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Le testament algérien
Publié dans El Watan le 08 - 12 - 2012

Il faisait froid, gris, sombre. Nous avons été entassés, étudiants et professeurs confondus, dans une grande salle de la vieille caserne de la Casbah de Constantine dont les locaux désaffectés, dans leur état brut de lieu d'enfermement de bidasses, nous servirent, pendant un temps supposé «provisoire» mais qui s'allongea pour atteindre une dizaine d'années, d'Ecole d'Architecture (Institut d'Architecture, d'Urbanisme et de Construction de l'Université de Constantine, IAUC).
Nous avons fait silence, lorsque le Maître parut, surpris d'abord par le côté extrêmement fruste du lieu où il devait nous parler des merveilles de l'Architecture, celles dont il ornait déjà des villes du monde : Brasilia, Milan, Paris, Le Havre, Alger, Constantine !
Puis, il se détendit, nous fit un grand sourire et entama son non-discours. Il nous parla de formes et de performances, de voyages en bateau (à la manière du Corbusier) dans lequel il eut une inspiration («suspendre» le siège du Mondadori à sa structure, au lieu de le poser sur le sol), de capacités de ses ingénieurs à mettre en forme ses «gestes», d'aigle déployant ses ailes, d'agora grecque étirée pour faire le forum de la Connaissance, avec la verticale d'un bâton en béton brut et l'horizontale d'une immense dalle ouverte à tous les vents et parsemées de bulles…
Face à la ville. L'Architecture n'était pas sublimée par un discours qui la portait, elle n'en avait pas besoin. Nous n'osions même pas le penser. C'était péché. Nous étions alors, pour la plupart, convaincus que ce n'était pas du tout celle-là qu'il fallait faire. La mort du Mouvement Moderne, encore toute fraîche, nous éloignait de toute fréquentation des démiurges, anciens ou nouveaux, dont le gourou du jour.
Certains parmi nos professeurs, ceux qui préparaient secrètement la revanche de la Ville, redevenue innocente après un demi-siècle de soupçons ayant failli en emporter les constances séculaires, veillaient à nous éviter des dérives en-dehors des sentiers qui étaient tracés par nous sous d'autres cieux. Le plan de Rome de Piranèse (ô Piranèse !) est plus proche de la M'dina que la ville pour Trois Millions d'habitants, nous affirmaient-ils, c'est une affaire entendue…
Il suffisait d'y retourner pour ne plus rien craindre pour les lendemains qui s'affichent sereins. Enfin, le Maître conclut en nous faisant cette confidence, à nous étudiants et futurs architectes de cette Algérie qu'il nous disait chérir presque autant que son pays, le Brésil : lui n'avait pas eu l'occasion de construire pour le peuple ; il nous demandait de le faire.
J'étais assis à côté d'enseignants architectes français dont quelques-uns sont devenus célèbres (David Mangin, Jean-Louis
Godivier…). Ils étaient sidérés par ce qu'ils considéraient comme l'inconsistance des propos du Maître, qui démontrait à quel point il privilégiait une Architecture de formes, totalement indépendante de tout contexte, comme une œuvre d'art sans ancrage aucun. L'exact revers de ce qu'ils tentaient de nous inculquer.
L'un d'eux (je sais lequel, mais je ne veux pas me compromettre davantage en le dénonçant) répétait durant toute la conférence (le show ?) : «Il est fou, il est fou !»
Le Maître dessinait à coups de gros feutre noir sur une feuille de (mauvais) papier de format raisin tenue à plat contre le tableau, les deux bras tendus, par un ingénieur qui l'accompagnait. Dès que la feuille était remplie de gribouillages, elle était entreposée sur un bureau, puis une autre était étalée.
A la fin de la conférence, dans une confusion indescriptible d'étudiants qui se bousculaient pour approcher la vedette, le Directeur de l'Ecole, l'architecte Salah Touati, arracha les grandes feuilles à ceux qui cherchaient à les prendre, comme un butin de guerre, en criant à qui ne voulait pas l'entendre : «Ça appartient à l'Institut ! ça appartient à l'Institut !»
Je ne sais pas ce que sont devenues ces reliques du saint homme du jour… Il faudra peut-être les retrouver et les publier, elles valent désormais leur pesant de valeur démonstrative…
Le Maître vient de mourir, près de trente-cinq ans après nous avoir fait part de son testament algérien, en ce jour mémorable de l'hiver constantinois. Il me restera de lui l'incertitude, entre Architecture à admirer, à vivre, toujours aussi pure, aussi belle, sur laquelle il n'y avait rien à dire qui ne tienne pas de l'inutile, et ensembles à restituer, dans une sorte d'éloge de la banalité, impossible à retrouver dans ses élans, dont il avouait son incapacité à s'y attarder, prétextant l'absence (supposée) de commande.
Prière pour l'Absent.


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