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La wilaya de Boumerdès se languit de ses villageois
Publié dans El Watan le 05 - 04 - 2014

Aït Dahmane, Aït Hini, Djerrah, Aït Oullemou, Tidjidjega, Tiguerth Ouacifs, Doukan… sont des villages qui se cherchent un avenir. Ces localités qui surplombent les gorges d'Ammal, à 30 km au sud de Boumerdès, sont désertées par les leurs depuis plus de quinze ans. En 1830, la région était peuplée vingt fois plus qu'aujourd'hui. Ses premiers habitants étaient très attachés à leurs terres. Mais ce qui n'a pas été fait par les colons français a fini par être accompli durant la décennie noire par les groupes islamistes armés et les aléas de la misère et du sous-développement.
L'histoire retiendra que c'étaient les pauvres paysans de la région qui se sont révoltés contre l'ennemi en 1871 pour récupérer les terres confisquées à leurs compatriotes de Lakhdaria et ses environs. A l'époque, la réaction des envahisseurs fut des plus violentes : des dizaines de révoltés épris de valeurs, de liberté et de justice avaient été déportés vers la Nouvelle-Calédonie. Leurs biens avaient été saisis et mis sous séquestre alors que leur chef, El Hadj Ahmed Bendahmane a, quant à lui, été guillotiné en avril de la même année dans une prison d'Alger.
Mais la répression qui s'est abattue sur les villageois ne les a pas poussés à aller s'installer ailleurs. Malheureusement, cela a fini par se produire 130 ans plus tard. Aujourd'hui, la région ne compte que quelques familles qui y vivent dans un dénuement total. Des maisons abandonnées, des écoles primaires fermées, des routes non encore goudronnées, des champs d'oliviers incendiés… Rien ne montre qu'on est seulement à 40 km à l'est de la capitale. Celui qui grimpe au sommet du mont Djerrah pourrait même apercevoir l'hôtel El Aurassi ou le siège du ministère de la Défense nationale.
Dénuement à 40 km d'Alger
«Pour le moment, nous nous occupons que de nos bêtes et de nos oliviers», tempête Abdelhalim Ouali, un jeune de Aït Hini. Le village est situé à 2 km de la RN5, juste au-dessus des gorges. En 1996, il comptait plus de 80 familles, mais il n'en reste que sept. L'école primaire, ouverte en 1993, a fermé ses portes en 1997. Les conduites d'eau potable, endommagées en 1986, attendent toujours d'être réparées. La route qui mène au chef-lieu communal est à peine praticable.
Qu'a-t-on fait pour stopper l'exode et inciter les «exilés» à regagner leurs maisons ? Pas grand-chose. On a beau entendre nos officiels rabâcher que la situation sécuritaire s'est nettement améliorée ces dernières années, on se demande à quoi sert une paix qui ne profite pas à ceux qui ont subi les affres de l'insécurité de plein fouet des années durant. «Nous avons tous formulé des dossiers pour bénéficier de l'aide à l'habitat rural, mais on a tout abandonné à cause de l'isolement et de l'absence d'une route aménagée», poursuit Abdelhalim.
Pour rallier le centre-ville, les villageois d'Aït Hini et Aït Dahmane empruntent un sentier exigu qui passe entre les rochers et les broussailles. Aucun parmi eux n'a de véhicule. Cela fait plus de dix ans qu'ils s'approvisionnent à dos d'âne, car même les clandestins refusent d'y faire des courses. «Il n'y a que les figues et les olives qui poussent les gens à faire une tournée de temps à autre dans ces localités», fulmine Rezeki Chabane, 41 ans, alors qu'on s'apprêtait à rallier Djerrah. Un village entouré de vastes massifs, connus pour avoir été une zone de repli par excellence pour les éléments de la katiba El Arkam de l'ex-GSPC.
Lors de notre passage, la route était quasi déserte. Le ciel semblait se rapprocher de la terre à mesure que nous nous avançons vers la haute montagne. Un peu plus loin, ce sont les forêts verdâtres de Tidjidjega qui étalent toute leur splendeur. De l'autre côté de la vallée, une dizaine de bourgs surplombant Beni Amrane contrastent avec les vastes plaines de Souk El Had et Si Mustapha. Le tout offrant des vues panoramiques d'une beauté à couper le souffle.Avant Djerrah, nous retrouvons Doukan. Hormis les militaires, aucune personne ne rôdait dans les environs. Nous avons l'impression d'entrer dans un territoire interdit. «Ici il ne reste que trois familles et moi-même», tempête Doulache Mustapha, 82 ans.
Passé glorieux et présent ténébreux
Contrairement à ses voisins, ce vieil homme plein d'énergie (lire l'article ci-contre) est le seul habitant à n'avoir jamais emprunté le chemin de l'exode. «Je n'ai jamais eu peur. Mes fils et ma femme résident à Boudouaou, mais moi je vis ici depuis 1992», confie-t-il tout de go. L'octogénaire évoque avec nostalgie l'époque où les oliveraies et les vergers ne désemplissaient pas et quand la terre était cultivée jalousement par ses propriétaires.
A l'époque, Ouled Doukan avait même sa propre école primaire. Aujourd'hui, celle-ci est transformée en… étable par un éleveur. Les maisons voisines de celle de M. Doulache sont toutes inoccupées. Certaines ont les fenêtres et les portes arrachées alors que d'autres sont noircies par les feux de forêt. Le nom de Djerrah est associé aussi à l'embuscade tendue le 18 mai 1956 par le commando Ali Khodja contre la section du sous-lieutenant de l'armée coloniale, Hervé Arthur. Ce fait d'armes de la glorieuse ALN, connu sous le nom d'«embuscade de Lakhdaria», avait ébranlé toute la France.
Les habitants de la région l'évoquent et le célèbrent avec une grande fierté, même si certains avouent n'avoir pas encore savouré les bienfaits de l'indépendance. Cette embuscade a même fait l'objet d'un film documentaire, en 2011, réalisé par Raphaël Branche et Rémi Lainé. Selon la presse de l'époque, au moins 22 soldats de l'armée coloniale avaient été tués par les hommes de Ali Khodja. Le seul survivant, Pierre Du Main, a été retrouvé quatre jours plus tard à l'issue d'une grande opération de ratissage menée sous le commandement du général Massu. Pris de rage, ce sinistre tortionnaire et ses soldats s'en sont pris aux civils. La répression qui s'est abattue sur ces derniers s'est soldée par la mort de 140 habitants de Djerrah et des localités environnantes.
Des villages à repeupler
«Je n'ai pas participé à l'embuscade, mais je sais que c'est au niveau de ce virage qu'elle a eu lieu», insiste Mustapha Doulache avant de nous montrer d'autres demeures fantomatiques et une salle de soins dont il ne reste que les poteaux et les murs. Avant sa fermeture, en 1995, même les éléments du GIA y faisaient des incursions pour se faire soigner et récupérer les médicaments. Quatorze ans plus tard, la situation a beaucoup changé. Les maquis de la région seraient nettoyés de la pègre terroriste. «Je ne fais pas de politique, mais je crois que le dernier groupe terroriste a été éliminé en septembre 2012», lance un quadragénaire à qui nous avons demandé s'il y a encore des sbires de Droukdel qui rôdent aux alentours.
Nous sommes à 700 m d'altitude, entre les monts de Bouzegza à l'ouest et ceux de Lakhdaria au sud. L'autoroute Est-Ouest est à 4 km, elle passe juste derrière Aïn Soltane et Ouled Benllemou, mais est inaccessible à partir de Djarrah. Le relief de la région n'est pas accidenté. L'Etat pourrait y réaliser des projets de logements et des équipements publics afin d'inciter les gens à revenir. Cela paraît une urgence si l'on veut préserver le peu de terres agricoles épargnées par l'avancée du béton.
Avant d'atteindre Ouled Benlemou, une importante structure de deux étages attire les regards. C'est une école primaire, elle a été fermée le 25 septembre 1995. «Je m'en souviens comme si c'était hier. Mon voisin n'a pu retenir ses larmes quand il a vu le personnel charger le mobilier à bord des véhicules de l'APC pour partir», se souvient un villageois. Pour sortir de l'enclavement, les habitants demandent l'ouverture d'une route qui reliera la région à Lakhdaria et à l'autoroute Est-Ouest. «Ce projet est plus que nécessaire si l'on veut repeupler ces villages», préconise Hamid, ingénieur dans le domaine maritime.
Le vœu de Hamid se concrétisera-t -il un jour ? L'avenir nous le dira.


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