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Yamina Mechakra, entretiens et lectures
Publié dans El Watan le 27 - 06 - 2015

Parmi les quatre frères, l'aîné, devenu instituteur en langue française, guide les premiers pas de Yamina dans la lecture et l'écriture qu'elle acquiert dans la prime enfance, vers l'âge de cinq ans. Grâce à lui, elle fréquente assidûment la bibliothèque du village et lit dès l'âge de six ans les grands classiques de la littérature universelle. (…)
Elle se passionne aussi pour les légendes, contes et poésie du terroir dont sa région natale regorge, colportant la geste héroïque du bandit d'honneur Belkacem Grine qui, bien avant la naissance de Yamina, faisait parler de lui dans les maquis des Aurès. Dans La Grotte éclatée, il tient, aux côtés des figures légendaires de la résistance maghrébine aux conquêtes byzantine, romaine, arabe et française, une place de veilleur et vigile impénitent de ce que
Yamina Mechakra sacralise par la «Terre-Mère».
Baignée dans cette culture d'une terre de révoltes mais aussi de labeurs sur une terre rocailleuse, elle a huit ou neuf ans, lorsque la répression coloniale s'abat sur sa famille. Son père, Belgacem, érudit en sciences coraniques, alphabétisé en langue française, est l'un des premiers nationalistes engagés dans la région. (…) En cachette de sa mère et de la fratrie, elle tient un journal sur un cahier d'écolier dans lequel elle dessine et raconte des scènes de guerre. Il faut préciser que la demeure des Mechakra n'est pas une masure en pisé telle qu'on peut l'imaginer à cette période des années 1950 mais une maison moderne, pourvue donc d'un grenier où se réfugie la petite Yamina pour écrire.
En plus d'avoir vécu son enfance entre les arrestations et déportations du père, Yamina perd son père le 12 janvier 1974, alors qu'elle vient d'entamer l'écriture de La Grotte éclatée. Sa mère, Abbes Ounassa, est décédée en 1996, après avoir vécu un temps, avec Yamina, alors devenue psychiatre à l'hôpital Drid Hocine, à Hussein Dey dans la banlieue d'Alger est, où elle occupait un petit logement de fonction.
Elle entre à l'école primaire de filles de Meskiana en 1956. Parmi les institutrices qui l'ont marquée figure Madame Alfonsi qui la prend sous son aile, subjuguée par la vivacité de son intelligence, ses dons de mémorisation et, surtout, son imaginaire fécond. Et bien même traumatisée par les multiples arrestations de son père, c'est une élève studieuse, appliquée qui rafle nombre de prix dans toutes les disciplines.
Les six années qu'elle passe à Meskiana, entourée de l'affection des siens, entre la maison et l'école de filles toute proche, Yamina les vit entre les arrestations successives de son père, les peines de sa mère, le soutien des frères, la complicité des sœurs auxquelles elle se confie, le bonheur quand sa grand-mère venait en calèche verte la promener sur la grande rue de Meskiana, mais aussi les réalités sordides de la guerre.
Un jour de l'année 1958, elle assiste, du grenier de la maison, à une scène qui la marque à vie : un camion de l'armée française s'arrête, et des soldats en descendent. Ils enlèvent la bâche arrière du véhicule et déversent leur cargaison : des corps déchiquetés de maquisards. De retour d'une opération de ratissage, l'armée française, pour effrayer les populations civiles, les femmes et les enfants surtout, rapporte les corps des maquisards tués, dévêtus, les aligne sur la place publique du village et force les habitants à venir les identifier.
La petite fille a vu. Des intestins, des poumons, des têtes fracassés, des jambes coupées. Une scène d'horreur. Elle consigne cette vision cauchemardesque dans son journal : «De ce jour-là, je n'ai plus mangé de viande».
Dans La Grotte éclatée, elle décrit la même scène de violence, de sang, de corps de combattants déchiquetés lors du bombardement de la grotte par l'aviation ennemie. A l'indépendance du pays, en 1962, elle est pensionnaire au collège Chanzy sur le Coudiat à Constantine. Comme le statut du collège a changé en 1963, les élèves pensionnaires ont été transférées au lycée El Houria de Constantine où Yamina poursuit ses études jusqu'à sa terminale en 1969. Elle y décroche son baccalauréat en sciences expérimentales avec mention «Assez bien». (…)
Alger, début de l'année 1970, Yamina Mechakra, inscrite à l'université de médecine, trouve un poste de surveillante au lycée Hassiba Ben Bouali de Kouba dont la directrice est son ancien proviseur du lycée El Houriya de Constantine, Mademoiselle Hamdiken, brillante femme de savoir et l'une des premières femmes algériennes à accéder à ce poste de responsabilité. Entre l'élève intelligente et studieuse maintenant devenue étudiante en médecine et la brillante directrice qui connaissait son parcours hors du commun, se noue une solide amitié, basée sur une admiration mutuelle. (…)
Dans les fragments d'entretiens qu'elle nous a accordés au cours de l'année 1999-2000, chez elle, dans son logement de fonction à l'hôpital psychiatrique Drid Hocine, Yamina évoque sa première rencontre avec l'écrivain Kateb Yacine dans le parloir de l'établissement des Sœurs blanches quand elle lui soumet le manuscrit de La Grotte éclatée. Sa sœur Keltoum, gardienne de la mémoire et des manuscrits de Yamina raconte : «C'est durant cette période de 1970 à 1976 que Yamina avait écrit et mis le point final à son roman La Grotte éclatée qui avait été son compagnon depuis un certain temps.
Elle cherchait Kateb Yacine pour lui montrer son manuscrit et elle a réussi à lui faire lire son roman, malgré ses réticences au départ car il devait être assez sollicité. Mais dès qu'il a lu, il a adopté Yamina qui, par la suite, a tissé des liens très solides avec lui. Ils ont été proches dès cet instant. La maladie de l'un et de l'autre les a séparés dans l'espace physique mais jamais dans l'affectif.»
En 1976, Yamina a rendez-vous au centre familial de Ben Aknoun pour un entretien enregistré que désirait faire Kateb Yacine pour les besoins de la préface à La Grotte éclatée, Les enfants de la Kahina.
Une année auparavant, en 1975, Yamina a entamé les stages en médecine interne. Elle avait choisi le service de pédiatrie du Pr Jean-Paul Grangaud à l'hôpital de Beni Messous, plus précisément les structures d'accueil des mères célibataires et des enfants nés sous x où elle exercera jusqu'en 1977.
Elle y prend les notes qui nourriront son deuxième roman Arris dont le personnage principal est un enfant malade abandonné dans un hôpital par sa mère faute de moyens, et qui sera violé avant d'être vendu à un couple d'Anglais qui l'emmènera avec lui vivre, poursuivre des études et devenir commandant de la marine royale.
Sa mère, restée au village, appellera chaque jour et attendra son retour ; quant à lui, sur ses routes maritimes, dans la somptueuse maison de ses parents adoptifs, marié, il est habité par la névrose des racines car tout lui semble factice dans sa vie. Il reviendra au village, et ne retrouvera que les ossements maternels dans le cimetière du village qu'il débroussaille à mains nues. (…)
En 1977, elle exerce à Tamanrasset en tant que médecin généraliste. Elle s'est notamment occupée des enfants dont la mortalité, due à la malnutrition ou sous nutrition, était très élevée dans cette région du sud algérien. Mais elle ne s'est pas contentée de leur prodiguer des soins.
Elle a mené une enquête de terrain et découvert que la Superamine, farine infantile distribuée gratuitement à cette époque par l'Etat algérien, était détournée par lots entiers vers le Niger, par un puissant réseau de trafiquants qui avaient des liens avec les structures d'acheminement de ce produit : «Cette découverte lui a causé des problèmes avec les autorités et fut à l'origine de son retour à Alger», confie sa sœur. (…)


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