Vingt ans, c'est peu et c'est en même temps beaucoup dans la vie d'un journal. Cette réflexion peut s'appliquer à El-Watan qui fête le vingtième anniversaire de son existence avec ce sentiment d'avoir d'une part accompli, toutes proportions gardées, un parcours honorable jusque-là et de penser d'autre part que ce qui reste à réaliser pour devenir un grand journal, comparable aux illustres titres internationaux, est davantage plus exaltant mais plus éprouvant aussi . Car, si elle avait à sa naissance l'ambition tout a fait consciente et mesurée de tenir une place respectable dans le paysage médiatique national, notre publication nourrit plus que jamais l'aspiration de déployer encore plus loin sa notoriété, toujours fidèle à ce principe qui a fait sa force : servir quelque soient les circonstances et les conjonctures une information honnête et crédible à ses lecteurs. A l'image donc des quotidiens influents qui marquent l'opinion publique, El Watan a réussi en deux décennies à fidéliser un lectorat toujours exigeant , parmi lequel aussi bien des admirateurs qui trouvent réponse à leurs besoins en matière de communication, que des contempteurs recrutés généralement parmi celles et ceux qui ne se reconnaissent pas dans sa ligne éditoriale. C'est par définition le propre d'un journal d'avoir des pour et des contre pour forger une personnalité et une réputation qui durent dans le temps, et El Watan a toutes les raisons de croire qu'il a réussi à faire partie de cette catégorie. En vingt ans, il a eu tout le loisir ou la difficulté de vibrer avec les pulsions d'une société en transformation, et c'est tout naturellement qu'il en soit venu à défrayer la chronique de la diversité politique ou idéologique, sans jamais laisser toutefois personne indifférent. Pourquoi en fait est-on devenu le premier journal francophone du pays ? Les analystes avisés vous diront qu'en choisissant de défendre sans concessions les valeurs et les nobles idéaux d'un engagement républicain dans toute sa plénitude, El Watan a de facto été dans le sens d' une attente populaire à la recherche d' un espace d'expression vital à ses aspirations, mais également à l'écoute du moindre bruissement de la société qui faisait ses premiers pas dans le monde de la liberté, de la reconfiguration républicaine et de la mobilisation citoyenne. Né lui même dans le feu de l'action d'un combat pour la libre expression et la défense des droits de l'homme dans notre pays mené par le Mouvement des Journalistes Algériens (MJA) qui a pris forme au lendemain des douloureux évènements d'Octobre 88 et qui s'est généralisé avec le processus de démocratisation qui a ébranlé les assises du régime du parti unique,il s'est fait un devoir dès les premiers numéros de son existence de tisser un lien étroit avec ses lecteurs pour vulgariser, concrétiser et consolider les idées de liberté et les convictions pour la construction de la démocratie. Tout cela avec une grande déférence aux règles fondamentales de l'éthique professionnelle et de la déontologie.C'est d'ailleurs à ces deux notions que recourent ,comme on le fait pour une marque de fabrique, les lecteurs assidus pour qualifier le mérite d'El Watan. «Il s'impose par son sérieux, sa crédibilité,et cherche toujours à dire la vérité...» disent-ils. Au demeurant,en raison de sa sobriété et de ses performances médiatiques à travers sa recherche de l'information, la pertinence de ses commentaires, la rigueur de ses analyses politiques, l'exclusivité de ses enquêtes, notre journal a souvent été comparé à son confrère parisien Le Monde, mais chacun dans son style. De ce fait, il a longtemps servi de référence aux institutions officielles et surtout aux représentations diplomatiques. Mais dans un système qui a toujours refusé et qui refuse obstinément toute ouverture démocratique digne de ce nom, El Watan évidemment a tout pour déplaire. Le pouvoir en place, depuis l'avènement de la presse libre en Algérie, n'a jamais pu s'accomoder de cette réalité et toutes les mesures d'intimidation et de représailles qu'il a déployées pour casser les titres indépendants, dont celles dirigées contre El Watan ont été d'une férocité incroyable, prouvent en fait que pratiquer le journalisme libre dans un pays complètement vérouillé est loin d'être un exercice aisé. C'est plutôt en permanence le parcours du combattant qui expose la presse à tous les risques. Mais le défi vaut tous les sacrifices.