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Vous avez dit modernité ?
culture et dépendances, navrantes péripéties d'écrivains algériens
Publié dans El Watan le 13 - 10 - 2005

ça se passait sur une chaîne française la semaine dernière, une émission dite de culture et de débat, de celles qui sont parfaitement rodées aujourd'hui. Un grand plateau au décor sobre, une grande table carrée en bois massif, quelques panneaux en brique de verre.
L'animateur, une vedette du champ médiatique parisien, shampooing parfait, regard dur et sourire carnassier, fiches en mains, déjà prêt. Le public : de jolies filles, certainement des stagiaires de l'émission ou des mannequins recrutés dans une agence quelconque. Autour de la table, des invités tendus, distraits ou concentrés, deux ou trois chroniqueurs, dont un au look de playboy, chemise immaculée ouverte sur un torse que l'on devine virile. Thème du jour : « La France peut-elle affronter la modernité ? » Vaste question qui, il faut le dire, ne nous intéresse que moyennement, voire pas du tout. Pour débattre de ce joli sujet, un ancien Premier ministre plutôt de gauche (Michel Rocard), un philosophe anciennement de gauche (Alain Finkielkraut), un politologue franchement de droite, un militant de la cause algérienne véritablement à gauche (Henri Alleg) et ô divine surprise, trois écrivains : Nina Bouraoui, Yasmina Khadra et Boualem Sansal ! Quel mouche avait donc piqué le programmateur de l'émission pour inviter ces trois larrons, et pourquoi des Algériens ? Passe pour Nina Bouraoui, mais Yasmina Khadra et Boualem Sansal ? Seraient-ils ces parangons de la modernité, dont nous ignorions tout ? Mystère...
Morceaux choisis
Après avoir lancé la joute, l'animateur, en bateleur sur de son fait, passe la parole à ceux qui sont censés avoir « pensé » la chose. Tour à tour, le philosophe et le politique avancent leurs arguments, déroulant une parole et une pensée tantôt en dédale, en détours, dont on pressent bien les tenants, mais dont on ne voit pas précisément les aboutissants (Alain Finkielkraut), parole et pensée qui progressent par cercles concentriques aussi, puis accélèrent par des échappées inattendues (Michel Rocard). Mais la discussion reste agréable, les manières sont courtoises, les répliques toujours finement articulées quoique contestables. Et puis, une fois redescendu de ces cimes, l'animateur-vedette donne la parole aux créateurs, qui ont la lourde tâche de nous éclairer de leur regard sensible, par leur intelligence brute. Alors, la modernité, quid ?
Boualem Sansal, vous êtes un grand écrivain de langue française et de nationalité algérienne, comment vous situez-vous dans ce débat sur la modernité ?
Boualem Sansal : J'ai lu le livre d'Alain Finkielkraut, il m'a passionné, m'a donné à réfléchir, m'a pris la tête (sic). Et puis, au bout d'un moment : quoi ? Lorsqu'on ramasse toutes ces idées et qu'on les laisse tomber, eh ben ça tombe dans l'hexagone ! Pour moi, le monde est plus vaste que ça aujourd'hui, non vraiment, j'ai le sentiment que tous ça n'est pas opérationnel...
Une réponse, Alain Finkielkraut ?
Alain Finkielkraut : La plupart de mes références ne sont pas françaises. J'ai posé les questions à tous et je n'ai pas demandé le passeport de ceux que j'ai convoqués. (...) Pour le reste, les gens lisent ou ne lisent pas, je n'ai rien d'autre à dire ! Voilà qui donne le ton ! Après les civilités d'usage, Boualem sansal, sans plus attendre, a donc lancé la première pique. Si elle semble faire mouche, elle apparaît néanmoins hors de propos, ne provoquant presque qu'une réaction feinte d'Alain Finkielkraut.
Henri Alleg : Je voudrais dire un mot sur le débat, dont j'avoue qu'il n'est pas mon sujet de discussions quotidiennes. Et bien, le mot de modernité...
Vous, Henri Alleg, on peut difficilement vous qualifier de « moderne », notamment quand on lit les passages sur les crimes staliniens que vous qualifiez de « péripéties tragiques » !
Suit alors un long développement de Henri Alleg sur lesdites « péripéties tragiques ». L'homme est émouvant, la mémoire de ce que furent son combat et sa fidélité à certains principes - malgré leur rigidité parfois - rend presque pathétique cette mise en scène médiatique. Lui coupant la parole, l'animateur-vedette se tourne vers Yasmina Khadra.
Yasmina Khadra, on connaît votre parcours, vous étiez militaire et vous dites que vous avez pris les prénoms de votre femme comme pseudonyme pour pouvoir écrire...
Yasmina Khadra : J'étais officier dans l'armée algérienne, mais la hiérarchie a voulu me mettre une laisse. J'ai choisi ce pseudonyme pour échapper à la censure.
Votre nouveau roman, L'attentat, se passe en Israël, c'est l'histoire d'un médecin palestinien qui vit à Tel Aviv et dont la femme se révèle être une kamikaze. (...) Vous dites avoir voulu écrire le livre sur ce sujet, vous êtes ambitieux, non ?
Y. K. : Je suis ambitieux ! L'ambition fait partie de la modernité, je ne vois pas pourquoi il faudrait se limiter à être un simple écrivain algérien...
Alain Finkielkraut, vous avez aimé ce livre ?
A. F. : J'ai lu ce livre haletant, très fort... Je serais cependant plus réservé, disons plus perplexe, face à la tentative qu'il mène pour essayer de comprendre le terrorisme. (...) Il y a quelque chose qui me gène dans ce que j'appelle « le romantisme du dominé » !
Boualem Sansal ?
B. S. : J'adhère pleinement à ce qui vient d'être dit. Nous, on a bien connu ça en Algérie, et je crois que le terrorisme doit être condamné totalement... Réplique contrastée de Yasmina Khadra sur l'importance de l'empathie, sur la nécessité d'être du côté de la douleur, réaction des autres intervenants, propos lénifiants d'une chroniqueuse sur l'arabisation... Puis Henri Alleg reprend la parole.
H. A. : Ce qu'il y a de remarquable, c'est qu'il y a autour de cette table trois écrivains algériens, hommes et femmes...
Nina Bouraoui : ...ou franco-algérien ! Disons que je me sens algérienne par le cœur et la sensualité et occidentale par ailleurs... Ici, échanges de politesses sur les mérites relatifs de l'écrivain algérien.
Boualem Sansal, vous publiez votre quatrième roman Harraga et comme Yasmina Khadra, vous êtes obsédé par la modernité (sic !)...
B. S. : Je m'accroche à la modernité comme à une bouée, et je vois l'Algérie régresser d'une manière irréversible...
Y. K. : Non, je ne suis pas d'accord, on ne peut pas parler d'un pays comme ça !
B. S. : Je m'explique... Je parle là de l'école - et je suis d'accord pour dire que ce n'est pas la langue arabe qui est en cause, mais le processus d'arabisation -, je parle de la justice qui est privatisée, de l'économie que l'on brade. Où est la modernité ? Je m'y accroche comme à une bouée de sauvetage même si je n'y crois plus...
J'imagine que vos livres sont refusés en Algérie ?
B. S. : Oui. Réponse curieuse, laconique et sans appel de Boualem Sansal. La vérité est probablement ailleurs. L'animateur-vedette convoque alors Nina Bouraoui. Celle-ci développe une parole plus libre, fluide et ondoyante sur l'écriture et ses motifs. Elle semble surtout plus rodée à ce genre d'exercice et parle du sentiment qu'elle a « d'appartenir à un monde plus vaste, du côté des vivants... » L'animateur-vedette la coupe pour lire le début de son roman et conclut par un catégorique : « C'est un très beau livre. » Ainsi va la vie dans les plaines arides de la vie médiatique française, où se perdent nos écrivains, tels des Don Quichotte de chiffons.


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