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Tassili, par monts et merveilles
Et le dessin fut !
Publié dans El Watan le 20 - 10 - 2005

En ce 18 juin 1978, le président Houari Boumediène effectuait ce qui devait être sa dernière visite de travail à travers le pays. Sa mort intervint six mois plus tard. Deux nuits consécutives sans sommeil, aussi bien pour l'équipe présidentielle que pour les journalistes. Il fallait, coûte que coûte, mettre au point les derniers préparatifs pour l'inauguration officielle de la route Transsaharienne.
Le soleil, comme toujours dans cette région, dictait le type de touche à mettre au décor final. Le crépuscule, avec son cortège de couleurs, finissait par amener une espèce d'entente momentanée entre l'homme et la nature. Les couleurs dans le Sud algérien, dit-on, tiennent du chimérique. C'est que l'alternance se fait rapidement entre les différents effets de dégradé, surtout dans les endroits où le sable s'obstine à donner l'accolade à des montagnes rocheuses fouettées par des vents contraires depuis le commencement du temps. De ma chambre d'hôtel, je jetais un regard en direction de Tahat, cette colline, si imposante et si énigmatique à la fois, située à quelques kilomètres en dehors de la ville. Une colline qui porte bien sa blessure, m'étais-je dit alors ! En effet, au sommet, il y avait une dépression profonde qui, à première vue, ne semblait pas naturelle. Plutôt que d'altérer sa beauté ou de gêner quelque peu son élégance ancestrale, cette blessure lui donnait encore une espèce de charme mythique qui lui était spécifique. Oui, le charme se refuse parfois à l'universalité. Les montagnes, elles aussi, savent se faire coquettes quand elles le veulent. Le Tahat, par l'effet d'un chromatisme fabuleux, se dotait, en ce lointain crépuscule, d'une personnalité morale pour de vrai. Le serveur de l'hôtel, un natif de Tamanrasset, avisé de mon étonnement, vint m'entretenir de l'origine de cette vieille blessure sur le front de sa montagne. Convaincu qu'il était par son histoire, il me dit qu'un combat a eu lieu, dans les temps lointains, entre un guerrier de la région et la montagne elle-même. Etait-ce de son cru ? Je ne sais quoi répondre. Pour lui, le guerrier mythique finit par asséner un coup d'épée si fort que le sommet de la coquette montagne s'en trouva amoché à tout jamais ! Ah, la belle histoire ! Bien que celle-ci fût hautement mythique, mon interlocuteur ne se départit guère de son calme et de son allure crédule. Pouvait-il, du reste, se retourner contre sa propre personne ? Il se plaisait, apparemment, à se confondre avec le Tahat, et il ne pouvait, de ce fait, entrer en conflit avec son entourage naturel direct. La montagne est, cependant, restée égale à elle-même. Libre à quiconque de vouloir alors lui conférer un statut de sainteté. Le guerrier mythique, sans nom apparent, une fois le forfait accompli, fut obligé, par la force des choses, de faire usage de sa raison, car il devait continuer à vivre au même endroit. Il n'éprouva guère le besoin de faire des offrandes à sa montagne afin qu'elle le préserve des retombées d'une éventuelle vengeance. Il s'est donc comporté avec elle d'une manière rationnelle. Ce que la légende ne dit pas, c'est qu'apparemment, l'épée du guerrier se mua, par la suite, en pinceau ou en stylet. La première forme d'expression artistique n'est-elle pas née dans les vastes étendues rocheuses du Tassili ? La volonté de dire son moi, de le draper en de belles formes, est synonyme de raison. Celle-ci veut dire, tout simplement, la nécessité de faire usage de ses propres capacités endogènes comme exogènes pour apprivoiser toutes les choses de l'existence. Ici, tout indique que le guerrier mythique s'est fait l'égal des montagnes, du sable, du plateau rocheux, des ondulations chromatiques etc. Le passage de l'état de guerre à celui de paix ne semble pas avoir transité par une période d'amnistie probatoire. La nature donne l'impression qu'elle est restée statique en dépit de sa grande mobilité, la dynamique, quant à elle, s'est faite chez le guerrier, en ce sens que celui-ci s'est contenté d'un attirail quotidien de rien du tout : un pinceau, et quel pinceau ! Il n'a pas, à l'instar des Sumériens, des Egyptiens ou des Grecs, sculpté la pierre. A travers un foisonnement de fresques, il a dessiné son moi sur toute l'étendue du plateau rocheux dénommé Tassili, donnant ainsi naissance à un musée naturel, considéré aujourd'hui comme le plus grand et le plus riche du genre dans le monde. A l'origine, région verdoyante, si l'on en croit les géographes, les paléographes et les naturalistes, où l'homme s'est donné une raison solide et valable pour pratiquer la vie. Les dessins rupestres sont là pour l'attester. Devenant sédentaire, cet homme éprouva le besoin d'élargir son langage, de l'enrichir. C'est pourquoi, il est difficile de croire que le dessin, qui constitue encore une sorte de luxe dans les différentes sociétés, fut la première forme d'expression à laquelle l'homme eut recours. Les fresques du Tassili remettent les pendules à l'heure en ce domaine : la vie intellectuelle n'a pas commencé par l'écriture telle que nous l'entendons de nos jours, mais bien par le dessin. Répétons donc avec Charles Baudelaire qu'une œuvre d'art n'a pas besoin de réquisitoire. Le geste esquissé par ce peintre du Tassili sur les cavités, les parois et tout ce qui fait office de support à son art, à son désir de dire, demeure le premier langage, la première forme d'écriture, le premier syllabaire. Les inscriptions et les gravures figurant encore dans les restes du barrage de Maarib, au Yémen, que je contemplais en septembre 1987, ne m'avaient pas édifié sur ce chapitre, pas plus que ne l'avaient fait les tablettes argileuses de l'époque sumérienne et babylonienne, contemplées à Baghdad en avril 1974. Le signifié n'est pas passé directement au stade de signifiant, c'est-à-dire, la manifestation matérielle du signe. La gestation fut des plus difficiles et des plus longues. En somme, les dessins rupestres du Tassili ont gardé leur identité première, celle de formuler des concepts, de les rassembler et de les transmettre à autrui. Le tout est couplé avec une précision esthétique qui laisserait non sans émoi un Léonard de Vinci, ou un Rembrandt, ces deux grands dessinateurs des temps modernes. Le guerrier mythique, quant à lui, doit rôder dans ce musée à ciel ouvert, puisqu'il a toujours été le maître de ces lieux.

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