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Le pessimiste joyeux
Akli Tadjer
Publié dans El Watan le 17 - 10 - 2005

Arrivé comme un météorite dans la littérature il y a presque 20 ans, Akli Tadjer est un écrivain inclassable. Auteur de formules-chocs qui font mouche à chaque fois, il est à l'origine de l'expression arabe non identifiée. Akli Tadjer n'est pas un écrivain prolifique, quatre livres en deux décennies. Avec Alphonse, on a droit à un livre frais, aérien et profond. A lire d'urgence et à mettre entre toutes les mains, et dans les manuels scolaires. C'est l'originalité de ce Parisien : rire dans le drame. Il a le don de parler de choses graves avec un ton léger. Avec beaucoup de talent. A la (re)découverte d'un auteur majeur.
Qui est Alphonse ? Un Arabe non identifié ?
Il faut savoir qu'Alphonse n'est pas son vrai nom. Son vrai nom est Mohamed. Il doit son surnom au hasard du calendrier. Il est arrivé dans une branche de sa famille le premier août, jour de la Saint-Alphonse. On l'a débaptisé, c'est ainsi qu'il est devenu Alphonse. Maintenant, savoir si c'est un Arabe non identifie, on peut le voir comme ça si on ne s'arrête qu'a sa peau basanée. Si on s'intéresse davantage à lui, on peut le voir sous diverses facettes. Un peu Arabe, un peu Kabyle, un peu Parisien ; il est tout ça à la fois. C'est pour ça qu'il est si complexe, ce petit gavroche musulman. Sa famille existe parce que je l'ai inventée. C'est le propre du romancier que de faire croire que l'illusion est réalité. Le mentir vrai comme disait Aragon.
Il n'y a donc aucune part biographique dans Alphonse ? Akli n'a jamais mis les pieds dans le Nord, ni connu Juliette...
Comme dans tous mes romans, je pars d'épisodes de ma vie, Pour les ANI du Tassili, c'était un séjour en Algérie. Pour Courage et patience, la mort de mon père. Pour Le porteur de cartable, des bribes de souvenirs de la guerre d'Algérie à Paris, et pour Alphonse, encore une bouffée de l'enfance qui m'est remontée à l'improviste, en traite presque. Un séjour dans une branche de ma famille que je ne connaissais pas. J'avais un oncle maternel marié à une Française de souche, comme on dit aujourd'hui. Ils avaient des enfants qui s'appelaient Pierre, Paul, Jacques... et Juliette. Pour moi ce fut une vraie découverte. On sortait de la guerre d'Algérie, ce n'était pas si fréquent les mariages mixtes. On peut même dire que c'était révolutionnaire. Pour le reste, ils se perdent dans les replis de ma mémoire, ces cousins et de cette cousine Juliette qui vivaient dans le Nord.
On se dit qu'Alphonse n'est pas plus tolérant que sa cousine. 40 ans plus tard, lors de la rencontre dans le café, les rôles se sont inversés...
Là, on entre de nouveau dans le roman. C'est vrai qu'il n'est pas très tolérant avec cousine Juliette. Il a gardé de son enfance un regard acéré sur ses congénères. Il s'est forgé un caractère, une carapace. Il est devenu inoxydable. Il y a belle lurette qu'il a perdu ses illusions sur l'espèce humaine. Il faut dire qu'on lui en avait fait baver à ce gamin. De ce point de vue, moi aussi je ne me fais guère d'illusion. Cela étant, je reste un pessimiste joyeux. Je crois que le pire est toujours à venir mais je garde le sourire. Keep smile.
Le public a du mal à vous définir. Vous êtes algérien d'origine algérienne. Mais aussi français d'origine française. Ou encore, français d'origine algérienne.
Les trois mon capitaine. Je suis né à Paris. J'y ai toujours vécu. Pour être plus précis encore, je suis Kabyle. Ma famille est originaire de la petite Kabylie... El Kseur. Ville mondialement connue pour sa plateforme, ses pizzerias et ses heures qui ne passent pas.
Votre écriture est assez atypique...
Comme beaucoup d'enfants dont les parents étaient analphabètes, je ne suis pas auto-cultivé. J'ai dévoré des caisses d'illustrés. Tout y est passé Blek le Rock, Zembla, Akim, Nevada. Plus tard, j'ai découvert Louis-Ferdinand Céline et son fameux Voyage au bout de la nuit. Je n'ai plus vu le monde de la même façon. Il avait tout compris de l'espèce humaine. Il était sans indulgence, avec lui-même, ce qui lui permettait de n'en avoir aucune avec les autres. Le respect d'accord, la tolérance non. Il y a des maisons pour ça. Plus tard encore, Rachid Mimouni a fait partie des mes livres de chevet. Il était l'un des plus grands hommes de la littérature. Pas de la littérature algérienne ce qui serait réducteur ; il avait atteint une dimension universelle. Il a déconstipé la littérature algérienne. Pour moi, il était l'égal de Garcia Marquez...
Vous citez Rachid Mimouni, mais vous aussi vous avez un style déconstipé, loin de l'académisme.
Quand on écrit c'est sa nature qui transparaît. On se met à nu. Vouloir plagier les autres c'est le plus sûr moyen de ne transmettre aucune émotion, c'est le plus sûr moyen de n'avoir rien à raconter. D'ailleurs, écrivain est un métier où on ne peut pas faire semblant longtemps. J'essaie d'être le plus sincère, le plus fidèle à moi-même. Je veux continuer à déranger. Déranger c'est la dignité des écrivains. Je veux rester libre. ça aussi, c'est un job à plein temps. N'y voyez aucune ironie.
Vous échappez à tout classement...
J'échappe à tout classement et c'est bien le problème de la critique en général. Dans quelle catégorie on va le classer se disent les journalistes. Il est Algérien, mais ses romans n'en parlent pas ou alors ils en parlent sans la nostalgie des exilés - comme un touriste presque - et pour cause j'en suis jamais parti puisque je n'y suis pas né. Il nous raconte des histoires qui se trament en France et pourtant ses héros et hérauts sont tous Algériens. Alors, ils perdent leurs repères, les critiques et c'est tant mieux. Etre inclassable, voilà mon seul titre de gloire. Je veux pouvoir me surprendre chaque fois que je me mets à ma table de travail.
Après avoir décrit une Algérie assez naïve, joyeuse, dans Les ANI du Tassili, et forcément adolescente, en devenir, vous vous êtes penché sur une certaine enfance dans Le Porteur de cartable puis dans Alphonse. Est-ce une forme de psychanalyse ou simplement un désir de ne pas couper vos racines algériennes ?
ça doit avoir avec de la psychanalyse... ou quelque chose comme ça. Ou pas du tout. J'en sais rien. C'est peut-être plus simplement le besoin d'inventer des histoires ou de réinventer mon histoire. Je n'aime pas beaucoup l'idée de racines. Les racines me renvoient à l'arbre figé dans la terre, immobiles, forcément incapable de s'ouvrir sur le monde. Moi, je suis pour le mouvement. Je veux aller de l'avant, aller vers les autres, découvrir, découvrir, découvrir.
Vous avez préféré raconter des histoires d'adultes avec le regard d'un enfant dans vos deux derniers livres. Pourquoi ce choix ?
Je crois que les enfants peuvent dire plus parce qu'ils sont simples, naturels, spontanés dans leurs questions, leurs réponses, leurs attitudes, leur vision du monde. Les mots résonnent de façon différente dans la bouche d'un enfant. Ils nous forcent à nous remettre en question pour peu qu'on ait autre chose qu'un pois chiche à la place du cerveau.
Qui est Théo ? Vous avez réussi à créer un personnage attachant, sympathique. On a envie de le connaître davantage. Ce sera votre prochain livre ?
Théo est un jeune juif polonais, un peu inculte, qui n'est pas bon à grand-chose, c'est ça qui est touchant chez lui. Il est inapte au bonheur. Il faut dire qu'il a un background un peu chargé. Ses parents sont morts dans les camps. C'est sa grand-mère qui l'élève. Il est aussi paumé dans cette région du nord de la France qu'Alphonse-Mohamed. Ce sont deux marginaux, deux exclus, qui ont fini par se trouver pour se sentir plus forts ou moins seuls. Pour se défendre, pour se protéger l'un l'autre de l'adversité, ils ont appris à rire entre leurs larmes. Pour ce qui est de mon prochain roman, je vous dirais simplement que l'action se passe à Paris. Vous voyez, j'en sors pas de Paris. Le héros ? Un Arabe, vous voyez j'en sors pas...
Verra-t-on Akli Tadjer à Alger pour la promotion de son livre ?
Je viendrai avec plaisir.


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