Le CSJ célèbre le 68e anniversaire de la Journée de l'étudiant    Le discours patriotique du leader d'El-Bina    Lancement de l'inventaire du patrimoine architectural algérien    Faciliter l'activité agricole en procurant l'énergie et les engrais    Coup d'envoi du recensement général de l'agriculture    Une employée juive du ministère de l'Intérieur démissionne en protestation au soutien de Biden à la guerre contre Ghaza    163 gardes à vue et 26 déferrements en justice    Dialogue entre les peuples    Le Mouloudia Club d'Alger 14 années après !    les dates des deux prochaines journées fixées    Belmadi se propose à l'OM    Des sorties pour préserver la santé publique des citoyens    Le budget approuvé    Une personne meurt carbonisée dans un accident de la circulation à Zemmoura    Générale de la pièce «Ed'Diplomassi zewed'ha»    Ouverture du 13e Festival international de musique symphonique    La Coordination des élites algériennes d'outre-mer est née    Réunion à Paris du Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères avec des Chefs de postes consulaires    Clôture du mois du patrimoine: Mouloudji remet les certificats de formation, d'aptitude et d'honneur aux chercheurs    Cyclisme/Tour d'Algérie 2024 (7e étape) : victoire de l'Algérien Ayoub Ferkous    Affaires religieuses: la création de nouveaux grades vise à renforcer les capacités des personnels du secteur    Les agriculteurs et les professionnels appelés à se mobiliser pour assurer le succès du RGA    Algérie-Belgique: signature d'un accord de partenariat en matière de prise en charge médicale    Le RND s'engage à s'ériger en force de soutien au succès de la prochaine Présidentielle    Commémoration de l'anniversaire du bombardement par l'armée coloniale du village Ighzer Iwaquren    Para-athlétisme/Mondial (lancer du disque): Safia Djelal qualifiée aux JP de Paris-2024    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'élève à 35.386 martyrs    15 Palestiniens tombent en martyrs dans un bombardement de l'entité sioniste contre le camps de réfugiés de Jabalia    Elections électorales    Energie: l'Algérie œuvre d'arrache-pied à renforcer le projet du gazoduc transsaharien    UA: adoption des propositions de l'Algérie pour renforcer l'intégration économique continentale    Le CSJ célèbre le 68e anniversaire de la journée de l'étudiant    Le parti de l'UFDS participera à la prochaine élection présidentielle    Journée de l'étudiant: le Mouvement El-Bina organise un rassemblement estudiantin    Feux de forêts: lancement d'une caravane de sensibilisation à Djamaâ El Djazaïr    Ligue 1 Mobilis: le MCA sacré pour la 8e fois, lutte acharnée pour le maintien    Le pouvoir politique US des deux poids, deux mesures….    Palestine. Mieux vaut tôt que jamais    Le droit de massacrer, de Sétif à Gaza    Megaprojet de ferme d'Adrar : « elmal ou Etfer3ine »    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80    Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Ce sang sombre comme les oiseaux du Kilimanjaro
Poésie africaine
Publié dans El Watan le 22 - 07 - 2009

Présentée pour la première fois au public par Léopold Sédar Senghor dans son Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française(1), la poésie africaine d'écriture française n'a cessé, depuis, d'être inventoriée et cataloguée. Dans les années soixante, après l'indépendance de la majorité des Etats africains, M. A. M. Ngaï disait, pour déterminer « les territoires nouveaux » des écrivains et poètes africains : « A l'intérieur des limites géographiques, à une période donnée et dans le cadre d'une génération déterminée, des artistes et écrivains ont communiqué avec la nappe d'images fondamentales qui constituent les cultures nationales en voie d'émergence en Afrique. »(2) Le Sénégal est parmi les premiers africains qui ont vu naître une poésie noire moderne. Son poète Carrière Charles (né en 1928 à Saint Louis) est un pionnier. Sa poésie est surtout intimiste. Elle est écrite sous l'abat-jour. Au lieu d'égratigner la page blanche, sa plume l'adorne d'une dentelle soignée d'italiques : « Grain de pluie posé Comme un baiser au balcon De la mer Calme à la crique Du rocher L'océan de sa langue D'écume Efface tes rides Et vient mourir sur tes cheveux. » (Lettres de Corée - Editions Silex) Mais Léopold Sédar Senghor va bientôt peser de tout son poids « politique » et artistique non seulement sur la poésie sénégalaise, mais aussi sur une bonne partie de la poésie d'Afrique noire (francophone bien sûr). Né le 9 octobre 1906 à Joal, dans une famille de commerçants et de propriétaires terriens, il fait ses études universitaires en France et obtient l'agrégation de grammaire en 1938. « Tourné vers la politique », il fonde, en 1945, le « Bloc démocratique sénégalais » et est élu député du Sénégal. En 1960, il devient le premier président de la République indépendante du Sénégal. La poésie de Senghor est une illustration, mieux, un élargissement artistique de la théorie de la « négritude ». Celle-ci repose sur l'idée que le poète donne le meilleur de lui-même lorsqu'il puise dans les valeurs de sa civilisation. Ainsi, pour le « Négro-Africain » c'est l'image, le rythme – instruments de connaissance du monde – qui garantissent l'authenticité de l'œuvre : « Femme, pose sur mon front tes mains, balsamiques, tes mains Douces plus que fourrure. Là-haut, les palmes balancées qui bruissent dans la haute brise nocturne A peine, pas même la chanson de nourrice Qu'il nous berce, le silence rythmé. Ecoutons son chant, écoutons battre notre sang sombre, Ecoutons battre le pouls de l'Afrique dans la brume des villages perdus. » Cependant, peu à peu, le mouvement « négritude » cède la place à une poésie universelle. Aimé Césaire lui-même (qui a crée le mot « négritude ») tourne le dos au mouvement. Avec la publication des premiers poèmes de Tchicaya Utam'si (né en 1931 à Mpili, Congo), le mouvement « négritude » pousse ses derniers gémissements et s'effondre. En effet, ce poète racé, collaborateur de Patrice Lumumba, qui a vécu de près la tragédie congolaise, domine, avec sa poésie pure et moderne, la production poétique d'après la « négritude ». Poèmes brûlants au verbe syncopé, bousculé, heurté. Œuvre baroque, ses créations poétiques charrient des ingrédients hétéroclites à l'image de l'univers qui contient le poème : « Je serai moi-même la planche de mon salut ! Déjà, le velours brise le silence En ailes d'éphémères Qui neigent sur la lampe d'huile L'horizon trop plat d'ici m'embroche le cœur Si je recule tout est hérissé ! Je ne quitte pas le port le vent aux flancs Mais avec des rafales dans le ventre. » (Le Ventre - Editions Présence africaine) Vient ensuite Jean-Marie Adiaffi de Côte d'Ivoire dont son œuvre se signale par une recherche formelle où la dérision et le jeu verbal tiennent un rôle décisif. Le poète ne dédaigne pas une certaine forme de provocation. Ainsi, les thèmes majeurs de la « négritude » sont ici soumis à une distorsion qui les vide de leur substance : « Mais si là, à l'horizon ne soutenait pas le ciel tombé des nues une nuit de rêves, de bonheur, de réconciliation des séparations, crois-tu que l'algue pavanerait ainsi à même les vagues, à séduire la mer de ses yeux d'algue ? » Parler de poésie africaine n'est pas chose facile. L'Afrique est un continent où chantent les pierres, les arbres, les montagnes, les forêts, les fleuves et les déserts eux-mêmes. Continent de très vieille culture (même si elle est la plupart du temps orale) où les totems, les églises, les statues, les vestiges des ancêtres et les mosquées sont marqués par l'histoire toute de douleur des peuples africains : « C'est dans la douleur que fut engendrée la beauté de la poésie africaine, comme tout ce qui est beau dans ce monde », disait le défunt Fodeba Keïta (1921-1969). Justement, l'assassinat de Fodeba Keïta, qui fut pendu par le dictateur pseudo-révolutionnaire, le défunt Sékou Touré, en 1969, donnera un nouvel élan à la poésie africaine. Les poètes découvrent, à leur détriment, les déceptions des... indépendances. Fodeba Keïta, tué par le sanguinaire Sékou Touré, beaucoup de poètes africains prennent, comme Tchicaya Utam'si en 1961, le chemin de l'exil. Paris sera pour les poètes d'expression française la ville de tous les espoirs. Et pourtant, Fodeba Keïta n'a fait que rendre sous une forme poétique la substance de contes, légendes et épopées de l'empire Manding. Le grand symbole de cette vieille civilisation n'est pour Fodeba Keïta, que le fleuve Djoliba (fleuve Niger dans les autres pays) : « Djoliba ! Djoliba ! Nom combien évocateur !... Descendu des derniers contreforts du Fouta-Djalon, Tu vins t'associer, généreux et fécond, à la vie du paysan de Guinée. « C'est toi qui, à travers d'innombrables méandres, Apportes discrètement à chacune de nos plaines un message de paix et de prospérité. Tu t'es prodigué à cette terre de latérité et de grès Pour que vive toute une race. » (Aube africaine, éditions Seghers, Paris) A partir de 1970, surtout, une nouvelle génération de poètes consacrera ses créations aux « soucis des peuples africains soumis à la dictature de ‘‘leaders'' sans foi ni loi ». (dixit Bios Diallo). Leurs chants et leurs poèmes les plus beaux furent consacrés aux rêves de liberté, de développement et de prospérité des peuples africains nouvellement libérés du joug colonial. Fidjani-Serpos Nouréini (Bénin), Balima Samba Armond (Burkina Faso), Aliou Mohammadou Modibbo (Cameroun), Quentin Ben Mongaryas (Gabon), Abdoulaye Mamani (Niger), Ibrahima Lamine Sall (Sénégal), Nayé Théophile Inawisi (Togo), Kama Kamanda (Zaïre ex-Congo) et bien d'autres que je ne peux citer dans ce bref panorama ont, chacun, leur façon de parler, d'écrire, mais tous disent à leur Afrique : « Si les ennemis t'ont frappée cent fois, nous, nos cœurs sont mille fois meurtris. » (dixit Anouma Joseph de Côte-d'Ivoire). Pour Amela Hilla-Laobé (Togo) : « L'Afrique est la grande patrie sacrée et tout ce qu'elle a souffert, tout ce qu'elle souffre, est passé et passera toujours par le cœur du poète. » Pour Bios Diallo (Mauritanie) : « Malgré sa surface défiant les océans, l'Afrique est plus petite qu'un nouveau-né, plus petite qu'une vieille maman. » Les poètes africains noirs de langue française enveloppent chaque jour leur continent meurtri, mais ô combien chéri, d'un baiser, et, pour ne jamais le perdre, le glissent tout entier dans leurs cœurs. Enfin, terminons, en guise de conclusion, par ces vers du jeune poète mauritanien Bios Diallo : « Que reste par le ciel du jour, Qu'aux yeux la joie laisse des larmes !... Plus rien ne pourra nous barrer la vue, La plaine s'étendra jusqu'au fond de la mer Et du fond de la mer surgiront les montagnes. Lève-toi : Déjà notre tristesse s'élance vers le ciel, Nos routes déjà se confondent. »
Références :
1- puf, paris 1948
2- Revue Europe
3- Anthologie de la poésie d'Afrique noire (d'expression française) Par E. Locha Mateso (Hatier, Paris 1987) D. J.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.