Après une carrière entamée à l'âge de douze ans, Ali Saïdi Sief (32 ans), vice-champion olympique et ancien champion d'Afrique du 5000 m (Alger 2000), n'est pas près de prendre sa retraite. Au contraire, il aspire réaliser les minima, soit pour le 5000 m ou le marathon, en vue des prochains mondiaux d'athlétisme en Corée en août 2011. Déchu de sa médaille d'argent lors des Championnats du monde d'Edmonton en 2001, pour dopage, Saïdi Sief est revenu à la compétition en 2003. Mais sans jamais parvenir à trouver son meilleur niveau, même s'il a remporté le 3000 m du meeting de Bruxelles dans l'excellent temps de 7'30''79. Il n'empêche que Saïdi Sief qui poursuit une formation d'éducateur sportif à Alger détient toujours trois records d'Algérie. Il s'agit du 2000 m (4'46''88), 3000 m (7'25''02) et du 5000 m (12'50''86). Entretien. - Après votre abandon au dernier championnat arabe de cross-country disputé à Alger en 2009, vous n'avez plus donné signe de vie. Que devenez-vous après cette longue éclipse ? Depuis cette contre-performance, j'ai tenté de me ressaisir au cours des compétitions sur piste, malheureusement l'éternelle blessure au mollet a écourté ma saison. Pourtant, je me suis bien préparé. Au passage, j'avais terminé 3e au championnat d'Algérie de cross (12 km) qui s'est tenu à Tizi Ouzou. Auparavant, j'ai réalisé 13'38''50 au cours du meeting en salle de Prague (février). Ce qui constituait pour moi un excellent chrono. - A 32 ans, est-il possible de poursuivre une carrière internationale ? Ce n'est nullement une question d'âge. Je ne vais pas évoquer les noms des champions d'athlètes qui continuent à courir au-delà de 32 ans. Dans la plupart des cas, ce sont les blessures qui stoppent la carrière des sportifs. Sachez que je cours presque sur la pointe des pieds en raison des douleurs répétées au mollet. Je m'explique : ce n'est pas un traumatisme musculaire, mais plutôt des vaisseaux qui causent des caillots de sang. Les entraînements sur les pistes dures favorisent davantage ces lésions. Le massage est indiqué après chaque séance. - Quel est l'objectif tracé pour 2011 ? Réaliser des minima pour les championnats du monde qui se tiendront à Daegu, en Corée du Sud, du 27 août au 4 septembre. Le choix de ma distance sera connu en fonction des résultats obtenus dans le marathon et le 5000 m. Ma première participation au semi-marathon de Lisbonne en avril prochain sera un indice. Avant cela, je suis invité en ce mois de décembre à prendre part à la 39e édition de la Corrida pédestre internationale de Houilles (Paris) et au 10 km de Nice (9 janvier). Ces courses me serviront de préparation. Je serai également présent au championnat d'Algérie de cross, prévu le 26 février. - Qui vous entraîne ? Etes-vous toujours en contact avec votre ancien coach français, Philippe Dupont ? En cette période de travail foncier, je m'entraîne avec le groupe d'athlètes que dirige Amar Brahmia. Et lorsque je suis à Paris, je me prépare avec un groupe de spécialistes français. Quant aux contacts avec le coach Français Philippe Dupont, ils sont au beau fixe ces derniers temps. - Bénéficiez-vous d'une bourse de préparation de la part de la Fédération algérienne d'athlétisme ? Non. Je ne bénéfice d'aucune aide et je n'en ai pas besoin. La Fédération doit aider d'autres qui le méritent afin qu'ils atteignent leur objectifs. Je suis signataire avec le Groupement sportif des pétroliers (GSP) sans pour autant exiger quoique ce soit. Je pratique l'athlétisme par passion. Si tout va bien, je vais terminer ma carrière haut la main, inchallah. - Pensez-vous qu'on puisse réellement pratiquer du sport de haut niveau en Algérie ? Je ne vais pas être hypocrite pour affirmer que nos athlètes peuvent réussir le haut niveau chez nous. Car non seulement les infrastructures sportives ou médicales font défaut, mais l'environnement ne s'y prête pas pour la pratique du sport de haut niveau. Les conflits perdurent encore. C'est le triste constat. Quand je suis en Algérie, je ne fais que des entraînements d'entretien. Maintenant que la forêt de Bouchaoui est gagnée par le béton, on ne peut plus s'entraîner normalement, vu qu'il y a beaucoup de monde. En plus, quand il pleut, les quelques parcours qui existent deviennent impraticables. Alger la capitale, avec ses 5 ou 6 millions d'habitants, mérite de meilleures infrastructures tant pour le sport de haut niveau que celui que de masse. En France, toutes les conditions sont réunies pour faire dans le haut niveau. Le seul inconvénient c'est le climat, surtout durant les mois de décembre et janvier. - Comment jugez-vous le niveau de notre athlétisme ? Malheureusement, l'athlétisme algérien ne fait plus parler de lui. Après les exploits de Hassiba Boulmerka, Noureddine Morceli, Nouria Benida Merah, Saïd Guerni Djabir, l'avenir de notre élite est loin d'être rose. Je n'arrive pas à comprendre que de talentueux athlètes comme Antar Zerguelaïne et Tarek Boukensa n'aient jamais pu monter sur le podium lors des championnats du monde ou des Jeux olympiques - Et qu'en est-il du niveau mondial ? Il y a de plus en plus moins de stars qui font du spectacle. Les El Guerrouj, Morceli, Bekéle, Bubka, pour ne citer que ceux-là, ont laissé un grand vide. Il n'y a plus de leader, toutes les épreuves restent ouvertes. Excepté le jeune Kenyan David Rudisha qui a marqué les esprits après avoir pulvérisé cette saison à deux reprises le record du monde du 800 m (1'41''09 à Berlin et à Rieti en 1'41''01). Rudisha, champion du monde juniors à Pékin en 2006, est en pleine ascension. Les 45'' 50 sur 400 m réalisés en févier dernier à Sydney était un signal fort que Rudisha sera sans doute l'attraction des prochains mondiaux. - Et votre cas de dopage aux Mondiaux d'Edmonton ? Cela fait presque dix années maintenant… Je peux dire que c'était un accident de parcours. J'ai traversé un véritable cauchemar. Ce qui m'a fait le plus mal, ce n'est pas tant le scandale de dopage, mais l'ingratitude des gens. Je n'ai trouvé aucun soutien, si ce n'est qu'une personne s'est permise de tirer sur moi à travers la chaîne de l'ENTV. Cette personne se reconnaîtra. Ce sentiment de pure lâcheté m'a aguerri et m'a permis de résister à la campagne de dénigrement. J'ai traversé des moments difficiles.