Oran : clôture de la 14e édition du festival culturel national de la chanson Raï au théâtre en plein air "Hasni Chakroun"    Tout contrat doit évaluer les opportunités et les risques    Bientôt un groupe de travail entre Sonarem et MCC (China Metallurgical Group Corporation)    Vendre la division du travail et le séquençage stratégique    De la nourriture dans les entrepôts attend le feu vert de l'occupant sioniste    Des centaines de centres de santé et de nutrition fermés    Algérie A' : le sélectionneur national libère Akram Bouras    Championnats arabes d'athlétisme (U18) : 18 pays ont confirmé leur participation au rendez-vous de Tunis    CHAN-2024 : Soudan – Algérie Deux formations amies pour une finale    En fort déclin sur les 20 dernières années    Poursuite des recherches d'un porté disparu par noyade    Un parc de bus vétustes qui met les voyageurs à rude épreuve    La grande station de Koudiet Eddraouch à El Tarf entre en production à pleine capacité    Le ministre de la Culture et des Arts préside l'ouverture    « Le raï... entre mémoire, marginalité et modernité », thème d'une conférence à Oran    Célébration du double anniversaire du 20 août 1955-1956    Salon Africa Lounge à Yokohama: le stand algérien suscite l'intérêt des entreprises japonaises    A3+: la solution politique, unique voie pour une paix durable en RDC    Ghaza: des maladies ordinaires deviennent mortelles à cause de la famine    Domestic Airlines: lancement du premier vol Alger-Tamanrasset lundi prochain    Algérie Poste: une nouvelle carte de paiement électronique pour les nouveaux bacheliers    Agression sioniste contre Ghaza: le bilan s'élève à 62.263 martyrs    CHAN 2024: première séance d'entrainement de la sélection algérienne à Zanzibar    De nouvelles réformes législatives pour renforcer la culture et les arts en Algérie    Khenchela : la dépouille mortelle du moudjahid Belkacem Hagass inhumée au cimetière de la commune d'El Hamma    L'avis dans le JO de la France sur la suspension de l'Accord de 2013: Une source du MAE souligne le caractère mensonger de l'assertion française    Haltérophilie/Championnat d'Afrique (cadets/juniors): l'Algérie termine sa participation avec 23 médailles dont six en or    Assainissement: l'ONA lance une campagne nationale de nettoyage des réseaux et canalisations    Lancement de la 5ème édition des caravanes médicales à destination des Hauts Plateaux et du Grand Sud    Secousse tellurique de 3,0 degrés dans la wilaya de Tébessa    Foot/ CHAN-2024 (décalé à 2025): la sélection algérienne à pied d'oeuvre à Zanzibar    Khenchela: Ouverture de la 2ème édition du festival culturel de la chanson et de la musique chaouies    Le message du Général d'Armée Saïd Chanegriha    L'ONSC organise une rencontre interactive de concertation à Ouled Djellal    Merad rend visite à des familles de victimes à Biskra et Ouled Djellal et leur présente ses condoléances    Chute d'un bus dans l'Oued El Harrach Les dépouilles mortelles de 3 victimes inhumées au cimetière de Biskra    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



"L'effacement identitaire a commencé bien avant l'exclusion politique post-indépendance"
James McDougall, historien (University of London) :
Publié dans El Watan le 29 - 05 - 2009

Jeune historien britannique, auteur de l'ouvrage History and the Culture of Nationalism in Algeria et d'une thèse sur la conflictualité sociale et l'identité en Algérie entre 1914 et 1954, James McDougall a été invité aux Débats d'El Watan hier à Alger aux côtés de la sociologue Fanny Colonna, directrice de recherche émérite au CNRS/EHESS (France) pour débattre de « Religion, politique, culture : quelle problématique de la nation ? ».
Vous vous intéressez à l'écriture de l'histoire en Afrique du Nord et en Algérie en particulier, à la manière dont est nationalisée l'histoire…
A partir du XIXe siècle, on a commencé à nationaliser l'histoire ; c'est que la nation devient la forme « normale » de communauté politique, on pense donc toute histoire comme celle de la nation. Mais en même temps qu'en Amérique ou en Europe, on se bat pour la liberté du peuple sous l'étiquette de la nation (dans les révolutions de 1848 par exemple), on empêche d'autres peuples d'accéder par cette voie désormais « normale » à leur souveraineté moderne en allant les coloniser. Dans ces cas – en Asie, en Afrique –, la nationalisation du passé va donc servir plus tard, au XXe siècle, les objectifs politiques de la décolonisation, de la libération. Mais c'est aussi, fatalement, une manière de définir l'identité unique d'un peuple alors que cohabitaient dans la société plusieurs cultures. Ce qui, par la suite, implique que l'on efface quelque chose au profit d'une autre. Qu'est-ce qui a été le plus effacé ? La légitimité de la diversité. Ce n'était pas un choix idéologique, mais cela intervenait dans un contexte où il fallait mobiliser l'élément communautaire commun. Dans le cas de l'Algérie, c'est la religion. On pensait alors dans le domaine religieux au principe du tawhid, l'unicité, qui a glissé aussi dans d'autres domaines pour dire l'autorité sociale et culturelle au sens le plus large. On ne pouvait plus avoir plusieurs turuq (voies) ; de même, on ne pourrait plus avoir différentes manières de concevoir la culture ou le passé du peuple, pensé comme un tout. C'est la pensée unique qui est devenue de plus en plus puissante depuis le XIXe siècle, et qui est prônée par ceux qui veulent imposer l'ordre dans des sociétés considérées comme fragiles.
D'où la prévalence du critère religieux…
L'Islam, de par son statut de religion d'Etat – dans l'article 2 de la Constitution algérienne –, est consacré comme le seul registre communautaire compris et accepté par tout le monde. En fait, le critère d'exclusion imposé par le colonialisme a été le fait d'être musulman. Et malgré lui, le colonialisme a fini par l'ériger en tant que critère d'appartenance exclusive à la communauté algérienne. Les juifs - toutes classes sociales confondues - ont été évacués de la communauté algérienne par le décret Crémieux (datant de 1870, ce texte a donné la citoyenneté française aux 37 000 juifs d'Algérie). Une forte conscience raciste chez la plupart des Européens d'Algérie a fait que la plupart d'entre eux, sauf quelques-uns, ne pouvaient s'imaginer dans une nation algérienne (même franco-algérienne) avec l'égalité pour tous. Ce qui fait que le nationalisme algérien, sans forcément procéder d'une conscience religieuse, s'est mobilisé autour du religieux. Par la suite, l'on a réemployé ce code communautaire et mobilisateur pour faire entrer les militants dans l'ordre révolutionnaire qui requiert la discipline. L'effacement identitaire a donc commencé bien avant l'exclusion politique post-indépendance. Cela rend impossible le « vivre ensemble » entre communautés. D'ailleurs, la guerre de libération a renforcé cette dynamique, car il fallait creuser davantage le fossé communautaire qui a été mis en place par le colonialisme.
Mais les nationalistes algériens avaient conscience des diversités culturelles de la communauté…
Bien sûr. Et ils représentaient même cette diversité entre eux, dans leurs propres itinéraires ! Il y avait bien une brochure du GPRA (gouvernement provisoire de la République algérienne (*) adressé aux Européens d'Algérie disant en substance : « Si vous être progressistes, vous êtes avec nous ! » Il était évident que le FLN était conscient que le pays est multiculturel. Mais les dynamiques de lutte, c'était autre chose. Si l'on regarde la révolte de mai 1945, qui exprimait une attente de délivrance presque millénaire, quasi religieuse chez les paysans du Constantinois, on voit bien que la conscience révolutionnaire qui voulait créer une Algérie où il y aurait place pour tous dans une citoyenneté égale sans distinction de race ou de religion coexistait avec deux logiques : le refus de cette possibilité, déjà, chez des Européens, et une solidarité communautaire musulmane chez la masse de la population rurale. Et la doctrine d'une personnalité algérienne unique, arabe et musulmane, évacuée de ses complexités, avait occupé le terrain en tant que définition légitime de la nation chez les oulémas. Ensuite, la religion a ainsi servi de manière commode pour combler un vide idéologique, d'ailleurs difficile de négocier autrement, après l'indépendance.
Le chaos et les migrations
Dans son livre (*), James McDougall explore la question de l'écriture de l'histoire en Algérie. L'auteur évoque la figure de l'historien Ahmad Tawfiq al Madani et se propose d'étudier la production historique de la première moitié du XXe siècle. Il garde en fait une grande liberté dans le choix de ses thèmes et de sa périodisation, puisque le lecteur est amené à suivre la fin de l'empire ottoman, les débuts de la conquête, et que sa réflexion se prolonge jusqu'en 2001. L'émigration de la famille d'al Madani vers la Tunisie permet de rappeler que la migration fut une des réactions possibles à la catastrophe, au chaos provoqué par la conquête française. Il ne s'agit pas encore de l'émigration ouvrière vers la France, qui aura tant d'importance dans l'histoire du nationalisme algérien, mais d'une migration le long de routes anciennes, en direction d'autres régions de l'empire, et de retours sur un soi-même fortement remodelé selon de nouveaux schémas, de nouvelles façons de se penser, de s'écrire et de se dire « Algérien ».
(*) History and the Culture of Nationalism in Algeria, (Cambridge University Press, 2006). (Source. www.armand-colin.com)
(*) Brochure intitulée « Tous Algériens ! », GPRA, Tunis, mars 1961.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.