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Les aveugles, ces oubliés de la solidarité nationale
Plus de 1000 travailleurs non voyants jetés à la rue
Publié dans El Watan le 25 - 09 - 2009

Notre avenir, c'est la mendicité ou le suicide. » A l'unité d'El Harrach de fabrication de balais et de brosses de l'ex-Onabros, les travailleurs aveugles déambulent. Les murs sont lézardés, le sol est jonché de papier gras, de sachets et de bouteilles en plastique et les eaux usées ont une étrange couleur verdâtre.
L'annonce de la fermeture définitive de la fabrique de balais, établie aux quatre coins du pays, a fait l'effet d'une douche froide. Plus de 1000 artisans non voyants vont ainsi se retrouver sans emploi. Plus qu'une simple fabrique de balais, l'Onabros (devenue EPIH à la fin des années 1990) permettait aux non-voyants de se sentir « valorisés » et « utiles » à la société. L'espace de quelques heures, ils pouvaient oublier leur handicap. « Nous venions travailler puis on rentrait chez nous comme n'importe quel citoyen. Entre aveugles, on ne se sent pas différents, nous venons également pour trouver de la compagnie », nous dit Azzedine, employé de l'unité d'El Harrach. Les artisans de la fabrique ne parviennent pas à imaginer leur avenir après sa fermeture. A la question de connaître ses projets futurs, Hamid, 39 ans, ne répond pas. Il garde le silence, l'air absent, perdu dans le noir. Puis il répète inlassablement : « Il faut trouver une solution ! » « Si l'entreprise ferme, je n'ai plus d'avenir. Nous souhaitions que cette entreprise reste pour les générations à venir. Elle était notre seule arme pour affronter la vie dignement. Elle nous préservait de la mendicité. Désormais, nous serons obligés de tendre la main », estime Mouloud, la quarantaine. Les responsables du syndicat de l'entreprise (affilié à l'UGTA) pointent un doigt accusateur sur le ministère de tutelle, le département de la Solidarité nationale, qui serait, à leurs yeux, responsable de leur « perte ».
« L'aide ne parvient pas à ceux qui en ont le plus besoin. C'est le ministère qui a semé l'anarchie dans l'entreprise. Nous avons proposé que nos produits soient vendus aux institutions de l'Etat comme les hôpitaux ou les écoles. Ainsi l'entreprise pourrait vivre de sa production, mais ils ont préféré fermer les portes de l'usine. On ne peut certes détenir le monopole sur le marché du privé mais on pourrait, à tout le moins, le faire dans les marchés publics. C'est à cause du ministère de la Solidarité que nous en sommes arrivés là », affirme, dépité, Ksaoui Lakhdar, responsable de l'organique du syndicat. Il souligne qu'« avant qu'elle soit commerciale, l'Onabros est une entreprise qui a une vocation sociale ». Les syndicalistes assurent que les produits de la fabrique n'avaient « aucun mal » à s'écouler. Selon eux, l'Onabros avait pour clients l'Entreprise de gestion des services aéroportuaires (EGSA), l'Enaditex de Béjaïa, certains stades pour lesquels ils fabriquaient le gazon artificiel et des sociétés de fabrication de faïence pour lesquels ils faisaient des brosses spéciales pour les machines. « Les clients qui viennent sont aujourd'hui refoulés. Si l'Etat y mettait de la volonté, l'entreprise fonctionnerait », nous dit-on. Mais l'usine vivait surtout des subventions du ministère de la Solidarité, de l'ordre de 8,7 milliards de dinars par an. Une somme qui ne pouvait suffire pour l'application de l'augmentation du Snmg décidée par le gouvernement. « Théoriquement, la nouvelle grille de salaire est en vigueur. Mais dans les faits, l'entreprise n'a pas les moyens financiers pour nous payer. La subvention de l'Etat est insuffisante », explique M. Ksaoui.
L' Acharnement du ministère de la solidarité
Le smig des travailleurs aveugles stagne à 8000 DA par mois. Alors que les travailleurs aveugles s'apprêtaient à remplir leurs fiches de vœux, le ministère de la Solidarité a envoyé une correspondance (n°254), le 17 mars dernier, qui déterminait leur avenir. « Le plus choquant est que le document spécifiait que nous devions accepter notre sort sans négociation aucune », s'offusque M. Ksaoui. Dans ce document, il est noté que les 50-59 ans devaient aller à la retraite (avec 6000 DA/mois), les 49-47 ans au chômage technique (près de 4000 DA) et les 46 ans et moins en départ volontaire. L'entreprise devait fermer ses portes le 30 juin dernier. Le directeur général aurait alors, dénoncent les syndicalistes, ordonné de fermer les portes de l'usine de sorte que les anciens travailleurs « se lassent de distinguer avec leur canne la porte du mur ». Le syndicat dit n'avoir eu vent d'aucune décision officielle : « On nous a donné trois mois (juillet-août-septembre) pour déposer nos dossiers au ministère du Travail. » La fermeture de l'usine devrait être accompagnée d'une indemnité équivalente à 12 mois de salaire (de juin 2008 à juin 2009), mais les travailleurs disent qu'ils n'ont cure de cet argent. « L'argent, je n'en ai que faire. Je sais que je vais le consommer d'un seul coup jusqu'à ce que je n'ai plus le sou. Je n'ai pas d'autres revenus », nous dit Mohamed, 33 ans, père de trois enfants. Un autre souligne qu'« un déficient visuel sans argent peut être jeté à la rue par sa propre famille ».
« Abattoir collectif pour aveugles »
« La rentrée sociale est difficile cette année combinant le Ramadhan, la rentrée scolaire et l'Aïd. Avec tout ça, on nous impose des tabliers roses et bleus à 800 DA alors que nos enfants sont parfois obligés d'aller à l'école avec des claquettes déchirées », se plaint un employé père de famille, qui souligne qu'« un aveugle ne peut pas ouvrir un commerce, il ne peut pas acheter une voiture pour en faire le taxi clandestin, il ne peut rien faire avec les indemnités accordées ». Le syndicat réclame le paiement des arriérés de salaires : « Les unités d'Oum El Bouaghi, de M'sila, de Bou Sâada, de Chlef, de Tébessa, de Guelma et de Taher ont toutes 67 mois de salaires non payés. Avant la fermeture de l'entreprise, il est nécessaire d'assainir la situation. L'Etat doit régler ses dettes. » Dans les salles sombres de l'unité d'El Harrach, les travailleurs de l'Onabros se remémorent les meilleurs moments passés à l'usine. « L'entreprise a même fait travailler des aveugles universitaires », nous dit-on. Aujourd'hui encore, disent-ils, des jeunes viennent demander s'ils peuvent intégrer l'entreprise. « Il y aura toujours des aveugles en Algérie. Où vont-ils aller ? Auparavant, nous avions le choix entre un stage de standardiste et un stage d'artisan. Aujourd'hui que le standard a été remplacé par le numérique et que les sociétés de fabrication de brosses et de balais ont fermé, les aveugles seront perdus. Nous savions que de nombreuses entreprises fermaient leurs portes, mais jamais nous n'avions imaginé qu'on toucherait aux travailleurs aveugles », affirme M. Ksaoui. Il compare l'EPIH à « un abattoir collectif pour aveugles ». Dans cette affaire, il apparaît que c'est l'Etat qui fait preuve d'aveuglement.


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