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Opéra, un public en quête de culture
Publié dans El Watan le 22 - 12 - 2005

Le Centre culturel italien a eu la lumineuse idée de gratifier les centaines de mélomanes algériens présents d'un récital intitulé Echos de la Scala et donné par deux sopranos, un ténor et un baryton. Les quatre chanteurs ont été formés à l'Académie de perfectionnement pour les chanteurs lyriques du théâtre de la Scala de Milan, fondée par le maestro et chef d'orchestre (ex-prodige), Ricardo Muti. L'Académie a pris le relais des Cadets de la Scala, lancé au début des années 1950 par le grand chef et compositeur Arturo Toscanini qui dirigea pendant de longues années l'orchestre de la Scala entre 1898 et 1920. Des extraits de Donizetti et Puccini, entre autres, ont été proposés en première partie de spectacle, tandis que l'après-entracte a été entièrement consacré à Giuseppe Verdi. Le lieu était relativement froid pour ce type d'exercice vocal, mais la chaleur du public compensait largement cette froidure. Surtout pour les chanteurs qui semblaient un peu surpris et stimulés par l'ardeur des mélomanes et par la justesse des réactions à leurs prouesses vocales. Quel merveilleux public à vrai dire que celui qui remplissait le TNA ce soir-là ! Essentiellement composé de jeunes, ce qui accentue encore sa qualité. Une longue standing ovation de fin a été récompensée par un air de la Traviata de Verdi, chanté en chœur pour des amoureux de la musique comblés.
Est-il permis après cela d'oublier que cette salle avait été conçue pour être un opéra ?
Si des êtres aujourd'hui ont du mal à se remémorer le passé, ce fut une occasion rêvée pour les murs du TNA de ressentir les frémissements des voix glorieuses d'antan. L'incendie qui dévasta l'emplacement actuel du square Port Saïd a curieusement rasé le palais du Sultan Kadim et laissé le champ libre à la construction au milieu du pré-carré colonial, de cet édifice qui fut achevé en 1853. Ce sont surtout les prisonniers algériens qui ont bâti l'opéra avec des pierres de Valence rapportées de France. Chasseriau, architecte orientaliste réputé, dessina les plans, et qui du même coup, laissa son nom à l'opéra d'Alger. En 1880, un incendie (encore un !) permettra à Oudot de remanier la bâtisse sur un mode plus colonial et par la même occasion d'effacer le nom de Chasseriau. L'opéra sera connu jusqu'à l'indépendance comme l'opéra Oudot. D'autres salles à Skikda, à Annaba, à Oran ou à Sidi Bel Abbès avaient complété un réseau remarquable. Les plus belles voix de l'opéra s'y sont illustrées en ce début du XXe siècle dans un mélange de tumulte, de révolte et de beauté artistique. Des légendes vivantes ont chanté pour un public émerveillé à une époque où la télévision n'existait pas encore, et où le théâtre et l'opéra étaient encore à la source du rêve. Parmi ceux qui, médusés, ont écouté les voix divines de la Thébaldi ou du grand Caruzo, il n'y avait pas que des Européens nantis. Il y avait aussi bien des intellectuels algériens nationalistes, qui comme Mahieddine Bachtarzi ou Mustapha Kateb, se sont ainsi forgés une profondeur culturelle qu'ils ont mis au service de leur foi en l'indépendance. On entend, en effet, ça et là quelques esprits chagrins faire la confusion entre culture d'opéra et culture coloniale. Cet amalgame relève à mon sens de la pure ignorance. Assis dans cette salle au milieu de ce merveilleux public sevré de culture, je n'ai pu m'empêcher de penser que mon père, modeste commerçant, mais abonné bien avant 1954 aux geôles coloniales, avait traversé la moitié de l'Algérie pour venir écouter le grand Caruzo qu'il adulait. Est-il besoin de rappeler que l'opéra, né et mûri en Italie, était considéré comme le théâtre du peuple, un peu comme le cinéma muet unifiait des immigrés venus de partout dans l'Amérique d'il y a un siècle ? Faut-il rappeler le rôle anticolonial joué par les représentations de livrets célèbres à la Scala de Milan au moment de la résistance des nationalistes italiens contre l'occupant autrichien ? La salle de la Scala a bien souvent résonné aux cris des protestataires à l'issue, en particulier des premières des opéras de Giuseppe Verdi. Dans les rues de Milan, comme on peut le voir dans le sublime «Senso» de Visconti, les spectateurs sortaient de la Scala en chantant : Viva V.E.R.D.I ! En réalité, ces initiales signifiaient Viva Vittorio. Emmanuele Rei d'Italia, à un moment où le roi du Piémont conduisait la lutte pour l'unité italienne avec à ses côtés un certain Garibaldi.
Cet épisode montre bien que l'opéra a joué un rôle majeur dans la lutte anticoloniale. Preuve en est que lorsque l'Italie fut enfin réunifiée, ce fut un air de Verdi qui fut choisi pour devenir l'hymne national italien. Lorsque Mozart (auquel l'année 2006 sera consacrée) présentait La flûte enchantée, c'était le petit peuple de Vienne qui venait assister aux représentations plutôt que les aristocrates. C'est bien plus tard que l'opéra est devenu un art des élites. Les occasions sont si rares d'entendre chez nous le vrai chant savant. Seul Amine Kouider, dont on connaît l'acharnement à lutter contre l'adversité et l'incompréhension, a su offrir au public algérien de fugaces tentatives de réappropriation de l'opéra, art universel s'il en est, à travers des représentations de Don Giovanni de Mozart ou encore de Madame Butterfly de Puccini. Par-delà les instants de bonheur musical que les quatre chanteurs nous ont offerts, c'est ce public de jeunes femmes et de jeunes gens enthousiastes qui m'a impressionné. J'avais vu Amine Kouider donner une deuxième représentation parce que la salle du Palais de la culture ne pouvait contenir tous les mélomanes venus apprécier la musique universelle. Seule fausse note à cette partition, j'ai rarement vu au milieu de ces jeunes assoiffés de culture, des cinéastes, des peintres, des fonctionnaires ou des responsables de la culture. Oui, nous avons un public en quête de culture, mais cette jeunesse a-t-elle la culture qu'elle mérite ?


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