Tissemsilt: réception du site touristique du barrage de Koudiat Rosfa    Bataille de Sidi Abderrahmane à Chlef : unité des rangs et actions héroïques ancrées dans la mémoire nationale    Vague de chaleur sur trois wilayas de l'Ouest à partir de lundi    Handball/Mondial U21 : la sélection algérienne en stage de préparation en Pologne    Industrie pharmaceutique: 4e édition du salon Alpharma du 26 au 28 juin à Annaba    Ghaza: Le CNP appelle la communauté internationale à traduire sa position en actions conduisant à l'arrêt de l'agression sioniste    Le système de santé de Ghaza est sur le point de s'effondrer    Equipe nationale/Suède-Algérie: les Verts à pied d'œuvre à Stockholm    Echec au Conseil de sécurité    Les Verts sans forcer    Une fête célébrée dans une ambiance de piété, de joie et de pardon    Un geste généreux en collaboration avec l'Association Rawafid El Ataâ    Coco Gauff renverse Aryna Sabalenka et décroche son premier sacre parisien    Une vie dédiée à l'éducation et à la littérature    Une symphonie culturelle en hommage à la création    Aïd El-Adha: le programme de permanence respecté par la quasi-totalité des commerçants    El-Meghaïer: l'écrivaine Lamia Brik aspire à promouvoir la littérature pour enfant    Décès de l'ancien journaliste de l'APS Abderrahmane Mekhlef: Boughali présente ses condoléances    CHAN-2024/Amical : l'équipe nationale A' lance ses préparatifs face au Rwanda lundi    Mise en service de trois centres de proximité de stockage de céréales    Nâama: lancement des premières expériences d'élevage de tilapia rouge dans des bassins d'irrigation agricole    Touggourt : mise en service de trois centres de proximité de stockage de céréales    L'UNICEF lance un appel de détresse pour sauver les enfants de Ghaza    Décès de l'ancien journaliste de l'APS Abderrahmane Mekhlef : le ministre de la Communication présente ses condoléances    Aïd El Adha : le Général d'Armée Saïd Chanegriha préside la cérémonie de présentation des vœux    Arrivée du président de la République à Djamaâ El Djazaïr pour accomplir la prière de l'Aïd El Adha    Lorsque le tourisme et la sécurité routière ne font qu'un...    Développement et aménagement de la baie d'Alger    Un Aïd dans la dignité    Se libérer de la rente des hydrocarbures et accélérer les réformes pour une économie diversifiée dans le cadre des valeurs internationales    «Le crime raciste d'Hichem Miraoui a été directement inspiré par les idées du Rassemblement national»    Plus de 4 millions ont fui leur pays    L'importance d'une vision cinématographique respectueuse de la précision des faits historiques soulignée    Une série d'accords signés entre l'Algérie et le Rwanda    L'Ecole rend hommage au professeur Walid Laggoune    Enjeux géostratégiques mondiaux et tensions sécuritaires au niveau de la région sahélienne    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Récupérateurs de plastique au CET de Corso (Boumerdès) : Travailler et dormir au milieu des déchets
Reportage
Publié dans El Watan le 22 - 05 - 2021

Leur travail lève le voile sur l'étendue de la pauvreté en Algérie. Mais aussi de l'exploitation, un phénomène en vogue peu combattu par les autorités officielles. Laminés par le chômage, Abdelkader et Messaoud (les prénoms ont été changés) sont obligés de travailler et dormir dans une décharge pour subvenir aux besoins de leurs familles.
Les deux amis assurent la collecte du plastique au centre d'enfouissement de Corso, dans la wilaya de Boumerdès, avant de le revendre à une entreprise privée de récupération basée à Blida. Le CET abrite un mini-centre de tri et deux immenses dépotoirs appelés casiers dont un est saturé. Il accueille les déchets de 22 communes et ceux d'une soixantaine d'institutions/organismes publics et privés dont l'aéroport d'Alger et plusieurs casernes militaires. Pas facile d'y accéder ou de prendre une photo. Surtout quand on est journaliste. Pour arriver au casier où exercent les récupérateurs il faut emprunter une route escarpée que le ballet des camions a rendue poussiéreuse et impraticable. Les odeurs fétides se dégageant de cette immense décharge rendent l'atmosphère irrespirable.
Main-d'œuvre à mains nues
Abordé alors qu'il faisait une petite sieste, Abdelkader (30 ans) semblait être envahi par un sentiment de honte. Natif de la commune de Aïn Boucif dans la wilaya de Médéa, Abdelkader s'est montré très avare en déclarations. Effet du jeûne et de la fatigue, nous dit-on. «C'est le pain qui nous a fait venir ici. Que voulez-vous qu'on fasse ? Pour avoir un poste d'emploi, il faut connaître un haut gradé ou un directeur d'une entreprise. J'ai trois permis, léger, lourd et transport, mais personne ne recrute en ces temps de crise», fulmine-t-il. Père d'un enfant de deux ans, le malheureux n'a pas vu sa famille depuis 20 jours.
Au moment où il décrivait le calvaire que lui et ses camarades d'infortune enduraient dans ce lieu apocalyptique, une dizaine de ces derniers fouillait dans les déchets ménagers à la recherche d'objets en plastique. Installés à l'orée des monticules d'ordures, des tentes faites à base de couvertures déchirées et de bouts de bois attirent les regards. C'est là que dorment certains, affirme-t-on. Les jeunes quêteurs portent des vêtements crasseux et travaillent tous pour le compte d'une entreprise privée conventionnée avec le CET pour la récupération du plastique.
Une fois traité et recyclé, le produit sert à la fabrication de la ouate des couvertures et des coussins ainsi que des caisses ou encore du fil d'emballage. «Nous sommes payés à raison de 10 DA pour chaque kilogramme de plastique ramassé. Certains dorment ici et le meilleur d'entre nous gagne 1200 DA/jour», explique un adolescent, épuisé par des heures de dur labeur. «Avant le mois de Ramadhan, ils étaient une cinquantaine. Je les vois souvent en train de manger des restes de nourriture jetés par des camions de Naftal et d'autres sociétés. C'est terrible que cela arrive dans un pays aussi riche comme le nôtre», témoigne le chauffeur d'un camion à benne tasseuse, le cœur déchiré par le sort de ces jeunes. Capuche sur la tête, un jeune natif de Lasker, dans la wilaya de Médéa, traîne difficilement un immense sac plein de bouteilles en plastique.
C'est sa moisson du jour. Le petit ouvrier refuse de décliner son nom. «Je travaille pour aider ma famille», lance-t-il candidement, ajoutant qu'il a quitté l'école à l'âge de 9 ans. Malgré les risques qui menacent leur santé, ces collecteurs ne portent aucune tenue de protection. Pas même de masques, de gants ou de godasses. «Nous ne sommes même pas déclarés à la Sécurité sociale», lance Messaoud (32 ans), marié avec deux enfants à charge. Interrogé, le directeur du CET, Ahmed Aâmi Ali, n'a pas nié le fait que le casier ait été transformé en résidence de fortune par certains chiffonniers, comme on les appelle dans d'autres pays.
Les restos Errahma à la rescousse
Pour lui, «ce phénomène n'est pas propre à l'Algérie». «Il faut savoir que les concernés collectent 12 tonnes de plastique par jour. Ce qui nous fait gagner 150 000 DA/jour», a-t-il justifié. Mais est-ce une raison de ne pas dénoncer le non-respect de leurs droits relatifs à l'hygiène, la sécurité et la médecine du travail ? Mais les trieurs ignorent leurs droits. Pour eux, le plus important en ces temps de jeûne (des poches compris) est de trouver quoi se mettre sous les dents le soir. «Heureusement qu'il y a les restos Errahma, sinon on aurait crevé de faim. Le mois passé on était très nombreux à faire ce travail, mais beaucoup sont partis passer le Ramadhan chez eux», confie un autre jeune natif de M'sila.
Pour ramasser le maximum de bouteilles, certains se mettent souvent près des engins qui déblayent les ordures afin d'ouvrir la voie aux bennes-tasseuses. Chaque déchargement provoque une vague d'odeurs pestilentielles que seuls les habitués des lieux arrivent à supporter en dépit de leurs effets néfastes sur la santé. Cette méthode archaïque et ces désagréments n'auraient pas lieu d'être si l'Algérie était dotée d'usines de recyclage et de traitement de déchets — le pays génère 1,2 million de tonnes/jour — et d'une politique de tri qui se fera en amont avec l'implication des ménages et des associations de protection de l'environnement. Abdelkader et ses camarades n'ont pas choisi ce métier, ils aspirent à pouvoir un jour gagner leur vie dignement loin des odeurs toxiques du lixiviat et des cris des vautours.

Reportage réalisé par Ramdane Kebbabi

Advertisements


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.