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1997 : L'année Madagascar
Publié dans El Watan le 03 - 09 - 2005

Il n'y a pas l'ombre d'un doute, la fin de la Seconde Guerre mondiale a sonné le glas des mépris coloniaux. La présence coloniale va être sérieusement mise à mal par les implications du nouvel ordre international, esquissé par de nombreuses déclarations ainsi que de conférences, et annonciateur d'un monde de liberté et d'égalité des peuples.
En payant un lourd tribut à la cause de «monde libre» contre le nazisme, Algériens et Malgaches ont cru, non pas naïvement mais à bon droit que le vent de la liberté avait soufflé pour tous les peuples encore sous le joug colonial et que les puissances victorieuses allaient tenir leurs promesses en leur ouvrant la voie vers l'émancipation. N'étant pas à un parjure près et faisant preuve d'une honteuse ingratitude, le colonialisme français a répondu à leurs aspirations légitimes par de terribles massacres, une fureur génocidaire qui a remis en cause l'idée suivant laquelle cette «Deuxième Guerre mondiale devait consacrer le triomphe d'un monde de liberté sur la barbarie fascite». Plus de 45 000 morts en Algérie pendant le mois de mai 1945 et 100 000 victimes à Madagascar entre mars 1947 et décembre 1948, prix d'une représsion systématique qui révèle la volonté irréductible de la France de garder intact son empire, au mépris du droit et du bon sens.
La défaite de la France en 1940 n'a pas mis fin à son hégémonie coloniale et l'occupation de son territoire par l'Allemagne ne l'a pas empêchée de continuer à pratiquer hors de l'Hexagone sa politique d'exploitation des peuples de l'empire.
Faisant «l'économie du sang français», elle a imposé au peuple malgache comme au peuple algérien l'effort de guerre contre les forces de l'axe. N'a-t-on pas compté, en novembre 1944, 134 000 Algériens et 10 000 Malgaches dans les rangs des troupes de «la plus grande France» ? A cela se sont ajoutés le travail forcé, les réquisitions et l'impôt du riz, autant de sacrifices consentis par les populations de la grande île durant les années du conflit et qui n'ont fait qu'accentuer leur mécontentement en même temps que leur ressentiment à l'égard des Français. En 1942, les Anglais ont occupé l'île et ont commencé à y pourchasser les vichystes. Dans les thèses officielles françaises, on essaiera de faire admettre que ce sont eux qui ont apporté leur soutien aux leaders nationalistes et favorisé la création des sociétés secrètes. Une version que justifie l'implacable rivalité existant entre les deux puissances coloniales et qui n'entend pas moins soutenir l'idée selon laquelle toute prise de conscience nationale n'est pas le fruit d'une maturation interne mais liée à un facteur exogène. Quant au phénomène des sociétés secrètes, si la Jina a été fondée en 1943 par Monja-Joana, celle du Panama a été créée par Lucien Andriamiseza en 1941, bien avant l'arrivée des Anglais sur la grande île. C'est d'ailleurs0 ce que l'on a voulu faire croire en ce qui concerne l'Algérie, en imputant la radicalisation des revendications nationalistes au passage des Américains en Afrique du Nord. Pendant les dernières années de la guerre, les sociétés secrètes ont habilement «travaillé» les masses, leur insufflant la haine des «chiens de Français» et les préparant au recours à la violence pour délivrer la terre sacrée des ancêtres.
Le 11 février 1946, le Mouvement démocratique de la révolution malgache (MDRM) voit le jour à Paris. Il n'en fut pas autrement pour le mouvement indépendantiste algérien dont les premières formations politiques sont nées en France, au sein de l'émigration, l'Etoile nord-africaine en 1924, à Paris et le Parti du peuple algérien à Nanterre, en 1937, échappant ainsi à l'atmosphère étouffante du pays.
Joseph Raseta, Joseph Ravoahangy et Jacques Rabemananjara, les trois principaux fondateurs du MDRM sont persuadés d'obtenir l'indépendance de leur pays par les voies légales et pacifiques. Plusieurs déclarations et documents, dont la Charte atlantique, ont promis l'émancipation aux peuples encore assujettis, et c'est l'avènement de cet ordre nouveau qui va servir de toile de fond à la revendication des leaders nationalistes, députés à la première constituante de novembre 1945 et réélus à la seconde en juin 1946. Leur parti a connu un succès spectaculaire et les Malgaches de toutes les origines y ont massivement adhéré, un peu comme chez nous pour les AML dans les années 1943, 1944. Madagascar doit devenir un Etat libre, associé à la France. Le MDRM a demandé à cette dernière de restituer à la grande île sa souveraineté, déposant à l'Assemblée française, un projet de loi devant faire de Madagascar un Etat indépendant avec son gouvernement, son parlement et son armée. L'administration coloniale n'y a donné aucune suite. Quelques mois plus tard, en septembre 1946, le ministre socialiste des colonies Marius Moutet y a répondu en annonçant la lutte contre l'autonomisme malgache. Dans un paysage social gravement perturbé par l'accentuation du pillage colonial en vue de soutenir l'effort de guerre français, des émeutes suives de grèves vont éclater, poussant l'Administration à s'en prendre aux élites Les prisons vont ainsi se remplir de militants nationalistes. Pour mettre fin aux troubles, des réformes ont été décidées entre 1945 et 1946. En effet, devant la mobilisation massive du peuple malgache pour son indépendance, on lui a attribué – comme ce fut le cas pour l'Algérie – un certain nombre de droits, et on a réformé timidement les structures. De toute évidence, le colonialisme n'a lâché du lest que pour mieux perdurer. La suppression de l'indigénat, l'abolition du travail forcé et la réorganisation de la justice ont été imputées à l'action militante du MDRM dont le prestige a été considérablement rehaussé. En janvier 1947, il a remporté la majorité des sièges aux élections provinciales, et ce, malgré les multiples fraudes dont a été entaché le scrutin. C'est le même scénario qui est reproduit par l'administration coloniale en Algérie pour barrer la route aux nationalistes à l'Assemblée algérienne en 1951. Quand l'insurrection a éclaté, le MDRM en est rendu responsable. Ses militants sont pourchassés, emprisonnés et le parti est dissous. Ils ont eu beau désavouer le mouvement insurrectionnel, à l'instar de certaines personnalités du mouvement réformiste algérien qui se sont démarquées des évènements du 8 Mai 1945 et lancer un appel au calme par le biais d'un télégramme mais sans le moindre succès. Pis encore, le document est retourné contre eux comme pièce à charge. Les autorités coloniales diront qu'il constituait «le sens convenu» d'un ultime feu vert à l'adresse des insurgés, sans pour autant apporter une quelconque preuve pouvant étayer leur thèse, pour le moins machiavélique lorsqu'on sait que nos députés sont convertis à l'idée d'une autonomie par étapes et résolus à mener une action légale pour l'obtenir. L'insurrection ne pouvait autrement que torpiller leur stratégie. En réalité, les vrais éléments à mettre en cause dans ce que l'on a appelé les «troubles» de Madagascar, sont à rechercher ailleurs que dans le MDRH. En effet, l'action résolument légaliste des chefs de ce parti ne pouvait s'accommoder du recours à la violence, et ce sont plutôt les sociétés secrètes qui y ont préparé les masses. Elles ont réussi à noyauter le MDRM qui a servi de couverture légale à leur propagande, alors que le prestige de ses chefs qui étaient en même temps députés a pu être exploité au service de leur propre stratégie. Pour les leaders des sociétés secrètes, le dernier espoir d'une indépendance pacifique s'est évanoui quand la guerre d'Indochine a éclaté, alors que Ho Chi Minh voyait à l'époque «le salut dans l'union avec la France» et invitait un des chefs du MDRM à emprunter le «long chemin de patience et d'épreuves». Donc pour eux, si la France a refusé l'indépendance à Ho Chi Minh et au Vietnam, pourquoi l'Occorderait-elle aux Malgaches ? Ils sont désormais convaincus que seule la lutte armée est à même de leur ouvrir la voie vers l'affranchissement du joug colonial. Samedi 29 mars 1947, lorsque le signal de l'insurrection a été donné, l'effet de surprise fut total. Les troupes coloniales ont mis de longs mois pour reprendre en main la situation dans l'île. Une effroyable répression s'est abattue sur les insurgés estimés à quelque 20 000 hommes. L'état de siège est institué sur la côte est et les contingents militaires sont triplés. Les colons se sont, pour leur part, regroupés en milices et se sont mis au service de l'armée. Comme à Sétif, Kherrata et Guelma, ils participent à la chasse à l'homme et perpétuent les pires atrocités. On viole, on assassine. Les suspects sont sommairement executés ou lâchés vivants des avions en vol. Les maisons sont incendiées, les récoltes détruites. Au cours du mois d'août 1947, l'insurrection a commencé à montrer des signes d'essoufflement en raison du manque d'armement. Les bombardements soutenus et les incendies auxquels ont été soumis les maquis et les forêts, se greffant sur la faim, l'épuisement et la démoralisation, ont fini parvenir à bout du soulèvement. Décembre 1948, l'insurrection est écrasée. Certains chefs ont réussi à prendre la fuite, alors que d'autres ont été soit capturés, soit tués. Acculés, les insurgés n'ont d'autre choix que de déposer les armes et de se rendre. Bilan de cette effroyable répression : 100 000 morts. Des milliers parmi ceux qui ont échappé aux massacres se sont retrouvés parqués dans les camps de concentration. Ces tragiques évènements sont longtemps restés méconnus des Français de métropole et de l'opinion internationale et leur évocation aujourd'hui, par certains historiens français, même si elle peut être considérée comme un pas courageux franchi sur le chemin de la décolonisation de l'histoire, elle n'en demeure pas moins empreinte de paternalisme et incapable de se défaire des relents de subjectivité. De plus, elle reste incomplète quant à son approche, limitée à la narration des faits sans poser les vrais problèmes, tels que le phénomène du génocide et ses implications…
Que ce soit pour les massacres des populations en Algérie ou bien à Madagascar, il s'agit réellement de fureur génocidaire, et c'est à juste titre que maître M'Bemba dira : «… dans ce débat sur la notion de crimes contre l'humanité, il est bon que ce soit la France qui apporte une contribution essentielle. Si vous restez en retard, vous ne pourriez garder votre place de défenseurs des droits de l'homme à la tête des Nations.»
Fondation du 8 Mai 1945


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