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« L'affaire d'Aminatou a montré le vrai visage de la monarchie marocaine » Fernando Peraita. Porte-parole de la Plateforme de solidarité avec Aminatou Haïdar
Lanzarote (îles Canaries). De notre envoyé spécial Tout d'abord, comment se porte Aminatou Haïdar ? La santé d'Aminatou commence sérieusement à se dégrader. Elle refuse toute assistance médicale comme tout le monde le sait…inutile de vous dire qu'ici tout le monde s'inquiète…Elle est à son 27e jour de grève de la faim. Du nouveau ce matin (hier, ndlr) sur le plan des réactions ? Ce qui est nouveau, ce sont les déclarations de Luis Zapatero, le président du gouvernement espagnol et de sa vice-présidente, qui reprochent à la police de l'aéroport d'avoir permis à Aminatou de rentrer sans passeport dans l'aéroport de Lanzarote. Cela a été démenti par le syndicat de la police qui rappelle que la décision d'accueillir Aminatou a été prise par les hautes autorités. Ce qui est absolument illégal. La loi espagnole stipule clairement qu'un ressortissant étranger détenteur d'une carte de résidence peut être dispensé d'un visa mais pas d'un passeport. Le gouvernement espagnol s'est rendu responsable d'un gros mensonge. Parlez-nous de la Plateforme qui coordonne toutes les actions de solidarité avec Aminatou… Sa mission consiste en premier à apporter une assistance réelle à la personne d'Aminatou, ensuite elle se charge de diffuser au maximum la grève de la faim. Cyber-action, plan de communication, appui aux médias…etc…une trentaine de télévisions dans le monde sont alimentées quotidiennement par des images, des interviews, etc. La Plateforme renferme une équipe pluridisciplinaire où on retrouve de tout, des journalistes, des artistes, des militants, des amis et sympathisants de la cause sahraouie. Aider à l'émergence d'une figure emblématique de la trempe d'Aminatou est-il si important pour le cause sahraouie ? Aminatou représente la nouvelle génération de Sahraouis qui n'a pas connu la colonisation espagnole, qui a fait ses études au Maroc, mais dont le cœur n'a jamais été conquis, contrairement au territoire, par les Marocains. La souffrance du peuple sahraoui se déclinait jusque-là en chiffres. Sans visage. Du moins jusqu'à maintenant. Désormais, Aminatou offre le sien. Le visage d'une femme, un peu fragile. Une mère de deux enfants. Son parcours exceptionnel plaide pour elle, en ce sens qu'elle n'a jamais revendiqué quelque chose pour elle-même, mais a toujours demandé qu'on s'intéresse à la condition du peuple sahraoui. Aminatou a une histoire de souffrance, de lutte pour la dignité, elle n'utilise que la parole. Une parole forte, insoumise, que personne ne peut réellement humilier, même dans les conditions que vous constatez, ce parking d'autobus de l'aéroport dans lequel elle observe sa grève de la faim. Des conditions horribles pour toute personne, encore plus pour une femme en grève de la faim. Sa montée en puissance dans les médias n'indisposera-t-elle pas la vieille garde du Polisario ? Aminatou ne parle jamais de pouvoir. Elle parle droits de l'homme, défend exclusivement les droits humains. Elle reconnaît elle-même qu'elle ne fait pas partie du Front Polisario, par contre, elle dit que le seul représentant légitime du peuple sahraoui, c'est le Front Polisario. Elle n'est donc pas dans la course ou la lutte pour le pouvoir et j'espère qu'elle n'aura pas de problèmes avec le Front Polisario. La collusion du gouvernement espagnol avec le gouvernement marocain dans cette affaire a été fortement décriée. La complicité entre les deux pour le viol des droits des indépendantistes sahraouis est choquante… Le problème qu'avait le Maroc avec Aminatou est désormais celui du gouvernement espagnol. Ce dernier ne s'attendait vraiment pas à un tel boucan, une telle chaîne de solidarité. Il a sous-estimé la force de cette Plateforme qui a ameuté tous les médias du monde, mais a sous-estimé surtout Aminatou. La vérité politique que celle-ci représente, l'attraction qu'elle exerce sur les médias, sa personnalité, les sérieux idéaux qu'elle défend. Mais je pense que le gouvernement espagnol ne laissera jamais mourir, sur son territoire, Aminatou Haïdar, ce serait trop pour lui. Cela dit, avec les fortes pressions internationales, je ne peux qu'être optimiste, Aminatou rentrera à Laâyoune. Le Maroc trouvera d'une façon ou d'une autre un moyen pour le faire. Le gouvernement marocain, mais pas seulement, a accusé l'Algérie d'avoir monté l'affaire de toute pièce. Serait-il vrai que cette Plateforme ait même été encadrée par des « agents » algériens ? Des accusations stupides, voilà ce que j'en pense. Cette grève est l'émanation de la conviction personnelle propre à Aminatou Haïdar. Je peux même vous affirmer qu'elle n'a même pas consulté le Polisario pour l'entamer. Une chose est sûre. Cette affaire a révélé au grand jour le vrai visage de la monarchie. Aminatou à mis à nu tous les travers du règne de Mohammed VI, ce dernier n'est pas meilleur que son père, Hassan II, encore moins un champion des droits de l'homme. Les déclarations incendiaires des officiels marocains témoignent de cette réalité. Certains ont demandé à ce qu'Aminatou soit jugée par un tribunal militaire, qu'il faudrait la condamner à la peine de mort, qu'elle devrait demander pardon au roi…et bien d'autres choses, aussi incroyables qu'inacceptables ; certains ont menacé d'envoyer des terroristes en Espagne, d'autres d'arrêter la coopération autour du trafic de drogue…bref, tout ce qui a été déployé pendant ces dix dernières années pour soigner l'image de la monarchie a été réduit à néant.
