L'Iran tire une nouvelle salve de missiles sur l'entité sioniste    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 55706 martyrs    Compétitions africaines interclubs : la CAF fixe les dates pour la saison 2025-2026    Ouargla : plus de 200.000 quintaux de céréales déjà moissonnés    Bac 2025 : plusieurs condamnations à des peines de prison pour fraude et fuite de sujets et de réponses    Pluies orageuses sur Djanet et Tamanrasset à partir de jeudi après-midi    Agression sioniste contre l'Iran: appel à une désescalade suivie d'une trêve    Bonnes nouvelles pour les femmes au foyer    Le MCA a un point du titre, suspense pour le maintien    Seize joueurs pour préparer le championnat arabe    quels impacts sur la sphère énergétique ?    Ambiance maussade en Israël où la guerre des ombres devient l'apocalypse publique    Donald Trump appelle à la reddition de Téhéran    Succès retentissant de l'Algeria Bid Round 2024    Rush sur le Parc de Mostaland    Vers l'intégration de 40 nouvelles spécialités dans le domaine numérique dès la rentrée prochaine    Un lieu pour l'éveil des enfants à La Haye    Forum africain de l'énergie: Yassaâ souligne le rôle stratégique de l'Algérie dans la transition énergétique en Afrique    Le Conseil de la nation prend part à Rome à la 2e conférence parlementaire sur le dialogue interreligieux    Oran: cérémonie de sortie de la 55e promotion d'élèves officiers et d'officiers stagiaires à l'Ecole Supérieure de l'Air de Tafraoui    Conseil de la nation: Bouzred présente le texte de la loi de règlement budgétaire pour l'exercice 2022 devant la commission des affaires économiques et financières    La manifestation "Alger Capitale de la Culture Hassaniya" du 21 au 23 juin à Alger    Tennis/Tournoi M25 Monastir: Toufik Sahtali qualifié au 2e tour    Il y a 20 ans disparaissait l'icône du style "Tindi", Othmane Bali    Constantine: 11e Festival international de l'inchad du 25 au 30 juin    Chlef: plus de 300 projets enregistrés au guichet unique    « Abdelmadjid Tebboune n'a pas accordé d'entretien à des journaux français »    Déjouer toutes les machinations et conspirations contre l'Algérie    Campagne de sensibilisation autour des menaces sur les récoltes de la tomate industrielle    Les MAE de plusieurs pays arabes et musulmans condamnent    Au cœur des Hauts Plateaux de l'Atlas saharien, Aflou offre bien plus qu'un paysage rude et majestueux    Para-athlétisme/GP de Tunis: 11 médailles pour l'Algérie, dont 4 en or et un record mondial signé Berrahal    Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie au Koweït    L'USMA stoppe l'hémorragie, l'USMK enchaîne    Une date célébrée à travers plusieurs wilayas de l'est du pays    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le militant discret de la cause nationale
Le professeur Boudraâ Belabbès
Publié dans El Watan le 05 - 01 - 2010

Présenter en quelques lignes le parcours de militant de la cause nationale et de médecin ayant consacré une longue carrière aux soins et à la formation du professeur Boudraâ Belabbès est une tâche ardue, tant sa vie de militant et celle de médecin se confondent intimement avec la tragédie de l'Algérie colonisée, mais aussi avec le bonheur de l'édification d'une jeune république naissante.
Il est d'autant plus ardu de présenter le parcours du Prr Boudraâ lorsque l'on connaît son humilité légendaire, mettant en avant les exploits de ses compagnons de lutte et taisant les siens. Présenter le parcours de militant du Prr Boudraâ, de son vivant, est important, pour que la jeune génération sache que celle qui a mené la guerre d'indépendance n'est pas un mythe, mais est faite de femmes et d'hommes en chair et en os. Avant de retracer la biographie du Prr Boudraâ, je commencerai par relater deux faits et un témoignage de reconnaissance. Il a été le témoin impuissant et le médecin dévoué d'une population civile bombardée par l'aviation française à Sakiet Sidi Youcef en 1956. Il est venu au péril de sa vie, au secours d'une population oranaise martyrisée par la folie meurtrière de l'OAS en 1962. Enfin, j'ai eu le privilège et l'insigne honneur d'accéder à ses archives personnelles et j'ai pris connaissance d'une lettre adressée par l'un des acteurs du déclenchement de la révolution, Krim Belkacem, pour le remercier des soins qu'il lui a prodigués.
Le Prr Boudraâ Belabbès est né le 28 avril 1925 à Sidi Bel Abbès. Comme l'écrasante majorité des familles algériennes de cette époque, il est issu d'une famille nombreuse et modeste qui s'installera à Oran, alors qu'il est encore enfant. Son père, Si Othmane, l'éduquera dans le respect d'un islam tolérant, moderne, en symbiose avec l'universalité, mais aussi dans l'amour de la patrie et celui des humbles. Le jeune Belabbès raffermira cette éducation en fréquentant, parallèlement à l'école primaire, la légendaire medersa El Falah à El Medina El Djadida, qui fut le berceau de l'éveil au nationalisme des jeunes Oranais de l'époque, tels les martyrs Ahmed Zabana et Hamou Boutlelis. Il suivra toute sa scolarité à Oran et réussira à son certificat d'études primaires en 1939. Ce certificat signifiait pour la minorité d'Algériens qui avaient la chance d'y accéder la fin de la scolarité et l'entrée, à 14 ans au mieux, dans le monde précaire du travail ; au pire, et ils étaient nombreux, dans celui de l'exploitation par une faune coloniale dénuée de toute humanité. Mais le jeune Belabbès, grâce à son courage, son opiniâtreté et aux sacrifices matériels consentis par son père, continuera sa scolarité en entrant au prestigieux lycée Lamoricière, où il décrochera son baccalauréat en 1945. Il s'inscrit à la Faculté de médecine d'Alger. Mais l'environnement colonial hostile, qui ne tolérait que difficilement l'accès de « l'indigène » aux études supérieures et, particulièrement, en médecine, oblige Boudraâ à s'expatrier en France, où il s'inscrira en médecine à Poitiers. Pour subvenir à ses besoins, il signera une licence de football au club professionnel local. Il débute son internat de chirurgie en 1953 à Châtellerault, puis à Vannes et, enfin, à Paris où il réussira à son clinicat en 1956. `
A la veille de la soutenance de sa thèse de doctorat, il décide de répondre à l'appel de sa patrie, et rejoint l'ALN où il est affecté dans les services de santé. Il se consacre aux soins des djounoud et à une population civile paupérisée par l'exode dû à la guerre. De même, il va se lancer dans la formation des infirmiers et infirmières de l'ALN. Il va être responsable d'une antenne chirurgicale de l'ALN jusqu'à 1958, puis responsable des services chirurgicaux de la base de l'Est à l'Etat major général. La dernière année de la guerre d'indépendance voit apparaître l'OAS, qui, par sa politique de la terre brûlée, va mettre les grandes villes algériennes à feu et à sang. C'est à Oran-Ville, à l'écrasante majorité pieds-noirs, qu'elle va commettre les pires crimes (voiture piégée, assassinats ciblés ou de masse... ), n'épargnant ni femme, ni enfant, ni vieillard, poussant dans sa folie meurtrière jusqu'à l'assassinat dans leur lit de malade des Algériennes et Algériens à l'hôpital. Aussi à Oran, les Algériens minoritaires et ghettoïsés dans leurs quartiers sont tout simplement privés de soins et, particulièrement, de tout traitement chirurgical. C'est alors que la zone autonome d'Oran décide d'ouvrir une antenne médico-chirurgicale à la rue Tombouctou à EL Medina El Djedida. Dans cette période d'horreur, c'est le Pr Boudraâ, officier chirurgien de l'ALN, qui en prend la responsabilité, sauvant ainsi de nombreuses vies humaines. Selon des témoins de cette période, son grand humanisme n'aura pas été altéré par les affres de la guerre, sauvant aussi de nombreux pieds-noirs. Le 1er juillet 1962, M. Boudraâ sera le premier médecin algérien à franchir les grilles de l'hôpital d'Oran. Il rejoint le pavillon 10 qu'il baptise du nom du martyr, le Dr Aït Idir Ali, et qu'il dirigera jusqu'à sa retraite en 1994.
Au lendemain de l'indépendance, il ne ménagera aucun effort pour l'édification nationale. L'un des rares chirurgiens présents à Oran, il ne cessera, jour et nuit, de prodiguer des soins, de relancer l'activité de la formation médicale et paramédicale, notamment des accoucheuses rurales. Quand en octobre 1963 éclatera le conflit algéro-marocain, tout naturellement M. Boudraâ se retrouvera au front à la tête de l'équipe chirurgicale. Infatigable, il n'oubliera pas qu'Oran, sa ville, doit renaître des cendres de la guerre ; il en devient le maire en 1963. Le 19 juin 1965, homme de principe fidèle à une « Algérie fraternelle » (sic), il démissionnera de son poste de maire. De 1969 à 1974, il préside la première assemblée populaire de wilaya. En 1977, il refuse d'être candidat à la députation pour se consacrer pleinement aux malades et à la formation de plusieurs générations de médecins et de chirurgiens. Il est l'un des pères de la chirurgie algérienne et l'un des fondateurs de la Faculté de médecine d'Oran, dont il sera le doyen en 1970. Les étudiants en médecine lui doivent la construction des bâtiments de l'ex-ISM, attenant à l'hôpital. Il va aussi présider le conseil médical de l'hôpital en 1969 et 1984. Dès son arrivée à l'hôpital, il prendra la mesure du désarroi des malades cancéreux et de la nécessité d'une prise en charge muItidisciplinaire. Après une formation en cancérologie à Göteborg en Suède puis à Lyon, il est le pionnier dans la lutte contre le cancer. Dans ce cadre, on ne peut passer sous silence la lutte acharnée du Pr Boudraâ, allant jusqu'à la grève de la faim, pour faire aboutir son projet de lutte contre le cancer. Malheureusement, il ne sera pas écouté par les décideurs.
Aujourd'hui, devant la situation des cancéreux, on se rend compte que l'histoire lui a donné raison. Combien de temps perdu depuis les années 1970 ! En 1994, le Pr Boudraâ part à la retraite dans une indifférence totale de l'administration, après une mission commencée en 1956 et largement remplie. Les vicissitudes de la vie n'ont nullement entamé, ni ses convictions, ni ses principes, ni la fidélité à ses compagnons de lutte. C'est ainsi que dans son salon, dans une vieille bâtisse en ruine (lui qui a été maire d'une ville dont de prestigieuses constructions coloniales étaient abandonnées, sans en profiter), trônent, entre autres, les portraits de Zeddour Mohammed, Brahim Kacem, son ami de toujours, intellectuel algérien assassiné par la DST en 1954, celui du Dr Aït Idir Ali, chirurgien de l'ALN, mort au champ d'honneur, en 1960, de son maître spirituel Cheikh Miloud EL Mehadji, de son ami maître M'ramed Farrat, défenseur des droits de l'homme, ou encore cette photo du défilé des communaux à Oran, le 1er Mai 1964 ; et enfin, cette photo d'un groupe de djounoud de l'ALN dont la plupart sont morts au combat. L'ensemble de ses élèves retiendront de son enseignement : « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. » Quant à toutes celles et tous ceux qui l'on côtoyé dans ses différentes fonctions, ils retiendront sa devise : « Unir et non désunir ; gérer et non digérer ; servir et non se servir. »


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.