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Le militant discret de la cause nationale
Le professeur Boudraâ Belabbès
Publié dans El Watan le 05 - 01 - 2010

Présenter en quelques lignes le parcours de militant de la cause nationale et de médecin ayant consacré une longue carrière aux soins et à la formation du professeur Boudraâ Belabbès est une tâche ardue, tant sa vie de militant et celle de médecin se confondent intimement avec la tragédie de l'Algérie colonisée, mais aussi avec le bonheur de l'édification d'une jeune république naissante.
Il est d'autant plus ardu de présenter le parcours du Prr Boudraâ lorsque l'on connaît son humilité légendaire, mettant en avant les exploits de ses compagnons de lutte et taisant les siens. Présenter le parcours de militant du Prr Boudraâ, de son vivant, est important, pour que la jeune génération sache que celle qui a mené la guerre d'indépendance n'est pas un mythe, mais est faite de femmes et d'hommes en chair et en os. Avant de retracer la biographie du Prr Boudraâ, je commencerai par relater deux faits et un témoignage de reconnaissance. Il a été le témoin impuissant et le médecin dévoué d'une population civile bombardée par l'aviation française à Sakiet Sidi Youcef en 1956. Il est venu au péril de sa vie, au secours d'une population oranaise martyrisée par la folie meurtrière de l'OAS en 1962. Enfin, j'ai eu le privilège et l'insigne honneur d'accéder à ses archives personnelles et j'ai pris connaissance d'une lettre adressée par l'un des acteurs du déclenchement de la révolution, Krim Belkacem, pour le remercier des soins qu'il lui a prodigués.
Le Prr Boudraâ Belabbès est né le 28 avril 1925 à Sidi Bel Abbès. Comme l'écrasante majorité des familles algériennes de cette époque, il est issu d'une famille nombreuse et modeste qui s'installera à Oran, alors qu'il est encore enfant. Son père, Si Othmane, l'éduquera dans le respect d'un islam tolérant, moderne, en symbiose avec l'universalité, mais aussi dans l'amour de la patrie et celui des humbles. Le jeune Belabbès raffermira cette éducation en fréquentant, parallèlement à l'école primaire, la légendaire medersa El Falah à El Medina El Djadida, qui fut le berceau de l'éveil au nationalisme des jeunes Oranais de l'époque, tels les martyrs Ahmed Zabana et Hamou Boutlelis. Il suivra toute sa scolarité à Oran et réussira à son certificat d'études primaires en 1939. Ce certificat signifiait pour la minorité d'Algériens qui avaient la chance d'y accéder la fin de la scolarité et l'entrée, à 14 ans au mieux, dans le monde précaire du travail ; au pire, et ils étaient nombreux, dans celui de l'exploitation par une faune coloniale dénuée de toute humanité. Mais le jeune Belabbès, grâce à son courage, son opiniâtreté et aux sacrifices matériels consentis par son père, continuera sa scolarité en entrant au prestigieux lycée Lamoricière, où il décrochera son baccalauréat en 1945. Il s'inscrit à la Faculté de médecine d'Alger. Mais l'environnement colonial hostile, qui ne tolérait que difficilement l'accès de « l'indigène » aux études supérieures et, particulièrement, en médecine, oblige Boudraâ à s'expatrier en France, où il s'inscrira en médecine à Poitiers. Pour subvenir à ses besoins, il signera une licence de football au club professionnel local. Il débute son internat de chirurgie en 1953 à Châtellerault, puis à Vannes et, enfin, à Paris où il réussira à son clinicat en 1956. `
A la veille de la soutenance de sa thèse de doctorat, il décide de répondre à l'appel de sa patrie, et rejoint l'ALN où il est affecté dans les services de santé. Il se consacre aux soins des djounoud et à une population civile paupérisée par l'exode dû à la guerre. De même, il va se lancer dans la formation des infirmiers et infirmières de l'ALN. Il va être responsable d'une antenne chirurgicale de l'ALN jusqu'à 1958, puis responsable des services chirurgicaux de la base de l'Est à l'Etat major général. La dernière année de la guerre d'indépendance voit apparaître l'OAS, qui, par sa politique de la terre brûlée, va mettre les grandes villes algériennes à feu et à sang. C'est à Oran-Ville, à l'écrasante majorité pieds-noirs, qu'elle va commettre les pires crimes (voiture piégée, assassinats ciblés ou de masse... ), n'épargnant ni femme, ni enfant, ni vieillard, poussant dans sa folie meurtrière jusqu'à l'assassinat dans leur lit de malade des Algériennes et Algériens à l'hôpital. Aussi à Oran, les Algériens minoritaires et ghettoïsés dans leurs quartiers sont tout simplement privés de soins et, particulièrement, de tout traitement chirurgical. C'est alors que la zone autonome d'Oran décide d'ouvrir une antenne médico-chirurgicale à la rue Tombouctou à EL Medina El Djedida. Dans cette période d'horreur, c'est le Pr Boudraâ, officier chirurgien de l'ALN, qui en prend la responsabilité, sauvant ainsi de nombreuses vies humaines. Selon des témoins de cette période, son grand humanisme n'aura pas été altéré par les affres de la guerre, sauvant aussi de nombreux pieds-noirs. Le 1er juillet 1962, M. Boudraâ sera le premier médecin algérien à franchir les grilles de l'hôpital d'Oran. Il rejoint le pavillon 10 qu'il baptise du nom du martyr, le Dr Aït Idir Ali, et qu'il dirigera jusqu'à sa retraite en 1994.
Au lendemain de l'indépendance, il ne ménagera aucun effort pour l'édification nationale. L'un des rares chirurgiens présents à Oran, il ne cessera, jour et nuit, de prodiguer des soins, de relancer l'activité de la formation médicale et paramédicale, notamment des accoucheuses rurales. Quand en octobre 1963 éclatera le conflit algéro-marocain, tout naturellement M. Boudraâ se retrouvera au front à la tête de l'équipe chirurgicale. Infatigable, il n'oubliera pas qu'Oran, sa ville, doit renaître des cendres de la guerre ; il en devient le maire en 1963. Le 19 juin 1965, homme de principe fidèle à une « Algérie fraternelle » (sic), il démissionnera de son poste de maire. De 1969 à 1974, il préside la première assemblée populaire de wilaya. En 1977, il refuse d'être candidat à la députation pour se consacrer pleinement aux malades et à la formation de plusieurs générations de médecins et de chirurgiens. Il est l'un des pères de la chirurgie algérienne et l'un des fondateurs de la Faculté de médecine d'Oran, dont il sera le doyen en 1970. Les étudiants en médecine lui doivent la construction des bâtiments de l'ex-ISM, attenant à l'hôpital. Il va aussi présider le conseil médical de l'hôpital en 1969 et 1984. Dès son arrivée à l'hôpital, il prendra la mesure du désarroi des malades cancéreux et de la nécessité d'une prise en charge muItidisciplinaire. Après une formation en cancérologie à Göteborg en Suède puis à Lyon, il est le pionnier dans la lutte contre le cancer. Dans ce cadre, on ne peut passer sous silence la lutte acharnée du Pr Boudraâ, allant jusqu'à la grève de la faim, pour faire aboutir son projet de lutte contre le cancer. Malheureusement, il ne sera pas écouté par les décideurs.
Aujourd'hui, devant la situation des cancéreux, on se rend compte que l'histoire lui a donné raison. Combien de temps perdu depuis les années 1970 ! En 1994, le Pr Boudraâ part à la retraite dans une indifférence totale de l'administration, après une mission commencée en 1956 et largement remplie. Les vicissitudes de la vie n'ont nullement entamé, ni ses convictions, ni ses principes, ni la fidélité à ses compagnons de lutte. C'est ainsi que dans son salon, dans une vieille bâtisse en ruine (lui qui a été maire d'une ville dont de prestigieuses constructions coloniales étaient abandonnées, sans en profiter), trônent, entre autres, les portraits de Zeddour Mohammed, Brahim Kacem, son ami de toujours, intellectuel algérien assassiné par la DST en 1954, celui du Dr Aït Idir Ali, chirurgien de l'ALN, mort au champ d'honneur, en 1960, de son maître spirituel Cheikh Miloud EL Mehadji, de son ami maître M'ramed Farrat, défenseur des droits de l'homme, ou encore cette photo du défilé des communaux à Oran, le 1er Mai 1964 ; et enfin, cette photo d'un groupe de djounoud de l'ALN dont la plupart sont morts au combat. L'ensemble de ses élèves retiendront de son enseignement : « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. » Quant à toutes celles et tous ceux qui l'on côtoyé dans ses différentes fonctions, ils retiendront sa devise : « Unir et non désunir ; gérer et non digérer ; servir et non se servir. »


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