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Gherras et Kouamlia regardent le temps passer
Aïn Témouchent Comme dans une ferme...
Publié dans El Watan le 19 - 12 - 2005

Juché sur une colline qui descend en pente douce, Gherras Baroudi regarde la mer distante à quelque 6 km de là. Sidi Kacem, un mamelon, lui fait dos avec son marabout dressé au sommet tel un téton. En cette matinée de froidure, le ciel est d'un magnifique bleu, alors que le reste des couleurs est aux douces tonalités en panchromatique.
En se rapprochant, après une quinzaine de kilomètres de Témouchent, du chef-lieu de wilaya, on passe sous un gracile arc de triomphe en béton planté à 500 m des premières bâtisses. Il devait chanter les victoires de la révolution agraire telle le village lui-même, une agglomération qui n'a été occupée qu'en 1988 après la mort de cette réforme au nom de laquelle sa première pierre a été posée, une année avant le décès du Président Boumediène. 400 âmes y vivent aujourd'hui. Notre présence et notre qualité sont vite connues. Aussitôt, l'on nous entoure. Nos interlocuteurs font vite de voir venir nos questions et les a priori des citadins qui les sous-tendent sur le thème de l'hiver en douars reculés, un sujet pour lequel nous faisions chez eux le déplacement. « Mais, nos problèmes, ce n'est pas l'hiver. C'est même bon signe pour nous qu'il pleuve, qu'il vente et qu'il fasse froid. Ce que vous nommez mauvais temps, c'est pour nous l'équivalent de promesses de récoltes et de verdure pour nos pâturages ! C'est plutôt tout le temps de l'année qui fait problème. » Le gaz pour se chauffer ? Il y a parfois pénurie, mais c'est moins dramatique depuis trois années les grandes agglomérations ont commencé à être raccordées au gaz de ville. L'électricité ? Les coupures intempestives, cela passe encore, mais quand l'électroménager en prend un coup, c'est plutôt enrageant, mais que faire face à la puissance de Sonelgaz ? Les chiens errants et affamés, cela c'est un souci depuis qu'il n'y a plus de battues. Mais le plus sérieux, oui, c'est l'agriculture. Le système des EAC montre ici plus qu'ailleurs ses limites. Alentour, à travers champs, la viticulture n'a pas repris ses quartiers à l'instar de ce qu'il en est dans le reste de la wilaya. Car, depuis l'arrachage du vignoble dans les années 1970 puis 1980, le sable du rivage soulevé par le vent en rafales, un vent venant d'un large sous la tempête, a progressivement envahi les terres du littoral. Du coup, le sol a perdu sa productivité. « Heureusement que contre le chômage forcé, la carrière de sable voisine fournit quelques journées de travail lorsqu'un transporteur préfère remplir sa benne de sable de qualité plutôt qu'au moyen de la pelleteuse mécanique qui, elle, transborde le tout-venant. » Ainsi, le village a commencé à se dépeupler. Et de trois commerces bien achalandés, l'on est passé à deux misérables étals. « Sur les 150 habitations, 40 ont été vendues comme maisons secondaires pour les gens du Sud, les Bchachria, qui y passent la saison estivale. Il est vrai que ces gens ramènent de l'animation au village mais ce sont eux qui en profitent. Nous, on ne fait que regarder envieux. Eux ont des voitures pour aller où ils veulent quand ils veulent. L'été, il n'y a plus de transport car tous les Karsan sont mobilisés par les pouvoirs publics pour la saison estivale. Ainsi, nous devons faire 3 km jusqu'à l'embranchement de la route pour pouvoir éventuellement disposer d'une place. En hiver, au moins, il nous arrive parfois de voir passer au village un microbus qui chôme. » Les loisirs ? Ici, explique-t-on, on vit comme dans une ferme avec en moins la chance de pouvoir s'occuper des légumes du jardin et des bêtes. Le centre culturel est squatté tout comme la salle de cinéma et quelques autres équipements. Un café clandestin s'ouvre parfois une ou deux heures à la tombée du jour. C'est le moment de se retrouver ensemble comme en ville. Si les gendarmes arrivent à passer, l'on ferme dans la précipitation. Gherras Baroudi, est-ce tout ? Non, il est pourtant un petit rayon dans la morosité ambiante. Ce sont les benjamines de l'école qui ont décroché en basket-ball une médaille d'argent aux derniers Jeux scolaires nationaux à Bordj Bou Arréridj. Cela, c'est le fruit de l'engagement bénévole d'Ahmed Chorfi, un instituteur de l'école, qui se contente pour tout équipement d'un minuscule terrain de 15/15m et d'un panier tout aussi non réglementaire.
À 19 h, il fait déjà nuit
Mais il n'est personne au village à percevoir ce rayon tout comme à Kouamlia, à 50 km plus loin, où des femmes qui se sont mises à l'alphabétisation prodiguée bénévolement par une institutrice à la retraite. Qui des estivants allant goûter les joies de la mer à Bouzedjar, des vacanciers qui le traversaient obligatoirement, se souvient encore de leur douar ? Un village dont l'entrée est longée d'un côté par une rangée de mûriers, des arbres dont il est permis de goûter aux savoureux fruits ? Certainement plus aucun depuis voilà bien des années. En effet, la vieille et pittoresque route qui traverse Kouamlia, bordant sur plusieurs kilomètres l'oued Baroudi, avec ses potagers et ses riants lauriers roses, a été désertée. Les décideurs locaux, installés dans le bureaucratique confort de leur administration, ont préféré un nouveau tracé moins en lacets à travers plateau pour assurer aux automobilistes un passage à vitesse accélérée vers la mer, cela même si par rapport à la première route, il n'y a aucun gain de temps réalisé. Tant pis alors pour la charmante promenade. Tant pis également pour Kouamlia où depuis il n'y a plus qu'un Karsan pour assurer le transport. « Si vous ratez la navette de 8h pour El Amria, il faudra attendre celle 9h30 si vous y trouvez une place. Vous n'avez d'autre choix que de faire les 3 km à pied. Et, vous n'avez surtout pas intérêt à tomber malade ! » Ainsi, après le côté jardin, Kouamlia n'est plus que côté cour. Ses cinq ou six ruelles sont désertes. Il faut chercher pour rencontrer quelqu'un sur les 500 âmes du douar quand les enfants sont à l'école. Le soir, personne ne s'avise d'être dehors au-delà de 19h, après la prière de l'Icha, hormis, s'il ne pleut pas, quelques adolescents attroupés sous le faisceau lumineux d'un poteau électrique. Ils restent là à deviser près de l'une des trois petites épiceries du village, la seule à demeurer ouverte jusqu'à l'heure du Journal télévisé. Car à ce moment-là, en ce douar encaissé entre deux plateaux, il fait déjà nuit. Le voisin lit de l'oued Sidi El Baroudi, lorsqu'il n'est pas traversé par quelque crue hivernale, charrie un courant d'air glacial à briser la roche. Et, si le temps se met à faire ses caprices, il n'y a plus que Dame chandelle et sa vacillante lumière pour attendre le souper. Elle aide à passer le temps nécessaire pour faire gagner suffisamment de chaleur à son corps et de s'assoupir, bercé par le mugissement du vent ou le crépitement de la pluie. Les mémés, qui aidaient les enfants à dormir grâce à leurs sempiternels contes, ont désappris à faire office d'une tradition orale sous la féroce concurrence d'une télévision réduite, elle aussi, épisodiquement au silence. « Que faire d'autre ? De toute façon, nous ne sommes pas les seuls à être constamment privés d'électricité », se justifie presque El Hachemi qui précise que tous les douars environnants vivent cette situation depuis toujours. Lui, son frère et un voisin que nous venions d'aborder ne savent même pas qu'il est anormal en 2005 d'être privé de lumière à cause du mauvais temps. « Ecoutez, depuis trois ou quatre années, les choses se sont beaucoup améliorées. Il y a du goudron, quelques trottoirs, une cantine scolaire. Enfin, l'évolution est de 40 à 50% en progression mais bien sûr un douar cela demeure toujours un douar. » Et vos interlocuteurs de vous rappeler que Kouamlia, début 1970, ce n'était qu'une dizaine de tentes, entendre dix familles, selon la formule locale. Une première et forte migration de nouveaux agropastoraux, des Hmyane venus des Hauts-Plateaux, s'y est ajoutée. Elle fuyait les débuts des années sécheresse et la révolution agraire. Puis dans les années 1990, les Cherragas, dénomination de tous ceux qui viennent d'une région de l'Est, y ont afflués. Ceux-là mettaient de la distance entre eux et le terrorisme qui sévissait dans leurs régions d'origine : Tissemsilt et Relizane. Ici, pour tous, ce n'est pas l'éden, mais ils ont échappé à l'innommable. C'est dire si personne ne veut faire la fine bouche. Le même propos nous est réitéré par d'autres villageois qui eux pensent à d'autres priorités. « Vous savez depuis qu'il y a eu la réalisation de cette route qui mène d'El Amria, notre chef-lieu de commune, en direction de Bouzedjar, une station balnéaire et port de pêche, notre village est devenu enclavé, alors qu'il était un point de passage obligé. » Quelques commerces avaient commencé même à fleurir. Maintenant, il n'y a que le strict nécessaire. El Amria est devenue une destination matin et après-midi pour aller au café d'abord et faire quelques emplettes si nécessaire.


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