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Ce sang sombre comme les oiseaux du Kilimanjaro
Poésie africaine
Publié dans El Watan le 22 - 07 - 2009

Présentée pour la première fois au public par Léopold Sédar Senghor dans son Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française(1), la poésie africaine d'écriture française n'a cessé, depuis, d'être inventoriée et cataloguée. Dans les années soixante, après l'indépendance de la majorité des Etats africains, M. A. M. Ngaï disait, pour déterminer « les territoires nouveaux » des écrivains et poètes africains : « A l'intérieur des limites géographiques, à une période donnée et dans le cadre d'une génération déterminée, des artistes et écrivains ont communiqué avec la nappe d'images fondamentales qui constituent les cultures nationales en voie d'émergence en Afrique. »(2) Le Sénégal est parmi les premiers africains qui ont vu naître une poésie noire moderne. Son poète Carrière Charles (né en 1928 à Saint Louis) est un pionnier. Sa poésie est surtout intimiste. Elle est écrite sous l'abat-jour. Au lieu d'égratigner la page blanche, sa plume l'adorne d'une dentelle soignée d'italiques : « Grain de pluie posé Comme un baiser au balcon De la mer Calme à la crique Du rocher L'océan de sa langue D'écume Efface tes rides Et vient mourir sur tes cheveux. » (Lettres de Corée - Editions Silex) Mais Léopold Sédar Senghor va bientôt peser de tout son poids « politique » et artistique non seulement sur la poésie sénégalaise, mais aussi sur une bonne partie de la poésie d'Afrique noire (francophone bien sûr). Né le 9 octobre 1906 à Joal, dans une famille de commerçants et de propriétaires terriens, il fait ses études universitaires en France et obtient l'agrégation de grammaire en 1938. « Tourné vers la politique », il fonde, en 1945, le « Bloc démocratique sénégalais » et est élu député du Sénégal. En 1960, il devient le premier président de la République indépendante du Sénégal. La poésie de Senghor est une illustration, mieux, un élargissement artistique de la théorie de la « négritude ». Celle-ci repose sur l'idée que le poète donne le meilleur de lui-même lorsqu'il puise dans les valeurs de sa civilisation. Ainsi, pour le « Négro-Africain » c'est l'image, le rythme – instruments de connaissance du monde – qui garantissent l'authenticité de l'œuvre : « Femme, pose sur mon front tes mains, balsamiques, tes mains Douces plus que fourrure. Là-haut, les palmes balancées qui bruissent dans la haute brise nocturne A peine, pas même la chanson de nourrice Qu'il nous berce, le silence rythmé. Ecoutons son chant, écoutons battre notre sang sombre, Ecoutons battre le pouls de l'Afrique dans la brume des villages perdus. » Cependant, peu à peu, le mouvement « négritude » cède la place à une poésie universelle. Aimé Césaire lui-même (qui a crée le mot « négritude ») tourne le dos au mouvement. Avec la publication des premiers poèmes de Tchicaya Utam'si (né en 1931 à Mpili, Congo), le mouvement « négritude » pousse ses derniers gémissements et s'effondre. En effet, ce poète racé, collaborateur de Patrice Lumumba, qui a vécu de près la tragédie congolaise, domine, avec sa poésie pure et moderne, la production poétique d'après la « négritude ». Poèmes brûlants au verbe syncopé, bousculé, heurté. Œuvre baroque, ses créations poétiques charrient des ingrédients hétéroclites à l'image de l'univers qui contient le poème : « Je serai moi-même la planche de mon salut ! Déjà, le velours brise le silence En ailes d'éphémères Qui neigent sur la lampe d'huile L'horizon trop plat d'ici m'embroche le cœur Si je recule tout est hérissé ! Je ne quitte pas le port le vent aux flancs Mais avec des rafales dans le ventre. » (Le Ventre - Editions Présence africaine) Vient ensuite Jean-Marie Adiaffi de Côte d'Ivoire dont son œuvre se signale par une recherche formelle où la dérision et le jeu verbal tiennent un rôle décisif. Le poète ne dédaigne pas une certaine forme de provocation. Ainsi, les thèmes majeurs de la « négritude » sont ici soumis à une distorsion qui les vide de leur substance : « Mais si là, à l'horizon ne soutenait pas le ciel tombé des nues une nuit de rêves, de bonheur, de réconciliation des séparations, crois-tu que l'algue pavanerait ainsi à même les vagues, à séduire la mer de ses yeux d'algue ? » Parler de poésie africaine n'est pas chose facile. L'Afrique est un continent où chantent les pierres, les arbres, les montagnes, les forêts, les fleuves et les déserts eux-mêmes. Continent de très vieille culture (même si elle est la plupart du temps orale) où les totems, les églises, les statues, les vestiges des ancêtres et les mosquées sont marqués par l'histoire toute de douleur des peuples africains : « C'est dans la douleur que fut engendrée la beauté de la poésie africaine, comme tout ce qui est beau dans ce monde », disait le défunt Fodeba Keïta (1921-1969). Justement, l'assassinat de Fodeba Keïta, qui fut pendu par le dictateur pseudo-révolutionnaire, le défunt Sékou Touré, en 1969, donnera un nouvel élan à la poésie africaine. Les poètes découvrent, à leur détriment, les déceptions des... indépendances. Fodeba Keïta, tué par le sanguinaire Sékou Touré, beaucoup de poètes africains prennent, comme Tchicaya Utam'si en 1961, le chemin de l'exil. Paris sera pour les poètes d'expression française la ville de tous les espoirs. Et pourtant, Fodeba Keïta n'a fait que rendre sous une forme poétique la substance de contes, légendes et épopées de l'empire Manding. Le grand symbole de cette vieille civilisation n'est pour Fodeba Keïta, que le fleuve Djoliba (fleuve Niger dans les autres pays) : « Djoliba ! Djoliba ! Nom combien évocateur !... Descendu des derniers contreforts du Fouta-Djalon, Tu vins t'associer, généreux et fécond, à la vie du paysan de Guinée. « C'est toi qui, à travers d'innombrables méandres, Apportes discrètement à chacune de nos plaines un message de paix et de prospérité. Tu t'es prodigué à cette terre de latérité et de grès Pour que vive toute une race. » (Aube africaine, éditions Seghers, Paris) A partir de 1970, surtout, une nouvelle génération de poètes consacrera ses créations aux « soucis des peuples africains soumis à la dictature de ‘‘leaders'' sans foi ni loi ». (dixit Bios Diallo). Leurs chants et leurs poèmes les plus beaux furent consacrés aux rêves de liberté, de développement et de prospérité des peuples africains nouvellement libérés du joug colonial. Fidjani-Serpos Nouréini (Bénin), Balima Samba Armond (Burkina Faso), Aliou Mohammadou Modibbo (Cameroun), Quentin Ben Mongaryas (Gabon), Abdoulaye Mamani (Niger), Ibrahima Lamine Sall (Sénégal), Nayé Théophile Inawisi (Togo), Kama Kamanda (Zaïre ex-Congo) et bien d'autres que je ne peux citer dans ce bref panorama ont, chacun, leur façon de parler, d'écrire, mais tous disent à leur Afrique : « Si les ennemis t'ont frappée cent fois, nous, nos cœurs sont mille fois meurtris. » (dixit Anouma Joseph de Côte-d'Ivoire). Pour Amela Hilla-Laobé (Togo) : « L'Afrique est la grande patrie sacrée et tout ce qu'elle a souffert, tout ce qu'elle souffre, est passé et passera toujours par le cœur du poète. » Pour Bios Diallo (Mauritanie) : « Malgré sa surface défiant les océans, l'Afrique est plus petite qu'un nouveau-né, plus petite qu'une vieille maman. » Les poètes africains noirs de langue française enveloppent chaque jour leur continent meurtri, mais ô combien chéri, d'un baiser, et, pour ne jamais le perdre, le glissent tout entier dans leurs cœurs. Enfin, terminons, en guise de conclusion, par ces vers du jeune poète mauritanien Bios Diallo : « Que reste par le ciel du jour, Qu'aux yeux la joie laisse des larmes !... Plus rien ne pourra nous barrer la vue, La plaine s'étendra jusqu'au fond de la mer Et du fond de la mer surgiront les montagnes. Lève-toi : Déjà notre tristesse s'élance vers le ciel, Nos routes déjà se confondent. »
Références :
1- puf, paris 1948
2- Revue Europe
3- Anthologie de la poésie d'Afrique noire (d'expression française) Par E. Locha Mateso (Hatier, Paris 1987) D. J.


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