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«En France, il y a un camp pour lequel l'Algérie est toujours un ennemi»
Jean-François Kahn. Fondateur de l'hebdomadaire français Marianne
Publié dans El Watan le 21 - 12 - 2010

- Que pensez-vous de la manière de faire de WikiLeaks ? Faites-vous partie de ceux qui s'opposent à la dictature de la transparence ?
Pas du tout, je ne m'y oppose pas. Je vous rappelle que ce sont les journalistes qui ont parlé de la dictature de la transparence. Vous savez, je pars du principe que toutes les opinions sont libres et intéressantes. Cela m'amène à admettre, donc, qu'un nageur ou un boucher puissent parler de la dictature de la transparence. Mais qu'un journaliste – dont le métier et la raison d'être est de faire connaître la vérité, quelles qu'en soient la nature et les conséquences – puisse parler de dictature de la transparence, cela me tue. Je trouve cela même inconcevable. Si ce qui est rapporté par WikiLeaks est vrai, eh bien, pour moi, l'opinion a le droit de savoir. Ceux qui parlent de dictature de la transparence avancent en guise d'arguments, pour soutenir leur thèse, que WikiLeaks n'apporte rien de nouveau et que les éléments rendus publics sont déjà connus. S'ils savaient tout cela déjà, mais alors pourquoi ils n'ont-ils rien dit ? Cet argument me fait penser aux feuilles de vigne. Tout le monde sait ce que cachent les feuilles de vigne. Je dirai même plus : non seulement tout le monde sait, mais tout le monde a déjà vu ce qu'elles cachent. Dans ce cas, je ne vois pas pourquoi nous continuerions à le cacher. Nous sommes en pleine idéologie de la feuille de vigne. Tout cela est d'une hypocrisie absolument extraordinaire.

- Les partisans de la dictature de la transparence ont visiblement réussi à vous mettre en rogne…
Ce qui se passe aujourd'hui me rappelle ce qui s'est produit durant la seconde guerre d'Irak. Des mensonges inouïs ont été diffusés dans la presse. La faute a bien été reconnue mais personne n'a estimé que cela était grave ou dramatique. Des mensonges ahurissants ont également été développés durant la guerre du Kosovo. Cela dit en passant, la presse française ne l'a toujours pas reconnu. Malgré toutes ces bêtises, personne n'a crié au scandale. Ce qui est étonnant, c'est le fait que l'on diffuse des vérités qui dérange. Je suis extrêmement surpris. Le scandale, c'est quand même lorsqu'on écrit des mensonges et non pas lorsqu'on diffuse des vérités.
- Justement puisque vous en parlez, que pensez-vous de la presse française ?
Je ne vous dirais pas ce que j'en pense sur le plan philosophico-politique. Cela ne serait pas correct de ma part de critiquer la presse française devant la presse algérienne. Sachez toutefois que la presse française va très mal, économiquement et financièrement. Elle vit une situation cataclysmique. Tout cela est assombri par des études faites aux Etats-Unis qui prévoient que dans 25 ans, il n'y aura plus de presse écrite. Mais personnellement, je ne crois pas à une telle hypothèse. Si, dans l'antiquité grecque, au sortir d'une pièce de Sophocle ou d'Euripide, on avait annoncé l'invention du cinéma, on aurait certainement trouvé des gens qui auraient soutenu l'idée de ne plus faire de théâtre.
Il n'empêche que l'on continue à faire du théâtre aujourd'hui. Je crois qu'une mutation technologique n'annule pas les précédentes formes d'expression. En revanche, il faut les transformer totalement. Mieux, je crois qu'aujourd'hui – c'est valable autant en France qu'ailleurs –nous devons inventer et imaginer un nouveau type de presse. En France, tous les jeunes de moins de 35 ans ne comprennent plus une grande partie de ce que l'on écrit.
- Et pourquoi cela ?
Parce qu'ils sont formés à l'informatique, aux phrases courtes, etc. Nous employons des mots qu'ils ne connaissent pas… Il y a des structures de phrases qu'ils ne suivent plus. C'est comme ça ! Je vous rappelle qu'en France, au début du XVIe siècle, c'était la même chose. On parlait un vieux français fait de latin. Personne ne le comprenait plus ou, du moins, très peu de gens le parlaient. Il a fallu attendre que la Pléiade et Ronsard fassent la révolution et mettent au point un nouveau langage. C'est ce qui se produira au XIXe siècle avec Victor Hugo. De temps en temps, il faut inventer. Nous ne pouvons plus adopter un langage que les gens ne comprennent pas. Il faut réinventer la façon de faire les journaux.
- Il n'y a pas que les aspects techniques qui vous gênent dans la presse française. Vous avez souvent dénoncé le fait qu'elle soit l'otage de deux idéologies qui ne sont plus tout à fait dominantes. Est-ce toujours le cas ?
Effectivement, il y a deux idéologies dominantes dans la presse française. Je fais référence à la droite néolibérale et à la gauche bien-pensante. Je ne dis pas cela de façon péjorative. Ce sont des idéologies respectables, comme toutes les autres idéologies.
Le problème n'est pas là. Je pense seulement que ces idéologies ne représentent que 40% de ce que les gens pensent. Je pense que 60% du public, en France, est hors de la gauche bien-pensante et de la droite néolibérale. Il y a donc un problème de pluralité. La presse française serait assurément plus riche et moins malade si elle avait reflété davantage l'ensemble des pluralités et des diversités d'opinions qui existent en France. Nous l'avons vu sur l'Europe. 95% des journaux ont fait campagne pour le «oui» alors que 55% des Français ont voté en faveur du «non». Tout cela prouve bien qu'il y avait un hiatus, une crise… un problème.
- Cette sorte de bipolarisation médiatique déteint-elle sur le traitement des sujets liés à l'Algérie ?
Cela dépend de ce que vous dites. Concernant l'Algérie, je ne peux pas vraiment parler de pensée unique car il y a eu Marianne qui a défendu des points de vue différents sur l'Algérie. Retenez seulement qu'en France, vous avez deux lobbies très importants. L'un rassemble tous ceux qui, pour une raison ou une autre, n'ont jamais accepté l'indépendance de l'Algérie. Je parle de certains, comme les pieds-noirs et les harkis. En gros, je parle de la droite colonialiste ! Il y a tout un camp qui n'a jamais accepté le fait que l'Algérie soit indépendante et pour lequel l'Algérie est toujours l'ennemi. A gauche, vous avez un autre lobby : celui des ex-«pieds-rouges» qui compte des trotskistes, etc., qui n'ont jamais pardonné à l'Algérie de ne pas avoir été ce qu'ils auraient voulu qu'elle soit en 1962-63. La convergence de ces deux lobbies exprime des rancœurs, de fortes rancœurs anti-algériennes, pour des raisons tout à fait différentes. Cette situation pèse beaucoup sur la façon avec laquelle les médias couvrent l'Algérie. Souvenez-vous, les médias ont été sur la ligne du «qui tue qui ?», à l'exception de Marianne. Ceci dit, j'ai pu exprimer mes positions autant que j'ai voulu.
- Pensez-vous que la liberté d'expression et de la presse est menacée en France depuis l'arrivée de Sarkozy au pouvoir ?
Vous n'ignorez pas mes positions politiques. Je suis extrêmement opposé au pouvoir «sarkozyste». Mais pour moi, c'est très gênant d'en parler dans un pays étranger. L'Algérie est un pays étranger, il faut quand même s'y faire ! (rires)
- Vous êtes quand même à l'origine de la une de Marianne qui compare le président français à un voyou (Le voyou de la République, ndlr)…
Oui, c'est moi qui suis à l'origine de cette une. Je suis même l'auteur de l'article. C'était lors du discours de Grenoble. A ce moment-là, il y a eu une levée de boucliers à gauche. Des éléments à droite n'étaient également pas contents. C'est là que Nicolas Sarkozy a été traité de raciste, de vichyste et de fasciste.
Dans l'article intitulé «Le voyou de la République», j'ai soutenu une idée différente. J'ai dit non, il n'est pas raciste, vichyste ou fasciste. C'est juste un mec qui se permet tout. Il est capable de parler comme Olivier Besanceneau (président du NPA, ndlr) ou Jean-Marie Le Pen (leader du Front national, ndlr). Dans mon écrit, j'ai donc soutenu qu'il était quelque part un voyou politique. Mais à ma grande surprise, le fait de l'avoir qualifié de voyou politique a beaucoup choqué. Il semble que la réaction aurait été moindre si je l'avais traité de fasciste, de vichyste ou de raciste.
- Les relations algéro-françaises traversent actuellement une zone de turbulences. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez ?
Je pense que les Algériens sont un peuple tout à fait extraordinaire et totalement schizophrène. C'est l'un des rares peuples où tout le monde est toujours dans l'opposition. Tout de même, cela n'empêche pas certains d'être au pouvoir. La deuxième schizophrénie a un lien avec le rapport que ce peuple entretient avec la France. Il est le plus francisé qui soit. Seulement, les Algériens le sont dans la fascination et dans la haine. Et l'être dans la fascination et dans le rejet, c'est la même chose que de l'être dans l'amour. Je remarque que la France est partout omniprésente et sous toutes les formes. Et donc, nous nous ressemblons quelque part. Vous avez des champions du monde de pétanque. Pour nous Français, cela devrait déjà nous mettre la puce à l'oreille. Le couscous est devenu un plat national en France. C'est absolument extraordinaire. Comme sous de Gaulle, il y a, sur le plan diplomatique et dans beaucoup de domaines, des conjonctions entre l'Algérie et la France. J'ai toujours pensé qu'ensemble, nous pouvions réaliser des choses extraordinaires.
- Qu'est-ce qui empêche encore, selon vous, l'Algérie et la France d'avoir de bonnes relations ?
En plus des deux tendances dont je vous ai parlé, les crispations sont des deux côtés. Par certains côtés, la France a représenté une tragédie dans l'histoire algérienne. Mais elle n'a pas représenté qu'une tragédie. Elle a tout de même apporté des choses. Il est vrai que cela s'est fait dans l'intérêt des Français. Mais ça ne fait rien. Ce sont quand même les Algériens qui en ont hérité. Les Algériens ont aussi beaucoup apporté à la France. A titre d'exemple, je pourrais citer l'apport de la littérature algérienne. A un moment, nous pourrions oublier ce qui nous divise et nous dire voilà, nous avons fait des choses ensemble. Pour que cela puisse vraiment aller dans le sens que nous voulons, il faut un changement en profondeur des regards que nous portons les uns sur les autres.


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