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La chasse aux sorcières est ouverte
Expéditions punitives contre des «prostituées» à M'sila
Publié dans El Watan le 07 - 07 - 2011

Si les prostituées reviennent ici», dit l'un des nombreux jeunes qui nous entourent en désignant les appartements calcinés du troisième étage, «cette fois-ci on va les brûler vives».
M'sila.
De notre envoyé spécial
Il y a autant de détermination que de colère dans les propos de ces voisins d'immeuble de la cité Chebilia, à M'sila, chef-lieu de wilaya d'un Hodna qui respire la misère et la mal-vie. Chebilia est une cité populeuse, crasseuse, plantée au cœur même de la ville de M'sila. Une cité comme il y en a tant en Algérie. C'est dans ce décor de béton et de poussière qu'un effroyable drame a failli se produire il y a cinq jours.
D'abord, les faits. Selon les témoignages que nous avons recueillis auprès des habitants de ce quartier, c'est en fin d'après-midi du samedi 2 juillet que des centaines de jeunes, en provenance de toutes les cités environnantes, se sont rassemblés au bas d'un immeuble situé sur la principale artère de la ville de M'sila. Ils veulent chasser la dénommée R., habitant le troisième étage. Son appartement est connu pour être un lieu de rendez-vous un peu plus que galants. R. roule en 4x4 de luxe et fait travailler plusieurs filles. «Tous les quinze jours, il y a une relève. Des filles nouvelles arrivent, les anciennes partent», dit un habitant de l'immeuble. Les voisins et les riverains sont écœurés par ce commerce indigne qui se fait sous les yeux de leurs épouses et de leurs enfants. La dénommée R. est décrite comme une maquerelle arrogante, tellement sûre de ses appuis dans les hautes sphères locales qu'elle ne cherche même pas à cacher qu'elle pratique le plus vieux métier du monde. Les rendez-vous se font par téléphone. Le client arrive au bas de l'immeuble où l'attend le fils aîné qui l'escorte jusqu'au troisième étage, comme s'il s'agissait d'un membre de la famille. Toutefois, le manège ne dupe personne. Dans l'appartement, ce sont quatre à cinq filles aux mœurs aussi légères que leurs tenues qui s'occupent des désirs des clients de cette Madame Claude du Hodna.
Ce samedi soir, la foule est déterminée à en finir avec ce lieu de débauche au milieu de leur cité. Un ultimatum est donné à la dame au 4x4. Elle a 24 heures pour plier bagage et vider les lieux. R. ne l'entend pas de cette oreille. «Je ne pars pas, je fais ce que je veux, allez vous faire f…», telle est sa réponse suivie d'un chapelet d'injures et d'insanités, selon des témoins présents sur les lieux.
Dans un immeuble voisin, une autre femme, de la même vieille corporation que madame R. a reçu le même ultimatum. Elle a plié bagage et s'est éclipsée discrètement. Sous la pression de la foule qui n'a cessé de grossir, la maquerelle du 3e étage finira par partir dans la nuit. L'assaut est alors donné. L'appartement est brûlé, mais les flammes menacent de s'étendre aux étages supérieurs qu'elles lèchent allégrement. «J'étais au cinquième étage avec mes enfants, mais on a réussi à nous faire sortir», dit un père de famille visiblement marqué par l'épreuve. Le pire a été évité de justesse. Après les témoignages des uns et des autres, nous décidons de monter au troisième étage. La cage d'escalier est dans un état indescriptible. «Elle a toujours été ainsi. Cela ne date pas de l'incendie», dit l'un des résidants. Les murs sont noirs de fumée et le sol de l'appartement est jonché de vêtements et d'objets. Même les cadres des portes sont calcinés.
Cette chasse aux sorcières qui s'est ouverte à M'sila n'en est pas à son premier épisode. Nous nous rendons dans une autre cité, à quelques blocs de là, où un drame s'est produit il n'y a pas si longtemps. La cité des 500 Logements est mitoyenne de l'université. Nous sommes au tout début du mois de juin. Le dénommé Ali, qui habite la cité, est ennuyé par un chahut créé par une bande de voyous rassemblés en bas d'un immeuble qui passe pour abriter des femmes de petite vertu. Il sort voir de quoi il en retourne et s'accroche verbalement avec le groupe de voyous. L'altercation s'envenime rapidement et le malheureux reçoit un bloc de pierre sur la tête qui l'envoie directement à l'hôpital dans un état semi-comateux. Il décédera au bout de deux jours passés au service de réanimation. La nouvelle de sa mort se répand comme une traînée de poudre. Des émeutes éclatent aussitôt et c'est la maison de rendez-vous, accusée d'attirer tous les voyous du coin, qui est le principal objet de la vindicte populaire. Des centaines de personnes sont rassemblées devant l'immeuble avant de le prendre d'assaut, tentant de l'escalader et d'arracher les barreaux qui protègent les fenêtres, mais en vain. D'autres tentent de mettre le feu à la conduite de gaz sans plus de succès. Dans le petit immeuble de deux étages, quatre femmes sont prises au piège et courent le risque d'être lynchées si une porte ou une fenêtre cède. Il n'y a pas de voisins. Ils ont tous fui cette promiscuité honteuse.
Quelques personnes de bonne volonté, dont l'imam du quartier, esayent de faire entendre raison à la foule en délire. En vain. La police tente une maigre protection avec une dizaine d'éléments antiémeute, mais le risque de les voir réduits en charpie par les milliers de personnes qui encerclent l'immeuble est tel qu'on leur conseille de se retirer vivement.
Au petit matin, les quatre prisonnières finissent par être évacuées discrètement, lorsque les esprits se sont enfin calmés. Aujourd'hui, l'immeuble est fermé et la porte d'entrée garde encore des traces de l'incendie. L'événement passé, les autorités locales sont venues mettre un ralentisseur sur la chaussée, en face de l'immeuble, et une plaque de sens interdit. Comprenne qui voudra. Autre cité, toujours à M'sila. Des immeubles lépreux plantés au milieu de terrains vagues crasseux, jonchés d'immondices. Au fond de la cité, un immeuble porte des traces d'incendie sur toute sa façade. La vue d'un journaliste qui prend des notes et des photos attire la curiosité d'une dame qui hasarde la tête à sa fenêtre. Nous apprenons bientôt que l'immeuble a été brûlé dans la nuit du 5 juillet après le départ des locataires, des femmes aux mœurs légères qui attiraient des dizaines de clients au point que beaucoup d'habitants ont fini par déménager, excédés par une pratique contraire à leur morale et à leurs valeurs familiales.
Un peu plus loin, des jeunes sont assis sur des blocs de pierre, face à des locaux commerciaux saccagés, vandalisés. Ces commerces sont «les locaux de Bouteflika», nous apprennent les jeunes oisifs. 78 locaux érigés au beau milieu d'un terrain vague jonché d'ordures, loin de tout. «Ils ne servent à rien ! Pourquoi s'étonner ? Ils ont même donné un local de vulcanisateur à quelqu'un au premier étage», dit l'un d'entre eux. Questionnés sur les femmes qui ont quitté l'immeuble incendié, les jeunes affirment qu'elles avaient fini par salir la réputation du quartier : «Elles étaient arrogantes. Elles ne cherchaient pas à passer inaperçues. Elles étaient protégées par qui vous savez…»
Retour à la cité Chebilia par une autre rue. Un marché informel s'est installé au beau milieu de la chaussée à double voie. Des cabanes de haillons et de chiffons qui défigurent le paysage, si tant est qu'il reste encore une quelconque beauté à ces cités champignons qui n'ont aucune honte à étaler leur laideur et leur saleté.
Des cités déshumanisées, sans le moindre espace vert, sans banc public, sans aucune infrastructure de culture ou de loisirs. Il y a longtemps que les résidants de ces immeubles difformes ont perdu le sens du civisme. Ils ne s'entendent plus pour nettoyer, reverdir et embellir leur environnement. Ils ne sont plus d'accord que pour défendre un dernier acquis : leur dignité.


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