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Les grands chantiers de réformes pour créer un nouveau modèle de croissance
DESEQUILIBRES MACROECONOMIQUES PROFONDS ET RIGIDITES STRUCTURELLES
Publié dans El Watan le 13 - 07 - 2020

IL FAUT CHANGER DE MODÈLE DE CROISSANCE DANS LE CONTEXTE D'UNE NOUVELLE STRATEGIE À LONG TERME
La mauvaise gestion du choc pétrolier de 2014 combinée aux chocs sanitaire et pétrolier de mars 2020 ont mis l'économie du pays dans un état de profonds déséquilibres macroéconomiques préoccupants. Fait aggravant, le manque de flexibilité de l'économie dû aux nombreuses rigidités structurelles rend toute relance difficile, voire impossible. En effet, les obstacles structurels au développement d'un entrepreneuriat productif privé sont multiples et entrelacés. In fine, c'est tout le modèle de croissance basé sur la rente pétrolière qui est arrivé à bout de souffle. Ce modèle n'est plus viable financièrement et cela était d'ailleurs évident depuis quelques années étant donné que les réserves prouvées d'hydrocarbures de l'Algérie devraient être épuisées dans 1 à 2 générations. En conséquence, l'Algérie doit se doter d'une nouvelle stratégie à long terme dans le cadre de laquelle il faudra entreprendre de vastes réformes macroéconomiques et structurelles complémentaires et cohérentes pour construire un nouveau modèle de croissance favorisant l'émergence de secteurs marchands à forte valeur ajoutée. Pour ce faire, les autorités doivent intervenir sur le double front macroéconomique structurel et sectoriel.
En plus d'entreprendre un assainissement budgétaire et extérieur pour rétablir les équilibres macroéconomiques et créer les conditions d'une relance de la croissance économique, phase incontournable mais insuffisante en elle-même, l'Algérie doit poursuivre un ensemble de réformes qui se complètent et se renforcent mutuellement pour améliorer la gestion macroéconomique et assouplir et éliminer les multiples contraintes structurelles qui entravent la croissance du secteur privé, la création d'emplois et la réduction de la pauvreté. Ces réformes devront malheureusement être entreprises dans un contexte international de récession et au moment où le pays dispose de peu de ressources propres en appui d'un tel projet. En revanche, si un tel ensemble de réformes cohérentes et bien séquencées est incontournable, il fournira au pays une visibilité à moyen terme, favorisera un renouveau économique et social indispensable et permettra de mobiliser les ressources nécessaires au financement de ce projet si important pour le pays.
CONTRAINTES ECONOMIQUES ET STRUCTURELLES MAJEURES ET AMPLEUR DES DEFIS À RELEVER
1)- Une économie fortement déséquilibrée, illustrée par quelques projections à fin 2020 d'indicateurs macroéconomiques-clés, notamment :
(I) un creusement du déficit budgétaire hors hydrocarbures qui devrait passer à 25,9% du PIB hors pétrole ; (II) un élargissement du déficit du compte courant de la balance des paiements qui passerait à 16,3% du PIB du fait de la chute significative des recettes d'exportations du pétrole sous le double effet du volume (amputé par l'accord entre le G20 et l'OPEP) et des prix (un baril de 31 dollars en moyenne) entraînant un manque à gagner de 16 milliards de dollars. En conséquence, la croissance économique devrait chuter d'environ 5% (une première pour le pays) en raison du confinement et de la faiblesse de l'activité enregistrée en 2018 et 2019. L'inflation devrait remonter à 5% (par rapport à 1,9% en 2019) reflétant des tensions sur l'offre de biens et de services, l'imperfection des réseaux de distribution et la dépréciation du dinar algérien, trois facteurs qui ne seront compensés qu'en partie par une demande globale en baisse. Les deux chocs vont accroître le chômage qui devrait passer de 1,3 million de personnes à fin 2019 à environ 5 millions de personnes en 2020 en raison des fermetures d'entreprises. En même temps, la pauvreté monétaire devrait passer de 5 à 10% de la population au moins. Un recul des indicateurs sociaux est également à anticiper.
2)- Une économie manquant cruellement de flexibilité structurelle : les obstacles structurels au développement du secteur privé sont multiples et entrelacés et incluent un environnement commercial restrictif, un accès difficile au financement, une gouvernance favorisant la corruption, une transparence et une concurrence insuffisantes, des barrières à l'entrée élevées, un marché du travail rigide, des inadéquations emplois-compétences et une croissance excessive des salaires par rapport à la productivité. En outre, le climat actuel des affaires (fondé sur une relation de proximité Etat/entreprises et les faiblesses des droits de propriété et contractuels) ne favorise pas l'esprit d'entreprise et ne sert pas l'avenir de l'économie du pays. Tout en relativisant l'importance de cet indicateur vu ses faiblesses, l'Algérie est classée non sans surprise 157e sur 190 dans la version 2019 du Doping Business de la Banque Mondiale ; et (III) des financements très limités : le financement des chocs successifs depuis 2014 à nos jours a privé le pays de ressorts financiers domestiques et extérieurs indispensables pour construire seul un nouveau modèle de croissance. En outre, le pays n'a pas d'autres alternatives qui pourraient générer des ressources à court terme. Dans ces conditions, il va falloir se tourner vers l'extérieur pour la mobilisation des ressources dont le pays aura besoin (environ 40-50 milliards de dollars sur la période 2021-2023) pour financer les réformes. Mais ceci implique que nous préparions de bons dossiers et disposions d'une feuille de route pour intéresser des partenaires (bilatéraux, entreprises internationales et institutions régionales et multilatérales).
CONTOURS DES POLITIQUES PUBLIQUES POUR CONSTRUIRE UN NOUVEAU MODÈLE DE CROISSANCE
Trois types de politiques publiques cohérentes et globales doivent être actionnées simultanément pour ce faire, notamment :
1)- des politiques macroéconomiques pour rétablir les grands équilibres (budget, balance des paiements. Inflation, taux de change, taux d'intérêt) ;
2)- des réformes macro-structurelles pour renforcer l'efficacité des leviers macroéconomiques dont disposent les décideurs et mieux gérer la demande globale ;
3)- des réformes structurelles et des politiques sectorielles pour relancer et moderniser l'offre globale (machine économique).
w Politiques macroéconomiques Deux points à soulever à cet effet :
1)- l'ampleur de l'ajustement macroéconomique ;
2)- l'articulation des politiques macroéconomiques.
Point 1 : ampleur des déséquilibres macroéconomiques : (i) Finances publiques : compte tenu de la durée de vie de nos réserves, le déficit budgétaire hors hydrocarbures (le point d'ancrage de la politique budgétaire) soutenable devrait se situer à 10% du PIB hors pétrole, en comparaison d'un taux de 25,9% en 2020. Soit un ajustement de 15,9 points de pourcentage du PIB ; (ii) Secteur extérieur : avec la détérioration projetée de nos échanges extérieurs au cours des prochains mois, les indicateurs-clés d'analyse de la viabilité extérieure (déficit de la balance des comptes courants, niveau des réserves, écart entre le taux officiel et le taux parallèle, dépréciation du taux officiel), devraient se détériorer par contrecoup.
Pour ce qui est de la balance des paiements, compte tenu d'un compte courant normatif de 5% et un déficit prévu de passer à 16% du PIB, l'ajustement serait de 11 points de pourcentage ; (iii) Taux de change officiel : pour ce qui est du taux de change du DA, les analyses de viabilité du secteur extérieur estiment la surévaluation à environ 35-40%. Une dépréciation de 40% ; (iv) Taux sur le marché parallèle : qui pourrait enregistrer une certaine hausse. Soit un écart taux officiel/taux parallèle de 50-60%. A réduire de façon significative pour combattre la fuite des capitaux et la fraude fiscale. L'ampleur de l'ajustement macroéconomique est énorme (il reflète la mauvaise gestion des dix dernières années) et devra être étalé dans le temps pour éviter des coûts énormes sociaux et économiques. Mais il est incontournable. Il ne peut être reporté ad aeternam.
Point 2 : comment gérer ces déséquilibres ? en articulant : (i) une réduction de la consommation et de l'investissement (absorption intérieure) principalement réalisée en resserrant l'orientation budgétaire. Cependant, cela réduira la croissance compte tenu de la forte dépendance de l'économie à l'égard des dépenses budgétaires, ce qui nécessite ; (ii) un soutien bien conçu de la politique monétaire pour réduire l'impact sur la croissance des taux d'intérêt à court terme dont le rôle serait de contenir les pressions inflationnistes ; et (iii) une politique de change appropriée pour réduire la consommation extérieure et améliorer la compétitivité, booster les exportations hors hydrocarbures et réduire in fine le déficit de la balance des paiements.
Point 3 : les objectifs macroéconomiques intermédiaires pour 2021-2023 ; sur le plan du budget, il faudrait ramener le déficit à environ 19% du PIB hors pétrole par le biais de mesures sur : (i) les recettes (portant sur la politique fiscale, l'administration fiscale et douanière et la baisse des avantages fiscaux) afin de faire passer le ratio recettes fiscales/PIB hors pétrole de 16,3% du PIB hors pétrole à 18,4% du PIB hors pétrole ; et (ii) les dépenses courantes (grâce à une rationalisation de la masse salariale et les subventions et transferts) pour ramener le ratio dépenses courantes/PIB hors pétrole de 29,2% du PIB hors pétrole à 23,3% du PIB hors pétrole. Pour les dépenses en capital, il s'agira de renforcer la chaîne de gestion de gestion des dépenses en capital pour améliorer l'efficience des projets.
Leur niveau restera inchangé (16% du PIB hors pétrole) pour générer de la croissance et atténuer les effets du resserrement budgétaire. Sur le plan extérieur, il faudra cibler un déficit du compte courant de la balance des paiements de 9% du PIB en 2023 grâce au resserrement budgétaire ci-dessus, des mesures de rationalisation des importations, des efforts soutenus en faveur d'une diversification des exportations et une dépréciation du DA de 30-40% entre 2021 et 2023. Ces politiques macroéconomiques prendront du temps à produire des effets, mais sur le moyen terme elles permettront de rétablir les conditions d'une reprise de la croissance économique.
Nous serons loin encore en dessous du potentiel des 8% dont le pays a besoin. Il faudra compléter ces efforts par des réformes structurelles bien ciblées et ambitieuses.
LES REFORMES STRUCTURELLES
En Algérie, les chantiers devront porter sur :
1)- des réformes macro-structurelles destinées à améliorer la gestion macroéconomique du pays ;
2)- des réformes structurelles destinées, d'une part, à accroître la productivité en réduisant les obstacles à l'investissement efficace, à l'emploi et à la concurrence et, d'autre part, à promouvoir la diversification économique et le développement des activités du secteur privé. Sur le plan macro-structurel, les chantiers de réformes toucheront les finances publiques (gestion des finances publiques, processus budgétaire, notamment le cadre budgétaire pour réhabiliter le budget en tant qu'outil de la gestion macroéconomique), les statistiques macroéconomiques, la politique monétaire (gestion du niveau de liquidité, amélioration du mécanismes de transmission de la politique monétaire et développement du secteur financier pour faciliter le signal de la politique monétaire), le cadre institutionnel de gestion de la politique macro-économique en général (coordination des politiques budgétaire et monétaire), le domaine des changes (réduire l'écart entre les marchés officiel et parallèle des changes par des réformes au niveau du marché des changes lui-même mais également au niveau des politiques macroéconomiques) et le domaine bancaire (améliorer la supervision bancaire). Sur le plan structurel, des réformes sont donc nécessaires pour réorganiser l'environnement des entreprises, renforcer les cadres institutionnels et juridiques, renforcer la concurrence sur les marchés de produits, garantir un accès adéquat au financement pour les entreprises, améliorer le fonctionnement des marchés du travail et améliorer les résultats et les normes du système éducatif.
En outre, il faudra poursuivre des efforts pour réduire la bureaucratie et renforcer les cadres institutionnels et juridiques. La réduction des formalités administratives inutiles et l'accélération de la transition vers une économie numérique contribueraient à améliorer la compétitivité et l'efficacité des entreprises du secteur privé, tandis que la mise en place d'institutions et de cadres juridiques solides contribuerait au succès du programme de réformes. Un autre chantier important est celui de la réforme des entreprises publiques qui est cruciale pour fournir un espace économique pour l'émergence du secteur privé. Cette dernière doit impérativement être gérée correctement pour éviter des blocages et l'échec des réformes.
LE SUCCÈS DES REFORMES EST LIE À PLUSIEURS FACTEURS
1)- un étalement des réformes : qui sont complexes et interdépendantes et ne manqueront pas de créer des résistances de la part d'intérêts bien enracinés dans le pays. Par ailleurs, compte tenu de la faiblesse des capacités techniques du pays, il est préférable de les mener de façon graduelle dans différents domaines simultanément sur une longue période. En outre, cela permettra de répartir le coût des ajustements qui peuvent être très élevés et préserver ainsi l'appui du public ;
2)- une bonne conception et conduite des réformes sont les suivants : ce qui implique une cohérence avec la stabilité macroéconomique afin qu'elles soutiennent la croissance à court terme, la complémentarité des politiques afin de mettre au point un calendrier approprié de mise en oeuvre et de façon progressive compte tenu du temps nécessaire aux travaux de préparation des dossiers des filets de sécurité pour protéger les populations vulnérables des effets négatifs de certaines réformes ;
3)- une politique de communication : portant sur ses objectifs, ses avantages escomptés afin de préparer les agents économiques aux changements attendus.
A moyen terme, le gain de ces réformes est significatif ; elles peuvent accroître le PIB de 1-1,5 point de pourcentage. Les politiques sectorielles : dernier volet des réformes destinées à favoriser un élargissement de l'offre globale. Elles viseront à favoriser une forte croissance dans des secteurs à forte valeur ajoutée tels que l'agro-industrie, les énergies renouvelables, les services, l'économie numérique, l'économie verte, l'économie bleue, la transformation minière et d'autres industries manufacturières.
CONCLUSION
L'Algérie doit se donner un nouveau modèle de croissance suivant les contours repris ci-dessus. Le succès des réformes exigera persévérance, un séquencing bien étudié et une volonté politique sans faille. Les retarder ne fera qu'accroître les coûts pour le pays et la population. Elles sont difficiles mais incontournables.
Par : Bessaha Abdelrahmi
Macroéconomiste, spécialiste des pays en post-conflits et fragilités.


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