et à améliorer notre niveau de vie et celui de tous nos fédérés. Une nouvelle capitale fédérale L'objectif à long terme est l'intégration de nos voisins de l'Est, l'Ouest et le Sud dans l'Etat fédéral. La politique d'intégration des salariés immigrés agricoles est primordiale, elle doit être équitable et juste. C'est notre meilleure façon de vendre notre projet à nos voisins et au monde. La création d'une capitale fédérale répond à un double enjeu : géopolitique et diplomatique. Diplomatique Les capitales des pays voisins comprendront qu'elles n'intègrent pas l'Algérie, mais un nouvel Etat dont les populations auront une place aussi importante que tout un chacun. Ils intégreront un projet et non un Etat. Géopolitique Notre force diplomatique et politique ira grandissant au fur et à mesure que nous avançons dans l'équité entre tous les peuples de la Fédération et que nos institutions futures assurent un Etat de droit sans faille. A terme, nous devons travailler pour rajouter 2 droits la Convention des droits de l'homme. 1 : Chaque individu de l'Etat fédéral doit être nourri et doit manger à sa faim. 2 : Le droit à un toit décent pour tout un chacun. Le choix d'une zone étendue pour recevoir cette capitale doit être étudié avec soin et doit répondre à plusieurs contraintes : énergétique, distance avec les capitales des Etats fédérés… Surtout préparer les axes routiers et de communication avec le reste du monde. Déterminer à l'avance l'espace qui va accueillir le méga aéroport. Ceci est mon rêve ! Je viens d'en planter la première graine Et je sais qu'il adviendra ! – Hamid Challal – est un ancien enseignant universitaire chargé de cours à l'Institut d'économie de l'université de Tizi Ouzou, puis directeur des œuvres universitaires dans la même université au début des années 1990. Né en mars 1957 à Imessouhal, dans la wilaya de Tizi Ouzou, il obtient en 1983 un DEA en politique générale des organisations de l'université Paris Dauphine et un doctorat en Algérie dans la stratégie des entreprises publiques algériennes en 1987. Membre actif du mouvement berbère de 1980 et représentant, à l'époque, des étudiants de l'Institut d'économie, il décide de quitter, sous les menaces, l'Algérie en 1993. En France, il travaille, six ans plus tard, comme assistant en économie à l'université Paris 8 et comme collaborateur expert-comptable. Hamid Challal est membre fondateur depuis quelques années de Riposte Internationale, une ONG créée à Paris pour la défense des libertés dans le monde, notamment en Afrique du Nord et de l'Observatoire nord-africain pour la liberté de la presse depuis quelques mois. En dehors de ses combats, il est aussi gérant de station-service à Paris, et ce, à ce jour.