Economie de l'eau : plus de 5.000 enfants sensibilisés dans les colonies de vacances    Oran : forte affluence des jeunes et des familles sur la nouvelle façade maritime    L'armée sahraouie cible les bases de l'armée d'occupation marocaine dans le secteur de Guelta    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 61827 martyrs et 155275 blessés    Foot: clôture du Séminaire des arbitres d'élite à Oran    Handball / Mondial masculin U19 : l'Algérie bat l'Uruguay (32-27) et termine à la 27e place    Décès du réalisateur Nourredine Benamar    Le président du HCI tient au Caire des discussions avec le SG de la Commission internationale des Miracles scientifiques dans le Coran et la Sunna    Tribunal de Bir Mourad Raïs: placement en détention provisoire de 7 individus pour escroquerie et usurpation d'un titre attaché à une profession réglementée    Hadj 2026: les agences de voyages invitées à s'inscrire et à retirer le cahier des charges    La campagne de sensibilisation et de prévention des accidents de la route se poursuit à travers le pays    Tissemsilt: inhumation du moudjahid Ali Tlala dans la commune de Hamadia à Tiaret    Intégration de la presse électronique comme mécanisme de publicité : professionnels et syndicats du secteur saluent la décision du président de la République    Lutte contre les feux de forêts: la campagne nationale avance à bonne allure    Guelma : tomber de rideau sur le 13ème Festival culturel national de musique actuelle    Timimoun : Derbal insiste sur le raccordement des ksour au réseau d'assainissement    Plus de 14 800 patients à Ghaza ont besoin de soins médicaux urgents    Foot/ CHAN 2024 : avant-dernière séance pour la sélection nationale avant d'affronter la Guinée    Quels impacts sur la détérioration de la balance commerciale de l'Algérie durant le premier trimestre 2025 sur les équilibres macro-financiers et macro-économiques ?    Utilisation de l'IA dans l'orientation religieuse et la fatwa Belmehdi insiste sur la régulation    Ooredoo booste son offre Dima+ avec 20 Go supplémentaires sans surcoût    CHAN-2024 Le Soudan fait dans l'excellence face au Niger    Victoire de l'Algérie devant la Guinée    Championnat arabe de basket : victoire de l'Algérie devant la Tunisie    L'UIPA souligne l'importance du rôle des jeunes    Trois suspects placés en détention préventive    Grogne des partis politiques et des représentants de la société civile    Saisie de 4,7 quintaux de kif traité à la frontière avec le Maroc en une semaine    Ce sera le 22 septembre    Le corps d'une quinquagénaire repêché sans vie au large de la plage de Kef Lasfar    Le Conseil de l'Europe met en garde contre les ventes d'armes à l'entité sioniste    Journalistes assassinés par l'entité sioniste à Ghaza : Amnesty réclame une enquête «indépendante et impartiale»    Le peuple sahraoui vent debout face à l'occupation marocaine infâme    L'artisanat de Djanet à l'honneur à Alger    Signature à Istanbul d'un mémorandum d'entente    Ouverture des candidatures pour représenter l'Algérie    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Edward Saïd, un palestinien hors normes
Une mémoire fertile
Publié dans El Watan le 21 - 04 - 2005

Edward Saïd est un intellectuel palestinien qui s'est fait connaître et reconnaître dans le monde de la critique littéraire internationale avec un ouvrage théorique sur la vision et la perception du monde arabe et des pays colonisés par les Occidentaux, qu'ils soient écrivains, poètes, peintres, voyageurs, avec un ouvrage capital intitulé L'Orientalisme, une référence dans les études littéraires postcoloniales.
D'autres ouvrages ont suivi comme Culture et Impérialisme ou encore Commencements. Mais ce jeudi je vous parlerai de ses Mémoires A contre-voie, livre traduit du titre anglais beaucoup plus parlant Out of Place, et que je traduirai plutôt par « Déraciné », ce qui correspondrait plus à la vie d'Edward Saïd telle que décrite dans cet ouvrage fascinant de vérité. A Contre-voie comporte 430 pages. Pourtant, Edward Saïd ne parle pas de toute sa vie. Edward Saïd raconte son enfance, son adolescence, ses premières années de vie d'adulte, de vie d'étudiant. Si aujourd'hui n'importe quelle personnalité ayant une vie publique se sent obligée de mettre sa vie au grand jour, Edward Saïd écrit plutôt cette autobiographie dans la douleur, pratiquement sur son lit de mort, car il se savait condamné à cause d'un cancer insidieux qui l'a emporté en 2003 à New York. Palestinien, il semble qu'il a voulu s'écrire pour dénouer quelques nœuds avec ses parents et pour laisser un témoignage véridique d'une famille palestinienne forcée à l'exil comme tant d'autres qui n'ont pas la possibilité de s'exprimer. Dans cette autobiographie, il y a deux niveaux d'écriture et de thème. L'un très personnel et l'autre historique, les deux s'entremêlent forcément. En effet, Edward Saïd nous fait pénétrer dans le monde intime de sa famille, à la rencontre d'une mère particulièrement possessive, d'un père très soucieux de la réussite de ses enfants, surtout de son seul fils Edward, au point qu'il néglige de démontrer son amour paternel, obsédé uniquement par ses affaires et la réussite de son fils qu'il veut en fait protéger de la politique. La surveillance étroite de ses parents a beaucoup inhibé le jeune Edward, et l'on a du mal à concevoir que derrière le personnage international qu'il est devenu se cache une enfance certes bourgeoise, aisée, mais si solitaire, si triste, à la limite castratrice. Par exemple, il décrit un épisode de son enfance où un été sa mère lui donne des courses à faire toute la journée dans le seul but était de l'occuper jusqu'à épuisement afin qu'il ne fasse pas de « bêtises », en sachant que l'épicerie la plus proche de ce village libanais était à six ou sept kilomètres. La famille n'avait plus le droit de retourner à Jérusalem, leur ville ancestrale. Ce qui est frappant dans cet ouvrage, c'est la facilité avec laquelle les détails les plus intimes de cette famille sont révélés, mis à nu. Dans cette autobiographie, il montre comment il a souffert de son nom, prénom Edward et nom Saïd, Palestinien chrétien, il est suspect des deux côtés. Etudiant aux Etats-Unis, on lui rappelle constamment son origine malgré son prénom et malgré les efforts fournis par son père pour qu'il soit parfaitement américain, car il n'a fréquenté que les écoles britanniques et américaines au Caire, dont il dresse une description détaillée, soulignant l'archaïsme et le ridicule d'un enseignement qui ne correspondait pas du tout à la réalité et à l'environnement cai rote. Ainsi donc, Edward parle à sa mère, à son père, essaie de comprendre une enfance vécue dans des exils géographiques réels et des exils intérieurs à cause de parents croyant bien faire et le protéger, le transformant en machine à réussite dans tous les domaines, parfait pianiste, docteur d'Etat en littérature, critique littéraire, écrivain... A l'intérieur de cette enfance et adolescence, Edward Saïd nous raconte, par le biais d'une histoire personnelle, l'histoire du peuple palestinien que le traité de Balfour de 1948 a obligé de quitter les terres palestiniennes, les maisons, les biens, les ancêtres pour laisser place aux juifs nouveaux arrivés, donnant un lieu à ces derniers, en mettant en errance tout un peuple autochtone. Edward Saïd, qui écrit son histoire, écrit l'histoire de tous ces Palestiniens qui ne peuvent pas s'exprimer. Il raconte comment le Palestinien s'est éparpillé dans le monde ; il démontre un vécu, par exemple celui de son père, qu'il comprend mieux sur son propre lit de mort. Edward Saïd comprend que l'obsession de son père était de tirer un trait sur cette Palestine qu'on lui avait volée en échange de la nationalité américaine. Ce père ne souhaitait qu'une chose : que son fils soit totalement, uniquement américain. Et toutes les douleurs de cette famille, ses faits et gestes, les décisions, les éloignements pour études et autres, les errances s'expliquent par ce manque d'un pays ancestral qu'on leur a volé, une douleur qui persiste jusqu'à la mort, un goût amer chez Edward Saïd qui écrit : « Je vis un déchirement au sujet de la Palestine que j'ai seulement réussi à comprendre et à résorber... l'ambiguïté à l'égard de ce lieu, la complexité de son arrachement, sa perte douloureuse exprimée dans tant de vies brisées, y compris la mienne, et son statut de pays admirable pour eux (mais bien entendu pas pour nous) réveille toujours en moi la souffrance et la conscience d'être désespérément seul, sans défense, sensible à des agressions insignifiantes qui deviennent soudain graves, menaçantes et contre lesquelles je n'ai pas d'armes (pp 216-217). » Une autobiographie dure à lire, mais si enrichissante, qui dit l'éparpillement et le déchirement des Palestiniens à travers le monde.

Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.