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Le FSR ou les privilèges sans limite octroyés aux retraités de l'Etat
Publié dans El Watan le 20 - 10 - 2016

– La colère des syndicats gronde. La question qui se pose aujourd'hui en ces temps moroses est la suivante : que va devenir la retraite ?
Il est utile d'abord de noter que pour la première fois depuis très longtemps, les questions de retraite sont abordées par les salariés (et les syndicats) pendant leur période d'activité, et non plus une fois qu'ils sont à la retraite ou à la veille du départ à la retraite. Le monde du travail semble découvrir avec effroi et beaucoup d'appréhension les questions de retraite, leur législation et les droits y afférents.
Ils ont laissé faire les pouvoirs publics pendant de longues années, et parallèlement, le gouvernement s'est enfermé dans ses «Tripartites» pendant une longue période, cachant la réalité sur l'état de santé du système de retraite des salariés, ou reportant à plusieurs reprises la mise à plat de ce dossier. Deux exemples pour étayer les inconséquences et les incohérences du gouvernement à ce sujet. Le premier exemple est un rappel, une Tripartite il y a 10 ans avait déjà pris la décision de mettre fin à la retraite avant 60 ans, décision jamais appliquée, car déjà forcément impopulaire, alors que les finances de la Caisse nationale de retraite (CNR) donnaient déjà des signes d'inquiétude.
Deuxième exemple : dès 2012, la CNR basculait dans un déséquilibre financier à haut risque, et le gouvernement a continué à cacher cette situation et a laissé faire comme si de rien n'était ! Il a attendu juin 2016 pour aborder de manière parcellaire, partiale et lacunaire, ce problème réel du déficit financier de la CNR, en faisant le choix d'une mauvaise solution à un vrai problème, et plus grave, en ignorant et en contournant les syndicats autonomes avec qui il fallait discuter.
Le plus troublant dans l'attitude du gouvernement, c'est qu'il accumule une série de tares : sous-estimation de la situation du système de retraite des salariés, absence de visibilité et de projection quant au traitement «actuariel» de ce dossier (études statistiques et prévisionnelles sur les moyen et long termes), dialogue social biaisé, communication désastreuse, dissimulation des chiffres sur le système de sécurité sociale et celui de la CNR en particulier, etc. Effectivement, il y a de quoi s'interroger sur la pérennité de la retraite des salariés !
– La situation financière des organismes de sécurité sociale semble en danger. Y a-t-il péril en la demeure ?
Oui, il y a le feu dans la maison «sécurité sociale», et les pouvoirs publics ne veulent pas le reconnaître, car ce serait reconnaître leur incompétence à garder en état de fonctionnement la «colonne vertébrale» de notre système de protection sociale. Au-delà du déficit de la CNR, qui semble s'installer dans la chronicité, la situation financière de la CNAS n'est pas aussi reluisante que ses gestionnaires et le ministère de tutelle voudraient le faire croire.
A titre d'exemple, si les dépenses de la CNAS au titre du remboursement des médicaments ne sont pas révisées à la baisse en prenant des mesures drastiques et sans remettre en cause le droit à l'accès aux soins des assurés sociaux et de leurs ayants droit, dans les 2 ou 3 années qui viennent, la CNAS ira droit dans le mur. Mais il n'y a pas que les finances qui posent problème pour la sécurité sociale : la gestion de ses organismes (CNAS, CNR, CNAC, Cacobatph, FNPOS) est catastrophique, marquée à la fois par l'incompétence de nombre de leurs cadres, tant au niveau central que dans les wilayas, et par nombre de dérives dans le fonctionnement et les dépenses inappropriées.
Plus globalement, le ministère en charge de la sécurité sociale est de plus en plus inapte à impulser le recouvrement des cotisations – les créances de la CNAS, chargée de ce recouvrement, ne cessent de s'accumuler d'une année sur l'autre – et les petites mesures prises récemment n'ont pas apporté d'amélioration significative. Citons des chiffres pour mieux illustrer cette situation : le montant des créances détenues par la CNAS – au titre des cotisations impayées, dont une bonne partie relève des administrations et institutions publiques ( !) -, est équivalent au montant du déficit de la CNR ! Du coup, l'argument financier avancé par le gouvernement pour justifier la suppression de la retraite avant 60 ans ne tient pas la route.
Mais il y a encore plus grave : l'ONS (Office national des statistiques) a confirmé à plusieurs reprises ces dernières années que plus de 4 millions de salariés (issus principalement du secteur privé) ne sont pas déclarés à la sécurité sociale. Là aussi, les pouvoirs publics n'ont rien fait pour faire intégrer ces salariés à la CNAS, à la fois pour que ces derniers aient un statut d'assuré social pour bénéficier des droits qui vont avec, et en même temps, cela aurait permis de renflouer considérablement les caisses de sécurité sociale et même constituer des réserves conséquentes.
Ce qui nous donnerait en tout 10 millions de salariés affiliés à la CNAS, et pas uniquement 6 millions comme c'est le cas actuellement. Ce qui aussi battrait en brèche le deuxième argument du gouvernement pour justifier l'abrogation de la retraite avant 60 ans, à savoir que nous avons un retraité pour deux salariés, alors qu'il y a 30 ans, c'était un retraité pour six salariés. Si la CNAS récupère les 4 millions de salariés non déclarés, nous passerons à un retraité pour quatre salariés, ce qui rendrait le système de retraite viable.
– Qu'est-ce que le Fonds spécial des retraites (FSR) et qui peut y prétendre ? Quels sont ses avantages ?
Sujet tabou par excellence et combien très peu connu, si ce n'est de très vagues informations à ce sujet et très loin de la vérité. Ce Fonds spécial des retraites pour les «cadres supérieurs de l'Etat» (expression en vigueur), j'aurais tendance à jouer sur le «S» et l'appeler surtout «Fonds secret des retraites», à l'image de tous les «fonds » de l'Etat gérés dans la plus grande opacité et pour cause : il faut «cacher» et «taire» les privilèges sonnants et trébuchants octroyés sans limite aux adhérents de ce «club» très fermé, et oser en parler expose à toutes sortes de risques !
J'en parle en connaissance de cause : dans les colonnes de votre journal où j'avais exercé, j'avais publié il y a 20 ans un article sur le FSR sur la base de la réglementation qui le régit et que j'avais découvert tout à fait par hasard dans le Journal officiel, ce qui m'avait valu des menaces au téléphone et même lors d'une réunion publique présidée par un ministre, menaces à prendre au sérieux, surtout dans le contexte très difficile de l'époque.
Et j'avoue que depuis, je n'ai plus eu le courage d'en reparler, mais tout en continuant à m'y intéresser. Le FSR a toute une histoire liée à l'évolution politique du pays depuis l'indépendance. Il est né un «8 mars» en 1980 par décret présidentiel, un peu plus d'une année après la disparition du président Boumediène, donc par voie réglementaire uniquement, il fut intitulé «Fonds spécial des retraites des membres de la direction politique du Front de libération nationale et du gouvernement» et rattaché à l'époque à la Caisse générale des retraites des fonctionnaires.
Les textes régissant le FSR ont connu depuis de nombreuses modifications, toujours sans passer par le Parlement. A titre d'exemple, la Constitution de 1989 – dans le prolongement des événements d'Octobre 88-, ayant introduit le multipartisme, le FSR changera d'intitulé en supprimant «les membres de la direction politique du Front de libération nationale», mais des dispositions transitoires concernèrent ces derniers jusqu'en 1992 !
A propos des avantages octroyés par le FSR, ils sont de taille, surtout que la liste des fonctions et des postes pouvant en bénéficier ne cessera de s'allonger en 36 ans d'existence. Cette liste, très «restreinte» au départ (Présidence, ministères, chefs de Régions militaires, présidents de la Cour des comptes et Cour suprême, ambassadeurs, consuls généraux, walis, chefs des entreprises publiques, députés, etc.), intégrera les sous-directeurs de ministères, les magistrats, et plus récemment en 2011, les magistrats de la Cour des comptes.
Puis à la lumière des diverses modifications de la Constitution, notamment en matière de nomination des commis de l'Etat par décret présidentiel, la liste des bénéficiaires potentiels du FSR connut une forte rallonge, à telle enseigne que les directeurs d'exécutif de wilaya et les secrétaires généraux de daïra et de commune y firent leur entrée. Il ne suffit pas d'être nommé par décret pour en faire partie : là aussi, les conditions d'accès ont évolué au fil des décennies (et probablement de la rente pétrolière).
Si au tout début, il suffisait de cumuler entre 12 à 20 années dans la fonction où vous êtes nommé ou pendant une période comprenant même des années aux responsabilités pendant la guerre de Libération nationale, et sans aucune condition d'âge pour partir à la retraite, actuellement, une condition d'âge est exigée, mais seulement 50 ans ! Ces conditions varient selon l'importance du poste occupé : il y a des «sous-catégories» de retraités du FSR. Et si vous ne remplissez pas le critère de la durée dans la ou les fonctions occupées (et ayant donné lieu à nomination par décret) durant votre carrière, vous ne repartez pas les mains vides : vous ouvrez droit à une retraite… proportionnelle !
En fait, le principal avantage de «l'heureux élu» du FSR, qui remplit toutes les conditions, c'est de bénéficier d'une pension correspondant non seulement à 100% du dernier salaire perçu, indemnités comprises, mais c'est aussi de voir augmenter sa pension au fur et à mesure des revalorisations du salaire du dernier poste occupé. Un exemple pour étayer ce dernier point: un wali, parti à la retraite en 2000 avec une pension de 100 000 DA, verra ce montant grimper à 300 000 DA en 2015 si ce montant correspond au salaire du wali en fonction en 2015.
– Nous avons tenté de faire des recherches sur cette caisse et sa structure. En vain. Par quels textes est-elle régie ? Combien compte-t-elle d'adhérents ? Est-elle rattachée à la Caisse nationale des retraites ? D'où émanent ses financements ?
Effectivement, il est très difficile de collecter des informations sur le FSR : ceux qui en font partie n'aiment pas du tout que l'opinion publique, notamment les contribuables salariés qui relèveront de la CNR une fois à la retraite, connaisse les «droits» qu'ils en tirent. Après avoir fait partie de la Caisse générale des retraites des fonctionnaires, le FSR en fut détaché et fait maintenant bande à part, placé sous la tutelle du ministère des Finances, mais ayant un siège hors des murs de ce ministère: plus il est caché, moins il y a de «fuites» sur sa gestion et son fonctionnement.
Conformément à la réglementation qui le régit, le FSR a 3 sources de financement : les cotisations de ses adhérents, la contribution de l'Etat et les subventions de l'Etat, «le cas échéant» (mentionné ainsi dans le décret portant création du FSR). Le montant de cette «contribution de l'Etat», – contribution qui est en fait la source principale du financement du FSR-, n'est pas rendu public dans la loi de finances et n'apparaît pas du tout dans le budget de fonctionnement du ministère des Finances. Si cette contribution est insuffisante pour payer les retraités du FSR, l'Etat vient à la rescousse à travers des subventions.
Si à sa création le FSR ne comptait que quelques centaines de bénéficiaires, 36 ans après – au vu de la très longue liste de ceux qui y ont fait leur entrée depuis-, ils doivent être plusieurs dizaines de milliers. Ce sont donc les contribuables – dont les 6 millions d'assurés sociaux de la CNAS et une bonne partie des 3 millions de retraités de la CNR (ceux qui au-delà d'une pension de 20 000 DA continuent de payer des impôts) – qui financent la pension très confortable des retraités du FSR.
– Comment cela se passe pour les hauts cadres ayant déjà pris leur retraite et qui sont appelés à servir dans le gouvernement ou dans d'autres hautes institutions du pays ?
Le gouvernement a tout prévu pour ses «cadres supérieurs» en réserve de la République. Pendant les premières années du FSR, le cumul pension-salaire après une reprise d'activité n'était pas autorisé, ni même avoir une activité dans le privé. L'interdiction d'avoir en son nom des activités dans le privé fut levée et autorisée après 5 années de pension.
Puis la réglementation a changé, consacrant le cumul : le retraité FSR qui est rappelé pour reprendre du service (ne pas oublier qu'il peut prétendre à une retraite dès 50 ans pour peu qu'il ait cumulé une durée suffisante dans des fonctions supérieures, même les périodes d'intérim étant prises en compte) conservera le bénéfice de sa pension FSR et bénéficiera d'une «indemnité» à hauteur de 40% de la rémunération au titre de la nouvelle fonction. Mais le FSR a eu à gérer des situations ubuesques en matière de cumul pension-salaire non autorisé dans certains cas. A titre d'exemple, il a eu à convoquer des «cumulards» ayant triché, à l'exemple de ces anciens ministres, percevant une pension FSR, et qui nommés sénateurs au titre du tiers présidentiel.
Ces derniers touchaient aussi un salaire de parlementaire : ils ont été contraints de rembourser le trop-perçu (dépassant parfois le milliard de centimes) en obtenant un échéancier et ayant même osé exiger une discrétion totale de la part des fonctionnaires du FSR, craignant d'éventuelles fuites et les conséquences sur leur réputation.
– Peut-on dire qu'il y a une retraite à deux vitesses en Algérie ?
Malheureusement pas uniquement 2 vitesses : on peut même parler de plusieurs vitesses, alors que la loi de référence relative à la retraite, votée en juillet 1983, avait pour objectif politique de réunifier les systèmes de retraite en vigueur (hérités de la colonisation), en introduisant plus de justice sociale dans le cadre du «socialisme spécifique» à l'algérienne. Mettre en parallèle les droits des retraités CNR et ceux du FSR, c'est comparer l'incomparable. Et que dire des privilèges des députés en matière de retraite ?
Je rappelle l'alinéa 1er de l'article 49 de la loi n°89-14 sur le statut du député : «Le député ayant accompli 20 ans de service, dont une législature quelle qu'en soit la durée, peut prétendre, sans condition d'âge, à une pension égale à 100 % de l'indemnité principale et complémentaire perçue en sa qualité de député ou sa rémunération la plus favorable.» Mais il y a ces millions d'Algériens salariés non déclarés à la sécurité sociale et les plus d'un million de bénéficiaires très précaires de l'emploi de jeunes (la majorité depuis de très longues années et pour lequel l'Etat ne paye à la CNAS qu'une cotisation pour l'assurance maladie, excluant la quote-part retraite), qui eux ne percevront jamais de retraite si les choses restent en l'état.


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